Entre les préoccupations du peuple qui voit toujours ses demandes repoussées aux calendes grecques et son élite politique, on est au bord de la rupture. Nos politiciens poursuivent leurs querelles, oubliant l'essentiel : faire redémarrer la machine de production Une semaine qui s'écoule avec les affaires qu'elle a charriées sur son passage, dont notamment l'enlisement de Nida Tounès dans une crise le menaçant d'implosion et l'initiative de Yacine Brahim qui consulte une banque étrangère et lui demande d'élaborer notre plan de développement pour les cinq ans à venir La semaine que nous venons de vivre aura été celle de tous les paradoxes, de l'incompréhension, des déclarations contradictoires, des opérations ratées et des débats ronronnants ne faisant que consolider auprès de l'opinion publique l'idée qu'on fait du surplace et que la machine administrative, économique et politique peine toujours à démarrer. Les faits sont là : le ministre du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale confie à une banque étrangère la mission d'élaborer le plan de développement 2016-2020 sans avoir l'aval du chef du gouvernement ni même l'en avoir informé, Nida Tounès, le parti qui a gagné les législatives et la présidentielle et qui vit sa plus grave crise le menaçant d'implosion au point que ses responsables se parlent maintenant à travers huissiers de justice, le parti de l'Union patriotique libre qui négocie avec le président de la République son maintien au sein de la coalition gouvernementale, le ministre des Finances qui annonce l'hypothèque du stade de Radès pour boucler le budget de l'Etat 2016 et son homologue chargé des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières qui le désavoue publiquement en déclarant qu'il n'en sera jamais question, le ministre des Domaines de l'Etat subit lui aussi le même sort en voyant un membre de la commission nationale de confiscation des biens spoliés le contredire et assurer que ces biens ne seront pas vendus, le ministre des Affaires religieuses qui répète à qui veut l'entendre que le sulfureux imam Ridha Jaouadi ne remettra plus les pieds à la mosquée Lakhmi à Sfax et le juge d'instruction en charge de l'affaire qui le relâche et décide de le poursuivre en état de liberté pour une simple affaire de non-respect des procédures relatives à l'ouverture d'un compte bancaire au nom de l'association qu'il préside, un groupe de députés nidaistes qui accuse le président du Parlement et président de leur parti d'exploiter les locaux du palais du Bardo pour tenir des réunions avec les nidaistes partisans des thèses du clan auquel il appartient et ce n'est pas tout dans la mesure où on est désormais certain d'assister quotidiennement à une surprise, à un clash, à une phrase assassine qui provoque la réaction des uns et des autres ou à un non-événement qu'on amplifie pour en faire un sujet qu'on dissèque à satiété sur les réseaux sociaux accaparant l'attention et retenant l'intérêt des facebookeurs qui font désormais la pluie et le beau temps sur leurs ordinateurs et autres tablettes. Un silence incompréhensible Sauf que dans la marée générale, Ennahdha s'est distingué par son silence étrange face à l'ensemble des problématiques qui ont secoué l'opinion publique, à l'exception de l'affaire du limogeage de l'imam Ridha Jaouadi. Il s'est trouvé que pratiquement, tous les responsables nahdhaouis, à commencer par le président du parti, Rached Ghannouchi, ont dénoncé la décision prise par cheikh Othmane Battikh, ministre des Affaires religieuses, estimant qu'elle est contraire à la loi en vigueur et qu'elle est en contradiction avec la volonté des citoyens de la ville qui tiennent à leur imam bien-aimé. Quant aux autres affaires, le parti de Montplaisir adopte une attitude conciliante ou light, évitant d'attiser les tensions comme dans l'affaire des désignations des délégués, l'avis rendu par la commission de Venise à propos du projet de loi présidentiel sur la réconciliation économique et financière (il paraît, selon certaines indiscrétions, qu'Ennahdha a fait comprendre à Sihem Ben Sédrine, présidente de l'Instance vérité et dignité, que son escalade avec la présidence de la République n'est pas à la longue productive) ou les négociations salariales dans le secteur privé qui traînent à cause de l'attachement de l'Ugtt et de l'Utica à leurs positions initiales au point que les syndicalistes menacent d'observer une grève générale au cas où la rencontre prévue demain lundi 2 novembre n'aboutirait à rien de concret. De leur côté, les responsables d'Ennahdha multiplient les déclarations selon lesquelles leur parti soutient toujours le gouvernement Essid et considèrent que l'étape impose davantage de cohésion et de solidarité au sein de la coalition gouvernementale. Sur le plan purement partisan, ils concentrent leur attention sur les préparatifs de leur futur congrès dont la date n'est pas encore fixée. Pour le moment, tout ce que l'on sait sur ce congrès c'est qu'il ne se tiendra pas en 2015. Permettra-t-il de trancher entre la dimension politique et la dimension prédication, Ghannouchi va-t-il postuler à un nouveau mandat à la tête du parti ou cédera-t-il le témoin aux jeunes responsables? Personne n'est en mesure de répondre pour le moment à ces questions et les nahdhaouis attendront 2016 (Féthi Ayadi, président du Conseil de la choura, vient de déclarer que le congrès aura lieu l'année prochaine sans préciser à quelle date) pour voir où la barque de leur parti sera menée. Mais l'on se demande comment sera animée la semaine politique qui démarre demain? Une seule certitude : la commission parlementaire de législation générale a remis sa copie au bureau de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) concernant le réexamen de la loi organique portant création du Conseil supérieur de la magistrature, conformément aux modifications demandées par l'Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des lois. Idem pour le projet de loi relatif à la création de la Cour constitutionnelle, remis lui aussi au bureau de la chambre, sauf qu'on ne sait pas encore quand le bureau (qui n'est pas encore formé pour le compte de la nouvelle législature) n'a pas annoncé jusqu'ici la date de la soumission des deux projets de loi (CSM et Cour constitutionnelle) à la séance plénière.