Pas moins de 64 nouvelles mosquées seront ouvertes à l'occasion du mois de Ramadan qui démarre demain, jeudi 23 mars 2023. Le régime de Kaïs Saïed a beau dire qu'il veut tourner la page des islamistes, il continue comme eux à jouer sur la fibre religieuse pour gagner des points de sympathie auprès des Tunisiens. Le ministre des Affaires religieuses, Ibrahim Chaïbi, a déclaré mardi 21 mars 2023 en marge de la cérémonie de l'observation lunaire du mois de Ramadan, que 64 nouvelles mosquées vont être ouvertes à l'occasion. La déclaration du ministre est surprenante dans un pays qui peine à trouver les ressources nécessaires pour boucler son budget, qui ne réussit toujours pas à obtenir un prêt de 1,9 milliard de dollars du FMI et qui n'a obtenu aucun dinar de la Commission de conciliation pénale censée rapporter 13,5 milliards de dinars, d'après le président de la République. L'Etat peine à trouver des fonds pour son budget et se surendette auprès des banques, mais comme par miracle, il y a eu des ressources pour 64 nouvelles mosquées. Certes, ces mosquées sont érigées par des dons privés, sauf que c'est l'Etat qui les gère ensuite et doit assumer leurs dépenses, notamment les salaires des imams et les factures d'eau et d'électricité.
En chiffres, la Tunisie compte 6129 mosquées et lieux de culte, selon les chiffres officiels du ministère des Affaires religieuses, arrêtés à juillet 2020. Jusqu'en 2010, la Tunisie comptait 3595 mosquées. C'est-à-dire que l'on a construit en dix ans presque autant de mosquées que la période 1900-2010. Ces dix ans, de la période postrévolutionnaire, coïncident avec la gouvernance des islamistes. L'encouragement de la construction des mosquées a, indéniablement, des motifs politiques. Chacune de ces mosquées se voit nommer un imam par le pouvoir exécutif. Certains imams ont même réussi, grâce à leurs prêches, à obtenir des postes politiques. Le cas de Noureddine Khadmi, imam de la mosquée El Fath à Tunis, devenu ministre des Affaires religieuses ou de Mohamed Affes et Ridha Jaouadi, imams de mosquées à Sfax devenus députés. Tous ont utilisé la tribune de la mosquée pour des prêches enflammés, souvent politiques et parfois même terroristes quand on se remémore leurs appels à faire le djihad et rejoindre les terroristes de Daech.
Kaïs Saïed répète tout le temps qu'il veut tourner la page des dix ans du régime islamistes et qu'il est hors de question de revenir en arrière. Or, l'ouverture de 64 nouvelles mosquées est de facto la poursuite de la même politique que celle des islamistes. Concrètement, les mosquées actuelles suffisent amplement à répondre aux besoins de la population. Il suffit de les fréquenter. Aucune, absolument aucune, ne fait le plein durant la semaine pour les cinq prières. Les gens préfèrent prier chez eux. Les mosquées sont donc souvent vides et on n'y compte que quelques fidèles dans chacune d'elles. Au maximum quelques dizaines de personnes. Seul le vendredi, pour le prêche hebdomadaire, les mosquées font le plein, parfois jusqu'au trottoir longeant l'édifice. Ce constat indéniable des mosquées vides est à lui seul suffisant pour que l'on cesse l'ouverture d'autres et pour consacrer l'argent de la construction à d'autres projets plus utiles pour la société. Il suffit que l'Etat oriente les donateurs et leur demande de réserver leur argent à la réfection et l'équipement d'une école ou d'un hôpital publics. Ce qu'il faut savoir, c'est que c'est l'Etat qui donne son feu vert pour la construction des mosquées et c'est toujours l'Etat qui gère, ensuite, les édifices religieux. C'est lui qui nomme et paie les imams et c'est lui qui paie les factures d'eau et d'électricité, parfois onéreuses, en raison du nombre de climatiseurs ouverts l'été et des ablutions des fidèles. Bon de rappeler cette fonction cachée des mosquées puisque certains « fidèles » y vont l'été pour une sieste dans la fraîcheur, le tout aux frais du contribuable.
En grosse difficulté pour boucler son budget, faisant face à des centaines de problèmes plus urgents touchant l'ensemble de la société, l'Etat doit fixer ses priorités, cesser les dépenses superflues et réfléchir à ce qui est vraiment utile pour les citoyens, tous les citoyens. Seuls les fidèles profitent de la mosquée et il n'y a aucune raison que le contribuable paie pour que ces fidèles aillent au paradis et gagnent des galons (ejr) auprès de Dieu. Une mosquée, c'est une source de dépenses pour l'Etat et une source d'inquiétude pour les sécuritaires quand on se rappelle leur utilisation à des fins terroristes et politiques. Avec 6129 lieux de culte déjà érigés et qui peinent à se faire remplir, la Tunisie n'a vraiment pas besoin de 64 mosquées supplémentaires.