Fiscalité, nouvelle loi sur les chèques, manque de liquidités… Tels sont les sujets abordés par Wissem Ben Omar, président de l'Union des petites et moyennes industries (UPMI), lors de son intervention lundi 22 septembre 2025 au micro de Wassim Ben Larbi dans l'émission Expresso sur Express FM. Il a dressé un constat inquiétant sur la situation des petites et moyennes entreprises (PME) en Tunisie, estimant qu'elles traversent une phase « difficile et alarmante ». Selon lui, les PME représentent 90 % du tissu entrepreneurial privé en Tunisie, emploient entre 60 % et 70 % des actifs du secteur privé et contribuent à hauteur de 50 % du produit intérieur brut (PIB). Pourtant, il a averti que « sans exagération, 50 % d'entre elles sont en difficulté et, si rien n'est fait d'ici un ou deux ans, elles disparaîtront ». Wissem Ben Omar a expliqué que les sociétés souffrent de plusieurs facteurs : une fiscalité de plus en plus pressante, un manque de liquidités et une baisse continue du chiffre d'affaires. Il a rappelé qu'en 2022, la baisse moyenne du chiffre d'affaires était de 34 %, puis de 31 % en 2023. En 2025, la majorité des entreprises signalent une chute de plus de 50 %, conséquence notamment de la nouvelle loi sur les chèques. Il a souligné qu'au-delà de sa fonction de moyen de paiement rapide, le chèque servait aussi, de fait, de mécanisme de financement. « Certes ce n'était pas son rôle, mais c'est un rôle qu'il jouait », a-t-il expliqué. Or, après l'adoption de la nouvelle loi, aucun dispositif équivalent – comme un fonds de garantie – n'est venu remplacer ce rôle, ce qui pénalise fortement les PME. Le président de l'UPMI a également dénoncé certaines taxes qui, selon lui, favorisent le marché parallèle. Il a cité plusieurs exemples : le droit de consommation sur les cosmétiques, qui rend les produits officiels plus chers et encourage le recours au marché informel avec les risques sanitaires que cela comporte ; certains biscuits, auparavant vendus en grandes quantités mais disparus du marché officiel car leur prix a doublé à cause de ce droit de consommation, privant par ailleurs l'Etat de recettes fiscales ; ou encore la TVA sur l'immobilier et les droits de consommation sur les matériaux de construction, qui ont provoqué une flambée des prix allant d'une fois et demie à deux fois, bloquant les ventes et empêchant de nombreux Tunisiens d'accéder à la propriété. Wissem Ben Omar a insisté : « On n'est pas contre l'imposition. L'Etat a besoin de ressources, chose avec laquelle nous sommes d'accord. Mais trop d'impôt tue l'impôt ! ». Il a regretté que l'on supprime progressivement les avantages accordés aux entreprises tout en leur imposant de nouvelles charges. Il a particulièrement critiqué le régime de la TVA appliquée aux services, estimant qu'il s'agit désormais « d'une taxation sur le chiffre d'affaires et non plus sur la valeur ajoutée », puisque les sociétés n'ont pas de TVA déductible. Pour améliorer la situation, le président de l'UPMI a formulé plusieurs recommandations : retour au dégrèvement fiscal pour encourager l'investissement, octroi d'avantages et de crédits d'impôt, paiement de la TVA à l'encaissement et non à la facturation, baisse de la TVA sur les services et réduction des coûts pour lutter efficacement contre le marché parallèle. Il a ajouté que « souvent, les sociétés ne peuvent pas payer et non pas ne veulent pas payer leurs impôts ». Tout en reconnaissant la gravité de la situation, il a nuancé son propos : « Il faut dire que la situation n'est pas si dramatique que ça. Mais si on poursuit cette politique, ça va devenir très grave. Il y a encore une marge de manœuvre, il ne faut pas rater le coche ». Selon lui, il faut adopter une approche « gagnant-gagnant » : « L'Etat nous aide un peu pour qu'on l'aide beaucoup ». Il a donné l'exemple d'une suppression ou d'une baisse des droits de consommation sur certains produits : cela permettrait aux entreprises de vendre et produire davantage, tout en générant plus de recettes fiscales pour l'Etat et en rendant les produits plus abordables pour le citoyen. Enfin, M. Ben Omar a rappelé qu'en 2016, un pas positif avait été franchi, permettant à de nombreuses entreprises d'intégrer le marché officiel. Il a plaidé pour une amélioration des infrastructures et une simplification des procédures administratives, afin que les PME puissent se concentrer sur leur cœur de métier. « Au lieu de perdre du temps pour se connecter sur la plateforme de la retenue à la source ou de la déclaration mensuelle, il faut faciliter la vie aux entreprises », a-t-il conclu.