Fin des travaux, hier, de la première session exceptionnelle de formation sécuritaire et militaire organisée par l'Institut de défense nationale au profit des rédacteurs en chef des médias nationaux (presse écrite, électronique et audiovisuelle). Objectif : faire connaître les trois armées et contribuer à la diffusion d'une culture militaire et sécuritaire au sein de la profession. C'est une première aussi bien pour l'institution militaire que pour les hommes et femmes de médias, mais elle ne sera pas la dernière. D'autres sessions de formation sont prévues par l'Institut de défense nationale afin d'en faire bénéficier le maximum de journalistes dans le but de consacrer l'ouverture de l'institution militaire sur son environnement, instaurer une tradition d'échanges avec les médias et permettre l'émergence d'une culture militaire et sécuritaire au sein de la profession, et partant de l'opinion publique. C'est, en effet, une première, historique, pour la grande muette qui, en sortant de son silence et de son confinement dans les casernes pour communiquer avec les médias, s'inscrit dans le sillage du processus démocratique et consacre un des principes de la constitution de 2014, à savoir l'accès à l'information, militaire et sécuritaire de surcroît. Connaître l'institution militaire Ils étaient 27 rédacteurs et rédactrices en chef à répondre présent à l'invitation du prestigieux Institut de la défense nationale. L'institution a comme tradition d'organiser des sessions de formation — une par an — pour les hauts cadres de l'administration tunisienne (2/3 civils, 1/3 militaires) dans l'intention de leur inculquer une culture militaire et sécuritaire, nécessaire aux décideurs pour la prise des décisions adéquates au moment opportun. Pour cette première session destinée aux médias, l'objectif répondait à un besoin d'établir un contact direct et officiel entre les officiers supérieurs de l'armée tunisienne et le quatrième pouvoir dans un cadre académique prestigieux et de lui faire connaître l'institution militaire sous tous ses angles. Ainsi, au terme de cinq séances matinales, étalées sur deux semaines, qui ont toutes débordé sur les après-midi et suscité d'interminables débats, un voile lourd et opaque a été levé sur l'armée tunisienne. Des conférences de haute facture ont été données par les généraux des trois armées (terre, mer et air) donnant un large aperçu sur leur organisation, sur la formation académique et militaire, la logistique de guerre, les nouvelles acquisitions, les missions, y compris celles relevant des Nations unies, les difficultés et le manque de moyens ainsi que les efforts, importants, consentis surtout dans la guerre contre le terrorisme par les trois armées, mobilisées sur tous les fronts. Les renseignements militaires également étaient présents : une opportunité inestimable pour, déjà, mettre un visage sur cette boîte noire inaccessible, puis pour saisir la complexité du travail et des missions de ceux qui veillent, 24h/24 et 7 jours/7, à la protection des frontières et à la préservation de la sécurité nationale contre toutes sortes de menaces, particulièrement contre le terrorisme depuis 2011. Contre-discours et neutralité La cérémonie de clôture s'est déroulée, hier, dans un cadre officiel et solennel en présence du ministre de la Défense nationale, des membres du Conseil supérieur des armées, ainsi que du chef de cabinet du ministre de la Défense. Au cours de cette cérémonie, M. Farhat Horchani a souligné l'importance capitale du rôle des médias dans la guerre contre le terrorisme, soulignant la nécessité de mettre en avant l'intérêt supérieur du pays face à l'ennemi. Pour ce faire, le travail journalistique doit répondre à des critères d'objectivité, de professionnalisme et de spécialisation et développer un contre-discours à celui des terroristes. En d'autres termes, « scoop » oui, mais pas aux dépens de la sécurité nationale. Tout l'enjeu est là, de même que la difficile équation, non encore résolue, qui préoccupe aussi bien les dirigeants politiques et les responsables des forces armées que les médias, à savoir la nécessité de trouver un arbitrage entre le besoin de transparence et de liberté d'expression et la confidentialité des informations militaires, un arbitrage qui conviendrait à toutes les parties. Mais difficile à trouver. D'autres l'appellent neutralité, patriotisme, objectivité, voire boycott des opérations terroristes pour ne pas tomber dans la propagande et l'apologie, même involontaire, du terrorisme. En somme, adopter un comportement qui pousse le journaliste à s'interroger sur l'utilité publique de divulguer telle ou telle information et donc de faire preuve de retenue face à la dangerosité de l'information qui peut satisfaire la curiosité de l'ennemi — le terroriste ou le planificateur de l'attentat terroriste — et servir ses intérêts. Sonnette d'alarme A l'évidence, l'institution militaire est sortie de son silence légendaire pour tirer la sonnette d'alarme et alerter l'opinion contre l'impact négatif et dangereux de la course derrière le scoop, le buzz, l'audimat, le vedettariat pour un certain nombre d'experts de la 25e heure. Ils seraient nombreux et dangereux pour la sécurité nationale. Des dérapages médiatiques dans la couverture d'opérations terroristes, il y en a bien eu, nul ne peut le nier, et cela a pu porter préjudice au travail acharné et continu des forces armées mobilisées sur le champ de bataille et entravé certaines de leurs missions, notamment secrètes. En tentant de manier la carte de la communication, l'armée nationale a démontré sa détermination à être une armée républicaine, une armée qui compte d'abord sur son dévouement à la patrie et sur la confiance du peuple tunisien placée en chacun de ses soldats, avant l'armement et les équipements de pointe, pour gagner la guerre contre le terrorisme et le pari du développement.