Le premier Centre d'orientation et de reconversion professionnelle (CORP) en Tunisie a été officiellement lancé, mercredi 11 mars 2015, par la Chambre tuniso-allemande de l'industrie et du commerce (AHK) en coopération avec la GIZ (Coopération allemande), en présence du ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi Zied Laâdhari, de l'ambassadeur d'Allemagne en Tunisie Andreas Reinicke, du DG de la AHK Martin Henklmann, du chef de projet Fonds Emploi de la GIZ Hildegard Vogelmann. Dans son intervention, M. Reinicke a voulu mettre le projet dans son contexte politique. Il s'agit d'un projet soutenu par le gouvernement allemand en collaboration et sur la demande du gouvernement tunisien. «Je ne vous cache pas que dans les années 2005, 2006 et 2007, l'Allemagne avait pris la décision de réduire ou arrêter sa coopération avec la Tunisie pour une simple raison. On n'avait pas l'impression qu'il y avait un impact sur la volonté profonde pour se transformer et changer certaines choses : on avait l'impression que c'était du temps et de l'argent perdus», avoue l'ambassadeur, avant d'ajouter : «puis, il ya eu la révolution. On a senti un nouvel esprit et après une visite du ministre allemand des Affaires étrangères de l'époque en Tunisie, le gouvernement allemand a décidé de faire marche arrière : un demi-tour dans le vrai sens du mot. L'Allemagne a donc augmenté sa contribution annuelle en la multipliant par 6 à 7 fois, son portefeuille passant de 30 à 40 millions d'euros d'engagements par an à 200 à 250 millions d'euros par an actuellement». Andreas Reinicke a indiqué que «l'engagement financier total de l'Allemagne est actuellement (en prenant en considération les projets en cours et les lignes de crédit à très bas taux d'intérêt) est de plus d'1 milliard d'euros qui sont à la disposition de la Tunisie». Il ne s'agit pas là des seuls fonds octroyés au pays puisque le président américain avait annoncé récemment un soutien américain de 1 milliard de dollars sur les 3 années qui suivent outre le financement accordé par la Banque européenne et la banque mondiale, a-t-il rappelé. «Ce n'est pas l'argent qui manque, l'argent est là… Ce qui manque ce sont des projets concrets et des propositions concrètes car ces fonds ne sont pas destinés à financer le budget de l'Etat mais des projets qui seront accompagnés par des experts de leur planification jusqu'à leur réalisation», a précisé M. Reinicke soulignant qu'«il faut donc proposer des projets».
Pour sa part, Zied Laâdhari a soutenu que CORP met le doigt sur la problématique qui préoccupe tout le monde en Tunisie, celle de l'épineuse question d'inadéquation entre offre et demande d'emploi. «Nous avons une main d'œuvre sur le marché de l'emploi mais qui ne correspond pas dans une large mesure aux besoins du marché du travail parce qu'il y a un problème structurel du modèle de développement économique qui ne peut plus faire face à la demande, à l'évolution de la réalité du marché du travail et notamment à l'arrivée massive tous les ans de dizaines de milliers de diplômés du supérieur alors que le modèle économique de la Tunisie est basé sur une main d'œuvre bon marché et une économie à faible valeur ajoutée» a-t-il expliqué., ajoutant «il ya une transformation radicale de l'économie à faire et entre temps on ne peut pas rester les bras croisés, il faut travailler sur les niches où il ya des demandes réelles dans le secteur privé et sur le marché du travail».
Le CORP est le fruit de la coopération tuniso-allemande dans le domaine de l'emploi. Il vise à créer la première plateforme en Tunisie dont l'objectif est de rapprocher les qualifications des jeunes chercheurs d'emploi aux besoins exprimés par les entreprises sur le marché du travail. Il met à disposition des conseillers formés spécialement pour cette mission selon des programmes importés de plusieurs pays tels que l'Allemagne et adaptés à la réalité du marché tunisien. Face à la conjoncture actuelle du marché de l'emploi en Tunisie, un nombre important de chercheurs d'emploi ont un diplôme qui ne leur permet pas de trouver un emploi à cause de la saturation de leur secteur. D'un autre côté, de nombreux métiers émergent en Tunisie et les entreprises peinent à trouver les personnes adéquates. L'idée est donc de proposer aux chercheurs d'emploi de se reconvertir vers ces nouveaux métiers. Les formations de reconversion suivent le modèle allemand de l'alternance, avec une semaine de cours et deux semaines au sein de l'entreprise afin de permettre une acclimatation et l'ancrage du sentiment d'appartenance de l'employé pour sa nouvelle société. De ce fait, la reconversion professionnelle s'impose parmi les alternatives sérieuses dans la lutte contre le chômage en Tunisie. Cette approche efficace et participative représente l'atout majeur du centre géré par l'AHK, en partenariat avec le Fonds Emploi de la GIZ (Coopération internationale allemande mandatée par le ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du développement «BMZ»).
Le centre CORP garantit la dignité des employés et le droit des employeurs et ce à travers une charte qui comprend les notions indispensables du travail tel que le salaire minimum, le travail décent, le respect des valeurs de l'entreprise… Le centre CORP adopte un processus performant qui garantit l'embauche en passant par un ensemble d'étapes interconnectées du dépôt du CV aux entretiens avec les conseillers jusqu'à la proposition du poste, l'accompagnement lors du stage entreprise avant de signer le contrat d'embauche. Du côté de l'entreprise, le centre CORP garantit, pour tout descriptif de poste, une «short list» des 5 meilleurs profils correspondant au besoin annoncé. Chaque candidat bénéficie automatiquement d'une formation en «Soft Skill» (comportement au sein de l'entreprise) afin de lui faire apprendre les principes clés de la culture d'entreprise, avant tout entretien.
Le CORP s'installera à Tunis mais couvrira les demandes relatives à l'ensemble de la Tunisie. Il travaille avec l'ensemble du tissu économique tunisien désirant collaborer sans limitation des métiers cibles. C'est clairement une nouvelle vision de l'emploi qui s'installe en Tunisie.