CHAIMA ISSA, Universitaire, militante des droits humains, journaliste, figure emblématique du Collectif « Citoyens contre le coup d'Etat » et membre du Comité politique du Front du Salut national, se heurte, depuis le 18 janvier 2022, comme beaucoup d'opposant-e-s politiques, journalistes et défenseur-e-s des droits, aux représailles politiques sous couvert de fantaisistes infractions pénales. Poursuivie par le ministre de l'Intérieur devant les juridictions militaires en méconnaissance de la séparation des juridictions civiles et militaires et de leur incompétence rationae personnae vis-à-vis des civils, elle risque plus d'une dizaine d'années de prison. Elle a reçu aujourd'hui même, le 24/01/2023, une nouvelle convocation pour comparaitre le 27 janvier 2023 devant le Tribunal militaire de 1ère Instance de Tunis. Trois types de charges sont retenues contre elle : « l'incitation, par n'importe quel moyen, d'un groupe de plus de trois militaires, à la désobéissance, la résistance et l'exercice des violences contre le supérieur hiérarchique » (article 81 du Code de la justice militaire (six ans d'emprisonnement, si cette instigation n'a pas eu d'effets] ; « l'offense au chef de l'Etat » (article 67 du Code pénal. 3 ans de prison) ; « la production, la diffusion, l'envoi, la rédaction de fausses nouvelles et données, de rumeurs, dans le but de porter atteinte aux droits d'autrui ou de porter préjudice à la sureté publique ou à la défense nationale ou de semer la terreur parmi la population » (article 24 du D-L 54, Cinq ans d'emprisonnement). Toutes ces charges, pour avoir fait sur Radio IFM le 22 décembre 2022 le diagnostic de « l'impasse constitutionnelle et politique dans laquelle se trouve le pays depuis le coup d'Etat du 25 juillet 2021, l'effondrement économique qui sévit, l'échec des élections du 17 décembre 2022 et émis l'opinion « qu'elle doute que les institutions de défense du pays continueront de soutenir un tel processus, notamment le second tour d'élections législatives fictives ». Face à ces dérives autoritaires, un Comité de soutien à CHAIMA ISSA s'est constitué dans la diversité des horizons philosophiques, idéologiques, politiques de ses composantes. Mu par les valeurs de la démocratie, du pluralisme, de l'Etat de droit, des libertés d'opinion et d'expression, le COMITE DE SOUTIEN, dont la liste est ci-après, déclare ce qui suit :
- NOUS dénonçons l'instrumentalisation de la justice et plus spécifiquement la mobilisation de la justice militaire contre les civils pour liquider les opposants politiques. Nous alertons des dangers que cela représente par la perte de confiance en les instituions de l'Etat et l'érosion du principe de sécurité juridique des justiciables.
- NOUS récusons la régularité et la légalité des poursuites et des procédures employées contre CHAIMA ISSA étant précisé que les illégalités de formes entachent le fond du droit. Nous considérons que le D-L 54 est non seulement gravement attentatoire au principe fondamental de la légalité des peines et des délits -étant dépourvu des éléments clés de la loi en l'absence de délibérations au sein d'une assemblée législative démocratiquement élue- mais est encore plus proche du talion que de la justice en l'absence des garanties fondamentale du procès juste et équitable.
- NOUS apportons à la courageuse CHAIMA ISSA notre solidarité active, pour qu'elle puisse jouir pleinement et sans entraves de tous ses droits humains universels conformément aux pactes internationaux des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, à la convention de la CEDAW contre toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et à son protocole de Maputo sur les droits des femmes africaines, tous engagements internationaux dument ratifiés par la Tunisie comme source supérieure d'une légalité mise à mal par les mesures d'exception et les lois martiales.
- NOUS appelons les forces démocratiques du pays et les défenseure-s des droits humains à faire bloc pour que notre pays, fleuron des révolutions démocratiques arabes, retrouve son fonctionnement démocratique, se réconcilie avec l'Etat de droit dont le principal pilier est une justice indépendante et offre à ses citoyennes et citoyens les conditions nécessaires à une vie de dignité, de liberté et d'égalité.