Normalement, les projets de loi de finances et de budget économique seraient fin prêts puisque qu'ils doivent être déposés au Bureau de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) au plus tard le 15 octobre, c'est-à-dire à dire ce dimanche. On saura alors quelles sont les orientations économiques et budgétaires adoptés par le gouvernement pour le prochain exercice 2024 compte tenu du bilan, aussi provisoire soit-il, économiques et budgétaires de l'année en cours. Incidemment, le Fonds monétaire international (FMI) vient de publier ses « Perspectives économiques mondiales », à l'occasion de la tenue actuellement à Marrakech de ses Assemblées générales ainsi que celles de la Banque mondiale (BM). Concernant la Tunisie, le bilan macroéconomique de l'année 2023 qu'en fait le FMI semble mitigé. Certes, l'amélioration des finances publiques est notable ; que cela concerne le budget ou les paiements extérieurs. Le déficit budgétaire serait contenu à 5,9% du PIB en 2023 contre 7,3% en 2022. Il demeure tout de même important, loin de l'objectif 5,9% fixé initialement par la loi de finances. Certes, la balance des paiements courants va afficher un solde déficitaire en net recul par rapport l'année dernière : 5,8% du PIB contre 8,6 en 2022. Ce résultat dépasse même les prévisions établies par le Budget économique 2023 qui tablait sur un déficit de la balance courante équivalent à 8,2% du PIB. Même au niveau de l'inflation, le Fonds serait optimiste considérant que l'inflation ne dépassera pas les 8,5%. En glissement annuel elle affiche 9% en septembre 2023, selon les données de l'Institut national de statistique (INS). Cependant, la croissance ne sera pas au rendez-vous. Seulement 1,3%, estime le FMI contre des prévisions gouvernementales de 1,8% pour 2023. C'est d'ailleurs là où le bât blesse le plus car qui dit faible croissance dit ralentissement des ressources fiscales et donc un recours accru à l'endettement pour boucler le budget de l'Etat. Les ressources propres inscrites dans le budget 2023 devraient avoisiner les 46,4 milliards de dinars selon la loi de finances. Il ne faudrait escompter que 44,9 milliards, selon les calculs de l'institution multilatérale de financement. Autrement dit, il s'agira de s'endetter davantage. L'encours de la dette tunisienne atteindrait près de 124 milliards de dinars en 2023, soit près de 9 milliards de plus par rapport à l'encours affiché en 2022. Il convient de convenir que, rapporté au PIB, l'encours est en recul par rapport à 2022 : 77,8% contre 79,8%. Toutefois, on reste loin de l'objectif de 76,7% du PIB fixé initialement par les autorités du pays. Sur cette base, il apparait clairement que la dérive budgétaire n'est freinée qu'à coup d'endettement. Plus inquiétant encore, le taux d'investissement du pays afficherait cette année un recul significatif. Il atteindrait à peine 13% du PIB en 2023, d'après le Fonds contre environ 14% du PIB en 2022 et des prévisions tablant sur 16,5%. Cela serait-il dû à l'instabilité politique régnant dans le pays, comme le plaident certains ou dû à la politique monétaire de la BCT, comme le défendent d'autres ? Probablement les deux à la fois. Au vu de telles données, c'est la croissance économique future qui risque d'être hypothéquée. Or sans croissance boostée par l'investissement, il serait illusoire d'envisager objectivement une sortie de crise durable pour le pays. Le gouvernement d'Ahmed Hachani, contrairement à ses prédécesseurs engagera-t-il les réformes tant nécessaires pour dynamiser l'investissement en assainissant l'environnement des affaires d'un côté et réformant une partie au moins de sa politique de subvention particulièrement celle concernant l'énergie afin de dégager une marge budgétaire conséquente qui serait consacrée à l'investissement public. A cet égard, il est de ton de rappeler que 80% de la subvention de l'énergie bénéficie aux 20% des plus riches du pays que le pris du litre d'essence à la pompe en Tunisie est inférieur de près de moitié du prix moyen mondial. Que si le prix du litre d'essence est de 2,525 DT chez nous, il est de 4,773 DT au Maroc, 5,433 DT en Jordanie et de 2,751 DT au Liban ou encore de 4,462 DT en Côte d'Ivoire. Quant au prix de l'électricité destiné aux ménages, s'il affiche en moyenne 0,210 DT par Kwh en Tunisie alors que la moyenne mondiale se situe à 0,493 DT, le Maroc affiche un tarif à 0,361 DT le Kwh, la Jordanie à 0,285 DT, le Liban à 0,448 DT, la Turquie à 0,219 DT et la Côte d'Ivoire à 0,370 DT, selon les données fournies par le site Globalpetrolprices.com. La marge de manœuvre du gouvernement n'est-elle conséquente pour ajuster les prix de l'énergie et dégager une enveloppe budgétaire qui serait destinée à l'investissement dans l'infrastructure, l'éducation, la santé, la formation ou encore la culture est fournissant aux agents économiques de meilleures opportunités d'investissement qui dynamiserait la croissance et donc la création de richesses qui seraient équitablement partagées ? Le salut est là et pas ailleurs.