En l'absence de structures professionnelles garantissant des recettes fixes, les responsables des clubs font du porte-à-porte, tout en gérant au quotidien le malaise des retards des salaires. «Le fond du problème, c'est la professionnalisation du football tunisien qui n'a jamais été instruite sur des bases solides. Personnellement, je suis contre, pour la simple et bonne raison que tous les problèmes financiers des clubs ont commencé le jour où le football tunisien est passé professionnel. Car le professionnalisme a ses propres règles, notamment en ce qui concerne le financement. Or, nous sommes entrés dans l'ère du professionnalisme sans savoir comment générer des recettes, ce qui a créé un déséquilibre financier. La masse salariale des joueurs et des entraîneurs ne va pas de pair avec les moyens réels des clubs. Au fait, l'émolument minimum d'un entraîneur en Ligue 1 s'élève à 12.000 dinars. Aujourd'hui, tous les clubs tunisiens, à l'exception d'une ou de deux grosses cylindrées dont les présidents sont les principaux pourvoyeurs, connaissent de sérieuses difficultés financières, car ils n'arrivent pas à gérer la courbe ascendante des salaires des footballeurs. A l'ASM, les salaires sont plutôt raisonnables. N'empêche, la masse salariale reste énorme», selon Hatem Zbidi, premier vice-président à l'ASM. Les sponsors moins généreux... L'une des causes du problème, d'après notre invité, «est la relation entre le club et les sponsors qui s'est dégradée ces dernières années. Crise économique oblige. Avant la crise, les sponsors étaient plutôt généreux. Nos relations avec eux étaient privilégiées et reposaient sur un partenariat sportif. Avec la crise qui s'est installée, les responsables des clubs font les mendiants pour payer les salaires des joueurs qui avoisinent les 200.000 dinars dans le meilleur des cas. Nous sommes contraints de faire les mendiants alors que nous sommes bénévoles. Or, nous gérons des footballeurs professionnels avec lesquels nous avons des relations d'employeur-employés. Nous sommes donc dans l'obligation de les payer et nous sommes censés leur demander des comptes en échange. D'ailleurs, les lois sportives permettent aux footballeurs de partir en joueurs libres en cas de retard de trois mois de salaires. Tout le paradoxe est là. Des clubs aux statuts amateurs qui gèrent des footballeurs professionnels! A La Marsa, nous avons eu un seul cas de protestation. C'était le mois dernier. Le capitaine d'équipe est venu nous voir pour nous informer qu'il y a un appel à la grève. Le problème a été résolu à temps et la grève n'a pas eu lieu finalement. Mais ce n'est que partie remise. Il y a une semaine, les salaires du mois d'août ont été honorés. N'empêche, le problème financier est devenu récurent avec la crise. Les subventions de l'Etat ne dépassent pas les 250 mille dinars annuellement. Un montant dérisoire par rapport aux besoins réels du club. De plus, elles sont échelonnées. De leur côté, les joueurs bien payés entre salaires et primes doivent avoir un comportement de professionnels en acceptant les retards d'un mois, voire deux, tant que les statuts des clubs n'ont pas changé. Tant que les clubs ne sont pas devenus des sociétés sportives, ou toute autre forme de club professionnels, la situation restera catastrophique. En attendant, nous continuons à gérer comme nous pouvons les affaires de notre club. Nous essayons de satisfaire les joueurs qui ont des besoins spécifiques urgents et de travailler beaucoup sur la communication avec eux pour assainir l'ambiance. Car faute d'argent, ils n'arrivent pas se concentrer suffisamment pour faire convenablement leur travail le jour du match. Bref, un problème récurrent qui est en train de faire fuir le plus passionné des dirigeants sportifs. Les responsables sportifs bénévoles, c'est une race en voie de disparition à cause de l'insoutenable situation financière», conclut Hatem Zbidi.