Par M'hamed JAIBI Alors que l'initiative privée se fait rare et que l'investissement tarde à redémarrer, certains comportements hérités de l'étatisme et du centralisme refont surface ou perdurent comme l'indice irréfutable d'un fonctionnement ancestral auquel l'Etat providence légué par le socialisme des années 60 s'attache avec entêtement. La République construit des parkings Prenons, ces jours-ci, cette histoire de parkings dont le chef du gouvernement a «lancé la construction». Est-ce vraiment conforme aux ambitions du pays, cinq ans après la révolution et 47 ans après la fin des coopératives autoritaires, que ce soit en Conseil ministériel et à l'initiative du gouvernement de la République que l'on décide de construire des projets dont nos espaces urbains ont le plus terriblement besoin : des parkings. Des projets simples et rentables qui devraient être accessibles à toutes les initiatives. Et le plus pittoresque c'est que l'on veille toujours à faire précéder ces annonces miraculeuses censées sauver l'humanité par une préparation psychologique et sociologique prenant la forme d'une orchestration politique et médiatique vieille comme la Tunisie et digne de l'époque de l'Atce. Une campagne politique et médiatique La campagne en question, cette fois-ci, s'est abattue sur les aires de parking non clôturées et les gardiens non déclarés qui les «gèrent», dont certains ont même été sommairement jugés et mis en prison. Sachant que nombre d'entre eux s'appliquaient à «se rendre utiles» et servaient volontiers de relais aux autorités locales et même aux renseignements. C'est à la suite de cette campagne tonitruante qu'a été annoncé le lancement de l'appel d'offres relatif à la réalisation des 10 nouveaux parkings à Tunis. Dans des zones de la ville où sévissent, à ce jour, les grues héritées de la «famille» et les sabots généreusement revalorisés à hauteur de 15 dinars. Dix diplômés du supérieur promus chefs d'entreprise La décision a été rendue publique suite à un entretien, vendredi à La Kasbah, ayant groupé le Premier ministre et le ministre de l'Equipement, de l'Habitat et de l'Aménagement du territoire. Et le chef du gouvernement de déclarer que l'édification de ces parkings à étages «vise à éviter la prolifération des parkings anarchiques». Ce qu'il fallait démontrer. Le clou c'est lorsque l'on annonce que «ces projets seront réalisés par des entreprises privées dirigées par 10 diplômés du supérieur». Dix parmi les 300.000 actuellement au chômage. Dix qui, suite à la décision du gouvernement de la République, vont créer des entreprises qui remporteront (nous le savons déjà) le fameux appel d'offres. Et qui seront rentables et prospères. Grâce à l'omniprésence et à l'interventionnisme de l'Etat. L'initiative vraiment individuelle Peut-on, dans ces conditions, appeler crédiblement les Tunisiens à compter sur eux-mêmes, à développer l'épargne des ménages, à promouvoir l'investissement privé et à développer l'initiative individuelle ? Sûrement pas ! Des politiques qui sont convaincus qu'un privé pris au hasard ne peut, de sa propre initiative, édifier un parking dont rêvent pourtant des centaines de milliers d'automobilistes, sont-ils capables de relancer l'investissement, l'économie, le développement et l'emploi ? Peut-être bien s'ils décident de rompre avec la «tradition». Celle de s'en remettre aux décisions régaliennes et de faire en sorte que l'Etat occupe tout l'espace, avec des législations et un fonctionnement qui défavorisent et découragent l'initiative, lorsqu'ils ne sont pas dissuasifs voire répressifs à l'égard des audacieux. Vivement les grandes réformes ! Et d'abord, une approche nouvelle.