Des embouteillages, des voitures dans tous les sens, des piétons se faufilant entres les tas d'acier en plein milieu des rues, des nuages de fumée des moteurs qui ronflent, des coups de klaxon répétitifs et dissonants, des cris, des injures, voici à quoi ressemble la circulation dans nos villes, notamment aux heures de pointe. Tout le monde est concerné et tout le monde se plaint. Le ministère du Transport, se veut rassurant. Abdelkarim Harouni, ministre du Transport a pris part à la cellule de communication du 19 avril 2012, dans une démonstration des réalisations du ministère, de ses projets et de sa politique. Commençant par une projection d'un reportage récapitulant les activités du ministre, l'intervention de M. Harouni se rapprochait plus d'un discours politique que d'une intervention informative. En effet, le ministre a commencé par une description des «legs» de l'ancien régime et de l'état du secteur à son arrivée au ministère, mettant en évidence la dégradation de la situation. Le ministre a affirmé qu'à cause des insuffisances dont souffrait le secteur, «celui-ci était devenu une proie facile pour la mafia de Ben Ali». Un secteur affaibli malgré les compétences dont regorgeait son administration. A l'instar de la quasi-totalité des ministres en poste, l'argument de la situation catastrophique qui a précédé leur ascension, a été ressorti et mis en évidence. A ce sujet, M. Harouni a déclaré que 23 dossiers de corrompus ont été transférés à la commission d'investigation sur la corruption et les malversations, 9 dossiers transférés au procureur de la République, en attendant d'établir l'assainissement de tout le secteur. « Nous les atteindrons et les dénoncerons, un par un ! » a-t-il ajouté en substance. Vantant le mérite de ses collaborateurs, le ministre a annoncé le lancement d'un projet de restructuration, lequel projet sera prêt à la fin du mois de juin courant. Ce projet se basera sur une consultation de toutes les parties concernées afin d'établir un diagnostic de la situation du secteur et de planifier sa restructuration globale. Ceci étant, le service de communication du ministère a soigneusement préparé un dossier de presse volumineux de 69 pages, dans lequel, sont énumérées, une par une, les mesures et les objectifs. De nombreux projets et dossiers ont été évoqués par le ministre, tels que le transport scolaire et universitaire, le transport rural et citadin et le développement du transport en commun.A ce titre, il a annoncé, entre autres, un projet de train métropolitain à Sfax, le développement d'un réseau de métro, Réseau Ferroviaire Rapide (RFR) de cinq lignes à Tunis et l'acquisition de 683 nouveaux bus. Ces métros et bus, seraient-ils en mesure de favoriser le transport en commun qui a reculé loin derrière le transport individuel? Le fameux projet de «voitures populaires» a en effet inondé les routes et rues, avec une augmentation accrue du parc automobile, sans que l'infrastructure routière ne suive le rythme, pour en arriver à l'asphyxie des villes. Il va donc falloir généraliser et faciliter le transport en commun, et ceci passe forcément par une collaboration avec le ministère de l'Equipement qui assumera le développement des réseaux routier et ferroviaire. Par ailleurs, le ministre a annoncé l'acquisition du nouveau-né de la marine, le navire «Tanit», dont le coût est de 357 millions de dinars, avec une capacité d'accueil de 3200 voyageurs et 1060 voitures. Il faut tout de même rappeler que la signature de cette transaction d'achat remonte à juillet 2010 et que seule la réception du bateau «Tanit» est prévue pour la fin du mois de mai 2012. Quant aux deux avions présidentiels Airbus 340-500 et Boeing BBJ, ayant été mis au service de l'ancien président Ben Ali, M. Harouni a affirmé que le ministère cherche à revendre ces deux appareils afin de récupérer l'argent du contribuable. Néanmoins, M. Harouni a précisé, maintes fois que le ministère veille à ce que les présidents de la Troïca «puissent bénéficier de conditions honorables et décentes lors de leurs déplacements et voyages». Une précision qui pourrait suggérer le renoncement à la vente d'un de ces deux avions ou bien alors cela pourrait signifier l'intention d'acquérir un nouvel avion présidentiel. On en saura plus dans les jours qui viennent. Traitant du sujet des blessés et martyrs de la révolution, M. Harouni a affirmé avoir signé personnellement 4048 cartes de transport gratuit pour les blessés et les familles des martyrs, déjà en cours de distribution à leurs ayant-droit. Pour ce qui est du secteur des taxis et des «louages», M. Harouni a déclaré que c'était l'anarchie totale avec des autorisations octroyées indûment. Il a affirmé que plusieurs autorisations seront retirées et réattribuées à ceux qui les méritent. Evoquant le différend entre Tunisair et la nouvelle compagnie aérienne Syphax Airlines, le ministre a rappelé que Tunisair fait face actuellement à de grandes difficultés et que «ses employés travaillent nuit et jour afin de s'en sortir». Il a ajouté : «tout ce qui peut nuire à Tunisair, nous le refusons». Il a tout de même affirmé avoir encouragé l'initiative privée de Syphax Airlines en lui octroyant la licence de transport aérien des voyageurs, et d'étudier les manuels techniques afin de délivrer l'attestation «AOC» pour le démarrage de ses vols. De son côté, le ministre invite ses responsables à discuter du problème au sein du ministère, afin de trouver des solutions. Alors que Mohamed Frikha, promoteur du projet a affirmé aux médias avoir accompli toutes les formalités et avoir obtenu toutes les autorisations nécessaires. Mais que Tunisair bloque son projet et les autorités ne se prononcent toujours pas. Dans le même contexte, M. Harouni a déploré que certains, qu'il qualifie d'ennemis de la révolution, aient profité de ce litige afin de l'amplifier et de lui conférer une dimension régionaliste, juste pour semer la discorde entre les citoyens.Des déclarations contradictoires, qui ajoutent à l'ambiguïté de la question.