Plus qu'une simple formalité, le match de demain contre le Maroc devrait servir de repère pour la sélection en prévision des prochaines épreuves... Le football n'est jamais avare de coups de théâtre. Il peut mener plus loin qu'on ne l'aurait jamais pensé, voire imaginé. La Tunisie est qualifiée pour la CAN avant même de disputer son dernier match des éliminatoires de demain. En s'imposant face à la Libye, la sélection marocaine a non seulement assuré sa qualification, mais elle a aussi rendu service à l'équipe de Tunisie qui profite de cette victoire pour se retrouver avant terme dans la liste des sélections ayant assuré leur place au Rwanda. Cette qualification ne devrait pas pour autant éloigner les hommes de Kasperczak de leur objectif initial, encore moins les déconcentrer. L'exigence de battre, demain, le Maroc tient toujours le haut du pavé. Ce n'est pas aussi contraignant qu'on pouvait le penser, mais, ici et là, et même en l'absence de motivation pour le résultat, des certitudes subsistent. Des certitudes de toujours, qui impriment des obligations aussi bien dans le comportement des joueurs sur le terrain que dans le rendement de l'équipe de façon générale. On juge, certes, des résultats. Et du jeu. Mais osons quand même le dire : du jeu avant les résultats. On l'a souvent dit et on ne cessera jamais de le répéter: les priorités de l'équipe de Tunisie devront se situer dans la recherche d'une harmonie efficiente, d'une unité de pensée et d'action encore efficace. Dans la version actuelle de l'équipe de Tunisie et à travers ce qu'elle a laissé entrevoir dans ses dernières sorties, le jeu, l'attraction, mais aussi l'efficacité ont oublié de se mettre en vitrine. Il ne s'agit nullement d'un concours de circonstances. Le jeu, la créativité furent longtemps une soustraction dans le mode d'emploi de la sélection. Indiscutablement, elle donne encore l'impression de ne pas avoir acquis la fermeté du système, les articulations du rythme. Forcément, elle a encore davantage de chemin à parcourir qu'on ne pouvait le supposer. Il faut dire cependant que la réussite d'une équipe n'est pas nécessairement soumise à la dictature des résultats. Faire et défaire les choses, tel est le sort de l'équipe de Tunisie. Tel est le grand enjeu de son parcours, même au quotidien. Même dans les matches sans obligation de résultat. Ici et là, cela ne peut être que la même noblesse. On a beau dire que le progrès est fortement lié aux résultats, que les victoires sont le seul critère valable pour juger une équipe. Il y en a qui pensent, nous espérons que Kaspeczak en fera partie, que le progrès ne réside aussi dans les réformes techniques et dans la révolution des esprits. On l'aura certainement deviné: la chose peut-être à éviter de faire est d'essayer de comparer la sélection d'aujourd'hui à celle d'hier. Il y a des évolutions importantes dues à l'émergence d'une nouvelle génération, belle d'esprit, un peu mondaine et suffisamment prête à la relève. Des joueurs qui connaissent parfaitement l'odeur des vestiaires. On y gagne plus qu'on y perd... Le rôle du sélectionneur ne peut être que décisif et déterminant dans ce genre d'entreprise. Alors, sur le terrain, comme dans les vestiaires, dans les choix techniques, comme dans les discours de meneur d'hommes qu'il est censé être, il devrait insister pour que l'équipe prenne de la hauteur indépendamment de l'enjeu. La sélection est entrée aujourd'hui dans une phase de transition où l'objectif consiste à saisir le sens de la rupture comme condition essentielle à l'émergence d'un nouveau mode de gestion. Pareille approche suppose de comprendre le sens du changement au regard des nouvelles contraintes et obligations. Mais en tenant compte aussi de nouvelles révélations. Certains joueurs ne manquent pas de faire parler d'eux. Ils montent tellement en puissance que leur place au sein de l'équipe est devenue, aujourd'hui, évidente. Surtout pour relayer ceux qui n'ont rien prouvé jusque-là. Pas certainement encore loin, mais est-ce une raison pour ne pas y penser ? Autant qu'il est permis au club de grandir, autant on devrait comprendre qu'un autre monde devrait naître. Autant dire que la sélection est aujourd'hui dans ses temps de passage destinés à mettre fin à la confusion, à l'absence de réflexion et à l'échec de gouvernance. Il devrait faire amende honorable, auprès de son public et sur la scène sportive. S'il est difficile de savoir jusqu'où elle peut aller, il n'en demeure pas moins qu'elle est appelée à en finir avec les démons du passé. En prévision des prochaines échéances, le programme d'action est clair. Si une épreuve se prépare tactiquement et se gère souvent par la réflexion, elle se gagne aussi par le goût du risque et le panache. La sélection est amenée par conséquent à exprimer, ou à penser, à des choses qu'elle n'osait pas auparavant. Elle ne peut plus accepter de se résigner à être moyenne, ni un peu mieux que mauvaise, dans une zone de confort, vivant à se complaire et satisfaite d'échapper au sort des plus mauvais. La vérité de demain se nourrit forcément des erreurs du passé. Plus encore: les défis et les épreuves ne sont pas seulement gagnés par les plus forts, ou les plus avertis, mais par ceux qui n'abandonnent jamais...