Le Festival d'été de Kraten est un événement incontournable du calendrier culturel des îles de Kerkennah. Cet été, les habitants de l'île et les visiteurs ont encore une fois vibré au rythme de la musique. L'île de Kerkennah a vécu au rythme du Festival de Kraten qui a accueilli de nombreux visiteurs dans un cadre exceptionnel, propice au divertissement et à la détente. Un public nombreux a répondu présent à la première soirée assurée par la troupe folklorique de l'île qui était à la hauteur des attentes. Un spectacle complet où la musique et les jeux carnavalesques ont été prévus. Un spectacle complet Tendresse, sensibilité, ambiguïté douce-amère sont les ingrédients de cette soirée riche en émotions qui nous a plongé dans une ambiance sonore captivante. Chantant en arabe littéraire ou en dialecte kerkennien, les artistes ont révisité le patrimoine musical kerkennien. Marquée par une musicalité pleine de tact et d'élégance, leur interprétation a mis en valeur la poésie des airs populaires de l'île. Le public a pu profiter de la musique jusqu'au petit matin. Place ensuite à un périple à travers les sites historiques de Kerkennah qui a mené les visiteurs à l'île de Rammadiya. A neuf heures, de petites embarcations se sont engagées dans le chenal du port commercial de Kraten, pour une traversée magnifique. Ramzi, la trentaine, est parmi ceux qui ont préféré une sortie en solitaire sur leur barque. Son bateau de pêche fut parmi la vingtaine de bateaux qui ont quitté le port de Kraten à Kerkennah à destination de l'île de Rammadiya. Décor féérique On compte plus de vingt petites embarcations au bord desquelles se sont installées des familles entières : grands, petits, adolescents et vieux qui ont quitté le port dans une grande liesse en chantant et dansant. Parlant de cette traversée, le jeune homme nous précise que c'est un précieux moment de partage. « Les familles sont comblées par cette sortie de rêve. C'est un autre univers qui se crée, un monde extraordinaire qui envahit l'intérieur de l'être et l'emmène dans un voyage fantastique qui change son regard sur la vie, sur la réalité », explique le jeune homme. Au programme : une visite de Rammadiya. Au milieu de l'île au décor féérique, s'offre à la vue, en l'occurrence «Bordj Mellita» ou Borj «Dzira». C'est un fort défensif dont la base est romaine. Il est évidement impensable de faire le tour du circuit de l'archipel kerkennien sans visiter également le monastère de Saint-Fulgence qui fait partie du circuit touristique inclus dans le programme du festival. Ce dernier a été dressé presque au centre de l'îlot de Rammadiya, à l'est du port de Kraten. Ce monument remonte au VIe siècle avant Jésus-Christ. Outre les traces de baptistères qui y sont visibles, on peut y observer un four de poterie punique réutilisé à l'époque contemporaine pour la production de la chaux. Pour boucler le circuit, une escapade conduit les visiteurs du côté du port d'El Ataya dont la production des nasses de pêche et des « chraffies », pêcheries traditionnelles, est l'une des principales spécificités de ce village. Pêche ancestrale... La pêche ancestrale « dammassa » figure parmi les traditions de l'archipel. Au cours de cette sortie, de nombreux pêcheurs, le visage buriné par un soleil de plomb et les mains durcies par la manipulation des filets, partent en groupe, avec leur ‘félouques' pour pratiquer cet art qui ressemble à un véritable ballet. Tout commence par le palmier. Les feuilles du palmier sont coupées puis rassemblées sur les flots pour former des V. Elles sont alignées pour tracer un chemin dans la mer. Avec les courants d'eau, ces chemins marins vont guider les poissons jusqu'aux cages. Ils seront par la suite ramassés par les pêcheurs. Cette pêche permet de rapporter entre cinq et quinze kg de poisson, principalement du mulet, mais aussi du poulpe selon les saisons. Au programme figurent aussi des dégustations de plats kerkenniens, ainsi qu' une exposition de divers produits traditionnels. Il est évident que l'interaction entre l'artiste et l'environnement a porté ses fruits aujourd'hui, puisque la plage de cette île a été transformée en musée d'art de plein air; tant que les artistes ont apporté au paysage une note singulièrement esthétique. Les ateliers de sculpture à la maison des jeunes de Kraten, de peinture de diverses techniques (huile sur toile, acrylique, aquarelle) se poursuivent au grand bonheur des artistes, venus des divers coins du monde pour exposer leurs expériences et leurs talents artistiques et présenter leurs points de vue sur la vie à travers leurs tableaux de peinture. Les enfants ont eux aussi leur part dans la programmation. On leur a consacré, tout au long du mois d'août, des ateliers d'apprentissage artistique et des spectacles au bord de la mer. Des lacunes à combler ! Selon le responsable du Festival de Kraten, Ridha Souissi, « ce festival constitue une occasion de faire découvrir la culture kerkenienne dans ses multiples aspects. C' est une destination touristique par excellence ». Il a annoncé également lors d'une table ronde que «ce festival a conservé sa particularité, ses racines . La programmation répond aux besoins socio-culturels de la région et aux attentes de ses habitants. Il s'agit de faire en sorte que ce festival devienne un rendez-vous divertissant et attrayant pour tous les citoyens, jeunes et moins jeunes, afin qu'ils puissent trouver leur part de bonheur ». Il s'agit également de tirer profit de cet événement pour sensibiliser les habitants sur la menace qui pèse sur les principales ressources de l'île. « L'état de l'infrastructure est déplorable, a relevé un des jeunes organisateurs. Nous avons lancé à travers ce festival un appel aux autorités pour remédier à la situation », confirme-t-il. Et d'ajouter, avec un ton maussade, «qu'il faut rationaliser l'exploitation des ressources halieutiques et que chacun doit fournir un effort dans le but de protéger l'environnement et l'écosystème de l'île», a conclu notre interlocuteur.