TOKYO (Reuters) — Le Japon a libéré hier le capitaine d'un bateau de pêche chinois dont l'arrestation est à l'origine d'une crise diplomatique avec Pékin, rapporte l'agence Kyodo. L'agence avait annoncé un peu plus tôt que le capitaine regagnerait la Chine dans le courant de la journée. Lors d'une conférence de presse à Naha, une ville de l'île d'Okinawa, un des procureurs chargés de l'affaire avait admis hier que cette décision reflétait le souci des autorités nippones de ne pas nuire aux relations avec la Chine. "C'est un fait, la possibilité a existé que les relations entre le Japon et la Chine se dégradent, il y a eu des signes en ce sens", a souligné le secrétaire général du gouvernement, Yoshito Sengoku. "Nos liens sont importants et les deux parties doivent travailler à améliorer leurs relations stratégiques et mutuellement bénéfiques", a-t-il ajouté. Le chalutier chinois était entré en collision avec deux patrouilleurs des gardes-côtes japonais près d'îlots revendiqués par les deux premières puissances d'Asie en mer de Chine orientale — l'archipel des Diaoyu pour Pékin, les îles Senkaku pour Tokyo. "Le gouvernement chinois va saluer ce développement", estime Liu Jiangyong, expert des relations sino-japonaises à l'université Tsinghua de Pékin. "Cela devrait être un tournant, un pas symbolique qui va alléger les tensions qui se sont fait jour entre la Chine et le Japon, mais la question de fond, celle des revendications sur les îles Diaoyu, ne sera pas réglée à court terme." A Pékin, le ministère chinois des Affaires étrangères a annoncé l'envoi d'un avion au Japon pour en ramener le capitaine et a affirmé que toute procédure judiciaire contre ce dernier serait "illégale et sans valeur". Les autorités chinoises avaient multiplié les déclarations hostiles depuis l'arrestation du capitaine, demeuré en détention alors que les 14 autres membres de l'équipage avaient pu rentrer en Chine le 13 septembre. Quelques heures avant l'annonce du parquet japonais, on avait appris l'arrestation en Chine de quatre ressortissants japonais soupçonnés d'avoir pénétré illégalement dans une zone réservée et d'y avoir filmé des objectifs militaires. Les quatre seraient employés d'une entreprise japonaise de travaux publics, Fujita. Une porte-parole de l'entreprise a dit qu'ils étaient en Chine avec un employé chinois dans le cadre d'un projet de récupération d'armes chimiques abandonnées en Chine par l'armée japonaise à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le ministre japonais du Commerce enquête, par ailleurs, sur l'arrêt d'exportations chinoises de métaux rares, des composés utilisés dans de nombreuses industries, sur la base d'informations fournies par des entreprises japonaises. Un responsable chinois a démenti l'existence d'un embargo qui aurait été décidé, selon le New York Times, en représailles à l'arrestation du capitaine du chalutier. Le ministre japonais du Commerce, Akihiro Ohata, a confirmé qu'il n'y avait pas d'interdiction officielle mais a ajouté que ses services continuaient d'enquêter. Les relations sino-japonaises se sont améliorées après une première moitié de la décennie compliquée, mais cette affaire montre la fragilité des rapports entre Pékin et Tokyo. Les motifs de fâcherie ne manquent pas, entre les querelles territoriales, les rancœurs nées de l'occupation japonaise en Chine et la bataille pour la domination économique régionale. L'économie japonaise, déjà en difficulté, dépend de plus en plus de sa voisine. Depuis 2009, la Chine est le plus important partenaire commercial du Japon. Au premier semestre 2010, les échanges entre les deux pays ont encore bondi de 34,5% par rapport à l'année précédente.