Lors d'une journée parlementaire organisée à l'ARP, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Marouan Abbasi, a appelé à l'adoption d'un changement radical du système administratif tunisien qui entrave les investissements. Abassi a recommandé aux parlementaires d'accélérer l'approbation des projets de loi soumis par le gouvernement, notamment le code de change, la loi sur l'inclusion financière et la loi sur l'investissement, estimant que ces textes juridiques sont à même de changer radicalement la réalité de l'investissement et de libérer l'initiative dans le pays. Il a appelé, également, à identifier des solutions pour surmonter les problèmes économiques, critiquant un certain nombre d'experts qui se contentent de présenter un diagnostic de la situation économique, sans proposer des solutions ou des mécanismes pouvant aider à s'en sortir. La journée parlementaire se tient au moment où l'indépendance de la BCT est sujette à polémique et des appels à la révision du statut de l'institut d'émission se son multipliés, pour financer directement l'Etat, sans recourir aux banques commerciales.» Il est important de restaurer la confiance dans l'Etat et la confiance dans l'économie nationale, tout en apportant un changement profond et radical dans l'administration tunisienne », a-t-il préconisé, réitérant l'impératif de libérer l'initiative et l'investissement. Les projets d'énergies renouvelables accusent un retard couteux Et d'ajouter que « la Tunisie peut réaliser de belles performances économiques, vu qu'elle dispose de grandes opportunités pour réussir sa relance économique». Abassi a également évoqué, à cette occasion, la chute de la valeur des obligations tunisiennes de 130% en 2010 à près de 60% actuellement, ce qui reflète, d'après lui, les craintes des investisseurs et des bailleurs de fonds étrangers de l'économie tunisienne, et le manque de visibilité politique et économique. Le gouverneur a également évoqué la chute du taux d'investissement de 24% à 16% et celui de l'épargne de 21,3% à 8,7% entre 2010 et 2023, outre la baisse de la production et des exportations de phosphate, malgré l'énorme potentiel dont dispose le secteur minier du pays. Il a pointé du doigt l'aggravation du déficit commercial et du déficit budgétaire, ce qui a affecté les taux d'inflation et le taux de change du dinar. Abassi a fortement critiqué le retard de réalisation des projets d'énergies renouvelables, notamment ceux relatifs à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables, soulignant la difficulté de réaliser l'objectif de 30% de renouvelable à l'horizon 2030. Selon lui, il aurait été possible de produire l'électricité à bas prix ne dépassant pas 70 millimes/ kilowatt, alors que la Tunisie l'importe actuellement à 400 millimes/ kilowatt. Abassi défend la politique monétaire de la BCT Le gouverneur a défendu la politique monétaire visant à maîtriser l'inflation, faisant remarquer que l'augmentation du taux directeur engendrant une hausse des taux d'intérêt sur le marché monétaire avait notamment pour objectif de contenir les tensions inflationnistes qui auraient atteint des niveaux de loin plus élevés, si cette mesure n'avait pas été prise. Il a considéré que le l'augmentation du taux directeur n'a pas dissuadé les investisseurs qui sont plutôt sensibles à la situation de stagnation économique et à l'absence de vision économique. Le gouverneur a évoqué les efforts déployés pour préserver la stabilité du cours du dinar au cours des quatre dernières années. Le recours au financement direct de l'Etat était conjoncturel et limité S'agissant de l'indépendance de la Banque centrale, il a affirmé qu'il s'agit d'un faux problème, assurant que la BCT cordonne quotidiennement et étroitement avec le ministère des Finances sur toutes les questions financières. Il a indiqué que la décision de prêter directement à l'Etat dépend de l'approbation du Conseil d'administration, du Comité de la politique monétaire et du comité de refinancement de la BCT. Il a rappelé que l'interdiction de financer directement l'Etat par la BCT n'est pas nouvelle et n'a pas été instaurée par la loi n° 2016-35 du 25 avril 2016, portant fixation du statut de la Banque centrale, mais qu'elle remonte à 2006 avec la loi n° 2006-26 du 15 mai 2006, modifiant et complétant la loi n° 58-90 du 19 septembre 1958 relative à la création et à l'organisation de la BCT. « Même avant 2006, le recours au financement direct de l'Etat par la Banque centrale était conjoncturel et limité en temps et en volume », a-t-il aussi rappelé. Et d'ajouter que « l'article 25 de la loi n° 2016-35 du 25 avril 2016 portant fixation du statut de la Banque centrale qui interdit le financement direct de l'Etat par la BCT n'est que la continuité de la loi de 2006 ». Créée le 19 septembre 1958, la Banque centrale de Tunisie est un établissement public doté de la personnalité civile et de l'autonomie financière. Elle agit en qualité de conseiller financier du gouvernement et veille à assurer la stabilité des prix.