Classée au 95èmerang mondial dans le rapport de Davos sur la compétitivité, la Tunisie stagne ! Avec un score de 3,92 sur 7, le pays a, cette année, été devancé par le Kenya et surpasse le Bangladesh, de peu. Dix années après la crise financière mondiale qui toucha de plein fouet l'économie occidentale, le sort de l'économie tunisienne reste incertain. On est très loin de la prospérité enregistrée dans de petits pays comme la Suisse qui s'est amplement adaptée à la nouvelle donne. Une conférence a été organisée par l'IACE aujourd'hui même, 27 septembre 2017, pour revenir sur ce rapport publié le même jour. Au moyen de questionnaires, le Forum Economique Mondial (World Economic Forum), fondation dont le siège est à Genève, évalue chaque année les facteurs de productivité et de prospérité de 137 pays et offre ainsi un classement de la compétitivité dans le monde. Cet indice, calculé à partir des 12 piliers de la compétitivité, permet de connaitre l'état de santé des sociétés et économies des pays sujet de l'étude. Les douze piliers, base du questionnaire sont : l'état de l'infrastructure, des institutions, de la santé et de l'éducation primaire, de l'enseignement supérieur et la formation, de l'environnement macroéconomique, de l'efficacité du marché des biens et du marché du travail, du développement du marché financier, de la maturité technologique, de la taille du marché, de la sophistication des affaires et enfin de l'innovation. Depuis 2013, la Tunisie a ainsi cédé 12 places sur le classement. Un recul considérable qui place aujourd'hui le pays à la troisième place des pays du Maghreb, loin derrière le Maroc (71ème) et l'Algérie (87ème) et juste devant la Mauritanie. D'après le rapport, cette « débâcle », la Tunisie la doit à l'inefficacité de sa bureaucratie gouvernementale, à la corruption qui sévit dans le pays, à l'instabilité politique et gouvernementale et aux restrictions des règlementations de travail.
Du point de vue de l'environnement macroéconomique et des affaires, le pays a perdu 10 places. Les experts ont, sur ce point, pointé la difficulté d'accès aux crédits et le manque d'inclusion. L'Etat des institutions s'est également détérioré entrainant le blocage des reformes. Ceci impacte de manière directe les investissements, qu'ils soient intérieurs ou extérieurs. « Les gouvernements qui se sont succédé, voulant réaliser un fort consensus, ont fini par bloquer l'avancement du pays » explique Mejdi Hassen, porte-parole de l'institut. « Nous sommes aujourd'hui dans l'obligation de réformer l'administration qui doit piloter les réformes » a-t-il ajouté. L'augmentation vertigineuse des taxes, la faible capacité à innover et l'inadéquation du système éducatif avec le marché du travail sont également considérés comme les facteurs les plus problématiques de l'équation. Après la présentation du rapport, Klaus Schwab, fondateur et président exécutif du Forum économique mondial, a affirmé que : « La concurrence mondiale sera de plus en plus définie par la capacité d'innovation de chaque pays. La reconnaissance des talents d'un point de vue ressources humaines prendra le pas sur le capital financier et le monde passera ainsi de l'ère du capitalisme à celle du talentisme. Les pays qui se préparent à la Quatrième Révolution Industrielle et qui renforcent simultanément leurs systèmes politiques, économiques et sociaux seront les grands gagnants de la course à la compétitivité de demain ». Le concept de quatrième révolution industrielle dont parle M. Schwab, correspond en quelque sorte à la numérisation des usines. Ainsi les unités de production deviendront intelligentes (smart factories). À travers le recours à l'internet des objets et aux systèmes cyber-physiques, c'est-à-dire aux réseaux virtuels servant à contrôler des objets physiques, l'usine intelligente se caractérise par une communication continue et instantanée entre les différents outils et postes de travail intégrés dans les chaînes de production et d'approvisionnement. L'utilisation de capteurs communicants apporte à l'outil de production une capacité d'autodiagnostic et permet ainsi son contrôle à distance tout comme sa meilleure intégration dans le système productif global. Avec ce nouveau modèle industriel, la production, à la fois à grande échelle et personnalisée, devient possible.
D'un point de vue technologique, le « rapport Davos » souligne qu'en l'espace d'une année, la Tunisie a perdu 10 places pour ce qui est de la bande passante (internet), pour atteindre la 87ème place mondiale. Le transfert technologique effectué par les investissements étrangers (IDE) a lui aussi nettement reculé, tout comme le niveau d'adoption des technologies par les compagnies qui a fait perdre au pays 5 places. Entre les années 2010 et 2011, la Tunisie était classée 32ème dans le « ranking » global de Davos, aujourd'hui et pour la deuxième année consécutive la 95ème place lui est attribuée. Comme une locomotive à l'arrêt, tellement la friction entre roues et la voie ferrée est importante, l'économie tunisienne ne bougera pas sans une volonté politique forte. Ce mercredi à la maison de l'entreprise, les experts présents n'ont pas manqué de faire leurs recommandations pour sortir de l'impasse. Selon eux, la reprise n'arrivera pas sans un débat national pour la productivité et la flexi-sécurité. Sans rattraper le « gap » qui s'est créé en matière d'infrastructure, sans un assainissement des finances publiques et sans une vraie politique industrielle et de développement des filiaires, le pays restera à l'arrêt car jusque-là et en l'espace de 7ans, 63 rangs ont été cédés au sous-développement. Place maintenant à la recommandation la plus « cocasse » qui nous est faite par le « World Economic Forum ». Plus de communication via les réseaux sociaux (Facebook), permettra l'engagement de la population dans des politiques publiques efficaces.