Ils nous ont fâchés par leurs actes manqués, ils nous ont étonnés par leurs prises de position, ils nous ont fait badiner par leurs expressions et déclarations hors pair, ils nous ont déçus par leur égarement du bon sens et leur fichue compassion, ils nous ont aberré par leur solennelle audace, ils nous ont flanqué la honte par leur manque de savoir-vivre, et ils se sont gravé, à l'eau-forte, dans notre mémoire pour l'éternité ! Ils… ce sont nos chers ministres du gouvernement provisoire, qui mettent tellement le pied dans le plat que nous sommes tentés de les considérer comme étant des gaffeurs intentionnels. Et pour la fin de l'année 2012, nous nous sommes fait le plaisir de vous offrir un bêtiser des ministres, quoi qu'il serait mieux de dire un best of du bêtiser, c'est que le réservoir est joliment plein. Voici alors une sélection ministérielle pour se fendre la pêche et clore l'année dans la bonne humeur . Hamadi Jebali, chef du gouvernement A la réserve de son rictus figé que certains pourraient trouver « séduisant », Hamadi Jebali s'est distingué par ses célèbres boulettes en langue française. Il faut dire qu'il l'a tristement massacrée à en faire retourner Molière et Baudelaire dans leur tombe. Une expression est devenue, spécialement, une référence au point d'en inventer plein d'autres, avec tout le génie des Tunisiens en la matière. Un nouveau lexique à part entière. « Le capital couard » (le rass elmel est jaben), un propos qu'il a eu le « malheur » de glisser au cours d'une interview sur la chaîne de télévision française TV5 Monde. Oui, sur une chaîne étrangère qui plus est française, le monde de la francophonie a été témoin de la gaffe monumentale de notre chef du gouvernement. Mais où diable est-il allé chercher pareille expression à nous faire rougir de honte devant la communauté internationale ? En tout cas, cela lui a valu des mois de moquerie et un flot d'expressions de cette nature portant la marque de fabrique « Jebali ». Certes, nous ne pouvons lister l'intégralité des bourdes de notre chef du gouvernement, hélas, l'espace ne nous le permet pas, d'autant plus que nous devons réserver aux autres ministres leur dû. Qu'à cela ne tienne, nous nous remémorons, encore, la gaffe du « 6éme calife ». Rappelez-vous, cela s'est passé dans un théâtre de plein air de Sousse, lors d'un gigantesque meeting qui a rassemblé les leaders du parti islamiste Ennahdha. Hamadi Jebali et Samir Dilou (ministre des Droits de l'Homme et de la justice transitionnelle et porte-parole du gouvernement) étaient de la partie, en vedette. La déclaration de M. Jebali est on ne peut plus claire à ce sujet : «il s'agit là d'un moment divin, dans un nouvel Etat, dans un 6ème Califat, Inchallah.» Bien entendu, et sans surprise, notre cher Iznogod (tel qu'il a été caricaturé), s'est expliqué à propos de cette auto-proclamation : « l'extrait en question qui a été sorti de son contexte de manière à lui donner une signification qui a provoqué une ambiguïté dans le sens de la phrase ». Mais oui bien sûr, nous ne l'avons pas vue venir celle-là,« sorti du contexte », le joker ultime des membres de notre gouvernement comme pour dire « oups j'ai vraiment gaffé là ! » Rafik Abdessalem : ministre des Affaires étrangères Chef de la diplomatie tunisienne et gendre du leader du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi, Rafik Abdessalem est, par excellence, le comique du gouvernement. Un peu trop vilain ? Oui, mais en toute franchise, nous lui devons un véritable recueil de boulettes à nous faire rire à gorges déployées, que le terme serait bien approprié. Commençons par la toute récente : « …dans l'un des Etats des Seychelles ». Voulant raccorder avec le « s » du pluriel, Rafik Abdessalem a cru, tout bonnement, juste qu'il existe plusieurs Etats en un seul. Pas tout à fait faux comme théorie, après tout, comment, lui ministre des Affaires Etrangères, pouvait-il savoir que le « s » des Seychelles n'est qu'accessoire ? Passons. Une autre de bonne, bien bonne même. A l'époque, la tragédie des immigrés clandestins tunisiens faisait les « Une » des médias, plus d'une cinquantaine de jeunes ayant été portés disparus, lorsque M. Abdessalem se devait de faire une déclaration aux médias. Son mot est passé à la télévision nationale en direct, en voici