Les manifestations des « No Vax » (les personnes opposées à la vaccination anti Covid) se déroulent régulièrement en Europe, aux Etats-Unis et un peu partout dans le monde. En Italie le 15 octobre 2021 un livret de vaccination anti covid appelé « Pass Sanitaire » ou « Green Pass » est devenu obligatoire pour accéder aux lieux de travail et aux espaces fermés tels que les restaurants, supermarchés, cinémas etc. Cette disposition prise par un gouvernement de coalition présidé par Mario Draghi a allumé la mèche d'une agitation sociale animée par l'extrême droite en pleine campagne électorale pour les municipales. Le 9 octobre dernier une manifestation organisée par les « No Vax » et autorisée par le ministère de l'Intérieur à la place du peuple en plein centre de Rome a vu se rassembler une dizaine de milliers de personnes. Nombre d'entre elles étaient membres du parti néo-fasciste Forza Nuova. Mimant l'assaut du congrès américain suite aux dernières élections aux USA, une grande partie des manifestants s'est dirigée vers le palais de la présidence du gouvernement et le parlement italien. Ce qui était au départ une manifestation pacifique s'est transformé pendant des heures en des scènes de guérilla urbaine en plein centre de Rome. Ne pouvant atteindre leurs objectifs initiaux, les leaders de la manifestation se dirigèrent vers le bureau du plus grand syndicat du pays CIGL, d'orientation de gauche, et l'envahirent provoquant un mouvement de panique. La journée s'est soldée par l'arrestation d'une douzaine de manifestants dont les deux leaders du parti Forza Nuova. Ce cocktail de violences sociales et politiques a trouvé un écho ambigu, pour ne pas dire un soutien tacite des partis de droite « ligue du nord » et « frères d'Italie ». Dans ce contexte, la gauche n'a pas tardé à rappeler les lois de la période post guerre pour demander la dissolution des partis néo fascistes et les syndicats ont manifesté samedi dernier à la même place du peuple pour répondre aux agressions subies. Tout ceci se passe dans un pays touché durement par la pandémie avec plus de 120.000 morts et dirigé actuellement avec le consentement de toutes les familles politiques par un banquier de renommée mondiale, Mario Draghi, qui a su remettre les pendules à l'heure en Italie. L'Italie a repris la pente de la croissance avec 6 points de PIB durant le dernier trimestre (1 point est l'équivalent de 18 milliards d'euro). Sachons apprendre de l'expérience des autres. Nous sommes las des éternelles polémiques qui nous ont fait tant de mal. Le projet de passe sanitaire tunisien (PST) sera prochainement examiné par le conseil des ministres dans un contexte de fortes tensions sociales, politiques et de clivages extrêmement inquiétants. Pourtant, il nous faudra garder ce sujet en dehors de ces tensions. La sortie de la pandémie n'est pas aisée, le plus dur reste à faire. Nous comptons plusieurs centaines de milliers de nouveaux pauvres et des milliers de petites et moyennes entreprises ont déposé leurs bilans. La note souveraine de notre pays vient d'être dégradée par les agences de notation mondiale. La dernière dégradation de Moody's hypothèquera davantage la situation économique tunisienne en classant la Tunisie parmi les pays à très haut risque « classe C » pour les investisseurs et les bailleurs de fonds. Dans ces conditions, doter le système sanitaire d'une mesure protectrice n'est pas un luxe, elle ne peut que revigorer l'économie du pays. La mise en place du PST sera un test important. Elle doit se faire sous une tutelle strictement sanitaire. Espérons que sur ce sujet tous les acteurs aient la sagesse d'éviter toute instrumentalisation politique. Certes l'introduction de l'obligation du PST devrait être instaurée en tenant compte du contexte national et de façon progressive mais elle permettra une reprise de la vie quotidienne du citoyen. Il faut restaurer la confiance. Un PST pour le personnel de la santé, de l'enseignement et de l'administration relancerait la machine sans craintes. Un PST faciliterait aussi la vie des voyageurs, élément essentiel pour un pays touristique. Enfin un PST sans polémique ni exploitation politicienne serait un atout entre les mains de notre gouvernement qui a tant de dossiers à gérer et dont l'avenir du pays dépend de sa réussite ou non. Souhaitons et sachons mettre en sourdine nos divergences pour qu'il réussisse.