La rencontre entre Kaïs Saïed et le conseiller américain Mossad Boulos a été présentée comme le symbole d'un virage stratégique assumé : la Tunisie chercherait à élargir ses partenariats, au nom de la souveraineté. Mais derrière ce discours, se cache moins une stratégie économique qu'un repli idéologique. La « diversification » prônée par Saïed est d'abord politique, motivée par son isolement croissant face aux critiques de l'Occident sur ses dérives autoritaires. Contrairement à l'image véhiculée, la Chine — souvent citée comme alternative — a elle-même souligné le manque de réformes en Tunisie et soutenu un accord avec le FMI. Elle n'a aucun intérêt à investir massivement dans un pays instable sans garanties. Quant à la Russie, son économie est faible, sous sanctions, et plombée par une guerre. Elle n'a ni les moyens ni l'envie de relancer l'économie tunisienne.
L'Iran, enfin, n'a rien à offrir sur le plan économique. Son véritable "atout" est idéologique : exporter le chiisme politique. Ce rapprochement inquiète, car il pourrait semer des divisions dans un pays historiquement attaché à sa cohésion religieuse.
En réalité, ce basculement diplomatique ne sert pas les intérêts du peuple tunisien, mais ceux d'un régime en quête de légitimité et d'alliés complaisants. Utiliser le discours de souveraineté pour justifier des alliances avec des régimes autoritaires n'est ni pragmatique ni responsable.