l'essence ou plutôt la bêtise du jour : « nous déplorons dans cette affaire, deux cadavres que nous avons trouvé en mer, malheureusement, en état de décès» C'est que notre ministre des Affaires Etrangères a tout de même le don de nous faire tordre de rire en beau milieu d'une tragédie nationale. Nous serions, tout de même, injustes si on dit que ce gouvernement n'œuvre pas pour le bien du peuple, sachant à ce titre, qu'au moment de ce drame, 25 mariages ont été célébrés aux frais de la princesse, la princesse ici étant le gouvernement. Le chef de la diplomatie à qui, soit dit en passant, on doit la célèbre citation : « ce gouvernement est le plus fort de toute l'histoire du pays », fort en gaffes, oui sans l'ombre d'un doute, nous a pondu des plus belles du genre : Moncef Marzouki, président de la république se penche sur Rafik Abdessalem pour le saluer alors qu'il est assis confortablement dans son siège. Et puis son geste de dormir à même le sol au Centre des expositions du Kram lors du Congrès d'Ennahdha. Sihem Badi : ministre de la Femme Bien inspirée par les œuvres désopilantes de ses camarades du gouvernement, Sihem Badi emprunte ainsi la même vague pour nous émerveiller par des affaires sans queue ni tête. A l'affiche : l'affaire de la campagne publicitaire d'une marque de fromage dont le slogan est « Tahli ejben ». Selon madame la ministre, ce dernier est communément utilisé par les consommateurs de drogue pour faire référence au manque. Allons madame la ministre, soyons sérieux ! Il n'est plus de préoccupants tracas au département des affaires de la Femme pour que pareil intérêt sournois soit accordé à une simple compagne publicitaire ? Ce qui étonne encore plus dans ce gouvernement, pour le moins, atypique, c'est que ses membres ne désempilent pas de la bêtise. Bien que massivement critiqués, ils poursuivent sur leur lancée dans la course à qui fait le plus de gaffes. La photo de Sihem Badi avec les chaussures de Leila Trabelsi à l'expo-vente des biens confisqués en est une preuve incontestable. Slim Ben Hmidène : ministre des Domaines de l'Etat En véritable et fidèle CPRiste, Slim Ben Hmidène est à l'image de ce parti dont le président même est traité par son propre peuple de « tartour » (pour ainsi dire qu'il ne sert à rien). Ce ministre a déniché une nouvelle méthode-une méthode de génie- pour se renseigner à propos de ses adversaires politiques, en allant puiser les infos sur Facebook, le réseau social préféré des Tunisiens. Et c'est lors d'un débat télévisé, que le ministre a fait montre de ses performances facebookiennes en appuyant ses propos par des informations qu'il a trouvées sur Facebook. Mauvaise pioche monsieur le ministre. Ne vous a-t-on pas appris au sein de votre parti et avant de vous préparer au poste très en vue que celui que vous occupez que l'on ne se renseigne pas formellement sur les réseaux sociaux? Satanée ambition politique qui fait dévier ses porteurs de l'objectivité bien essentielle! Nous aurions aimé nous étaler davantage sur le bêtisier du gouvernement pour l'année de « travail » qui vient de s'écouler, seulement voilà, par souci d'ennui, nous nous contentons de ces quelques perles qui ne manquent, cependant, pas d'amuser la galerie. Nous saluons, par ailleurs et au passage, Samir Dilou, ministre des Droits de l'Homme dont le surnom « Nafissatou Dilou » témoigne de ses multiples démentis dans une tentative de rattraper les coups foireux du gouvernement, Houcine Jaziri, secrétaire d'Etat chargé de l'immigration qui, en tant que « homme d'Etat », est capable d'affirmer que des serviettes de bain ont été volées à l'hôtel où résidaient des membres de Nidaa Tounes, et Abdelwaheb Maâter, ministre de l'Emploi qui a affirmé que l'emploi ne fait justement pas partie des prérogatives de son ministère. Un rappeur français d'origine tunisienne, du nom de Tunisiano, avait chanté un jour "la France est une farce et on s'est fait trahir", une rime qui nous rappelle quasi-religieusement le ressenti général à propos de notre gouvernement. Nous avons perdu, certainement, avec ce gouvernement, et nous perdrons, probablement encore, au regard de son incompétence indéniable, mais s'il existe une chose que nous ne perdrons pas avec ce gouvernement, c'est bien le sourire. Allez sans rancune et bonnes fêtes !