Atelier présidé par M. Sadok Ben Jemaa, Senior Atugéen (ancien Ponts et chaussées) et actuel président de la commission nationale de la productivité. Avec la constitution de la commission, il y voit une résurrection de l'intérêt pour la productivité après que l'Institut national de la productivité eut été abandonné. C'est en substance, dit-il, une réconciliation avec la rationalité économique. Pour un pays qui a toujours consacré 7% environ de son PIB à l'enseignement, quoi de plus naturel que de se demander des comptes. Il avait cité l'exemple de la Finlande, un pays tout mignon avec seulement 4 millions d'habitants et un PIB qui dépasse le PIB maghrébin -phosphate et pétrole compris-, il y a de quoi se poser des questions et de prendre la question de la productivité par les cornes est un bon début. D'ailleurs, la Commission rendra son rapport le 28 juillet dans un séminaire public présidé par le Premier ministre, et le vrai travail, de son point de vue, commencera après cette date car il faudra aller sur le terrain avec une obligation de résultats. La productivité a-t-elle de quoi inquiéter les syndicats ? Non, non et non. D'ailleurs les représentants de la Commission rencontreront sous peu les représentants de la centrale syndicale, l'UGTT. Pour faire court, la productivité n'est dirigée contre personne. Elle est la recette du salut pour l'économie. Elle permet de créer de la valeur. En créant de la valeur, on se donne une marge pour de meilleures perspectives de rémunération et d'emplois. C'est l'équation de la prospérité pour tous. C'est une voie «gagnant-gagnant», martèlera le conférencier. Il ny a pas de recettes sur mesure Les panélistes diront qu'il n'existe pas de recettes toute faites pour faire de la productivité. Il faut les adapter à la culture maison. Faut-il résoudre la question par le seul intéressement matériel. C'est non. Cela joue en partie. Mais le plan de carrière a aussi son importance. Le lustre de la société joue aussi. On est fier d'afficher son appartenance à telle entreprise qui a son aura sur la place. Les ressorts de la motivation sont nombreux, variés et il faut les imaginer. On ne va pas puiser dans un livre de recettes pour trouver un mode d'emploi. La productivité, c'est une façon de faire La productivité, et cela fait l'unanimité, c'est aussi une certaine façon de faire. On attribue notre faible fécondité en la matière par notre attachement au style latin, contrairement au style anglo-saxon beaucoup plus débridé, et on va dire plus inventif. D'ailleurs, le modérateur confiera un aparté qu'il avait eu avec l'un des ambassadeurs de France concernant la question de la rigidité managériale qu'il trouvait «engourdie par l'héritage culturel français, trop dirigiste et peu entrepreneurial» ; et le diplomate de rétorquer «vous y avez quand même rajouté un peu de l'esprit turc», comprenez de l'obstination. Une petite note d'humour et la messe est dite. La part de l'organisation Les débats ont également fait la part belle à l'organisation industrielle. Et, tenez-vous bien, les entreprises qui font du suivi et du business intelligence réalisent de meilleurs scores de productivité que ceux qui se penchent exclusivement sur la production. Cela peut apparaître paradoxal, mais avoir ses concurrents à l'il et faire toujours la corrélation entre ce qui est planifié et ce qui est réalisé n'est pas source d'éparpillement mais éclaire sur la meilleure façon de faire le travail. Cette résolution n'est pas à méditer mais à retenir et à appliquer, tout de suite. Les apports de l'organisation industrielle Les débats ont également fait apparaître nettement la part de l'organisation industrielle. Le «lean manufacturing» fait l'unanimité. C'est ce modèle d'organisation qui a été testé par les constructeurs automobiles et qui étaient exaspérés de ne pouvoir évacuer toutes les poches de non qualité et de gaspillage sur chaîne. Avec le «lean», ils ont pu récupérer des gisements précieux de productivité. L'exemple est donné par les constructeurs auto indiens. Quand le coût moyen de la voiture en Inde était de 7.100 dollars, avec la mise en place du lean, ils sont arrivés à 2.500 dollars. Les chiffres parlent d'eux-mêmes, en l'occurrence. Les termes de référence de la productivité Nous pensons que l'atelier a fait le tour de la question. La productivité, c'est aussi du métier et du savoir, in fine de la compétence. Le modérateur rappelle que quelques années plus tôt, le cabinet du département des travaux publics comptait 12 ingénieurs des grandes écoles et cela remontait à l'époque où feu Mokhtar Laatiri était aux affaires. Actuellement, ce nombre est descendu à un. Il faut donc composer avec les compétences de haut niveau : savoir les attirer et les garder. Les écoles de l'organisation industrielle ont prouvé leur apport et il faut savoir les incorporer. Cela prend tout son relief en ces temps où le pays, à l'issue du Forum de Carthage pour l'investissement international, avait fait exhiber son plan stratégique de 2016. Dans le même temps, M. Sadok Ben Jemma insistera pour galvaniser les énergies rappelant qu'un ingénieur et un économiste étaient en mesure de se créer leur propre job et de ne pas pantoufler dans le salariat. Cela sonne comme une consigne pratique. Dans quelle mesure cet appel serait-il suivi d'effet ? A suivre.