Hassen Amri (Nida Tounès) : «Le gouvernement d'union nationale est à l'origine de l'amélioration du climat des affaires» Le discours du chef du gouvernement était ponctué de bons messages d'espoir, et sans espoir nous ne pouvons pas vivre. Il est vrai qu'il a donné des promesses très ambitieuses, mais rappelez-vous, il y a un an, il a donné des promesses et beaucoup n'y ont pas cru. Aujourd'hui, plusieurs indicateurs sont passés au vert et nous pouvons le voir sur le terrain, parce qu'il y avait de la volonté. Il ne fait aucun doute que c'est le gouvernement d'union nationale qui est à l'origine de l'amélioration du climat des affaires en Tunisie, notamment à travers la réussite des défis sécuritaires. Certes, il faut du temps pour atteindre les objectifs fixés par le gouvernement et le chef du gouvernement l'a bien dit : il ambitionne d'arriver à redresser la situation d'ici 2020. Il ne faut pas oublier que la situation régionale est délicate, que le terrorisme et la contrebande constituent encore un frein au développement. C'est d'ailleurs pour cette raison que les changements à la tête des ministères de l'Intérieur et de la Défense devraient permettre d'aller plus de l'avant dans la lutte contre le grand banditisme. Tout le monde sait que M. Lotfi Brahem incarne, sur le terrain, la lutte contre le terrorisme et la contrebande. Ammar Amroussia (Front populaire) : «Ce ne sera pas le dernier remaniement» Qu'y a-t-il de nouveau dans le gouvernement à qui on nous demande de faire confiance ? C'est le 10e gouvernement depuis 2011. Nous ne pouvons pas lui accorder notre confiance. C'est un gouvernement de complaisance, de contentement, plombé par d'anciennes figures. C'est un gouvernement provocateur. La politique qu'il suivra est une politique qui va à l'encontre des intérêts du peuple tunisien. Et celui-ci se prépare déjà à la révolte. La marmite est en train de chauffer tout doucement. Je suis certain que ce ne sera pas le dernier remaniement. C'est une introduction à un prochain remaniement, car il y a une bataille entre La Kasbah et la présidence de la République et Montplaisir réalise ses objectifs sur leur dos. Et puis ces personnes ne peuvent absolument rien faire, ce sont de simples agents du Fonds monétaire international. Les indicateurs que Youssef Chahed prétend qu'ils sont passés au vert sont fallacieux. Les vrais indicateurs sont ceux du pouvoir d'achat, du chômage, de la corruption, de la disparité entre les régions. Voilà les vrais indicateurs. Ces gens n'entendent que leurs propres voix, ils croient qu'ils incarnent la Tunisie dans sa profondeur, alors que d'autres gens sont en train de se préparer pour demander leurs droits et nous espérons qu'ils le feront de manière pacifique. Lilia Younes Ksibi (Afek Tounès) : «Beaucoup de beaux mots, mais l'action reste limitée» Déjà de par le nombre, ce gouvernement ne reflète pas l'idée d'un gouvernement de guerre qui doit être restreint pour pouvoir travailler en bonne coordination. Comme d'habitude, beaucoup de beaux mots, mais l'action reste limitée. Sur les ministres choisis, il y a beaucoup à dire, ce n'est pas ce que nous attendions. Maintenant, oui, ces ministres peuvent relever les défis s'il y a une vraie stratégie. Nous ne sommes plus au niveau du diagnostic et des promesses, il faut passer à l'action. Il faut fixer des objectifs clairs à court terme. L'instabilité gouvernementale actuelle ne permet pas aux ministres de travailler dans la sérénité. A chaque fois qu'il y a un changement, on affaiblit encore plus l'Etat et on donne encore plus de chance à l'administration profonde de se renforcer. Nous allons bien évidemment voter la confiance au gouvernement parce que justement nous avons besoin de stabilité. Nous restons toutefois sceptiques, nous allons continuer de critiquer pour construire. Rester à l'extérieur ne nous permettra pas d'avancer. Maintenant, je crois que nos ministres, notamment la ministre de la Santé, a fait du bon boulot, y a-t-il eu une vraie évaluation du travail de chacun, comme le dit le chef du gouvernement ? Je me pose la question. Autre chose, pour que le gouvernement réussisse, il faut l'adhésion des organisations nationales. Sont-elles en train d'aider à la réforme ou au contraire en train de la bloquer, là encore, je me pose la question. Nous croyons en les capacités de Youssef Chahed, maintenant, nous lui réclamons encore plus. Abderraouf El May (Machrou Tounès) : «Nous ne voterons pas pour Adel Jarbouîi» Si certains indicateurs se sont améliorés, il est tout à fait logique que les conséquences sur le plan de la création d'emploi ne vont pas être immédiates. La baisse du chômage viendra graduellement. Le chef du gouvernement a fixé l'objectif de la baisse du chômage de 3% à l'horizon de 2020, et là c'est un objectif tout à fait réalisable. Il n'y a que les investissements directs qui améliorent par la même occasion la situation financière de l'Etat et créent de l'emploi, ce qui engendre une augmentation de la consommation interne, bénéfique à l'économie. J'espère que d'ici 2020 nous pourrons y arriver. Pour le taux de 5% de croissance moyen promis par le chef du gouvernement, je crois qu'il faut se fixer des objectifs. C'est possible oui, mais c'est tributaire du retour de l'investissement. Je vois mal Youssef Chahed sortir le chiffre de 5% sans avoir les moyens de ses ambitions. Par ailleurs, au niveau des Tunisiens résidant à l'étranger, nous sommes en train de rater le coche, et c'est dommage. Nous avons cantonné les Tunisiens à l'étranger au ministère des Affaires sociales ! Mais ce ne sont pas des cas sociaux, ce sont une richesse. Certains sont même des centres de décision à l'étranger. Nous n'allons pas voter pour le poste de secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires sociales en charge de l'Immigration et des Tunisiens à l'étranger. Noureddine B'hiri (Ennahdha) : «Ce n'est pas un chèque en blanc» C'est un gouvernement du minimum national sur lequel se sont mis d'accord les partis politiques. Aucun gouvernement ne peut recueillir une adhésion totale. Il est tout à fait normal que le président de la République — tout comme les partis et le chef du gouvernement — ait eu son mot à dire dans la composition du gouvernement. Sur la question du retour des ministres de l'ancien régime, cela ne nous inquiète pas, ils sont déjà de retour depuis un bout de temps. Certains ne s'indignent de leur présence que si ça n'arrange pas leurs affaires. Cette question a été tranchée dès l'époque de l'Assemblée constituante lorsque le projet de loi d'exclusion des hommes de l'ancien régime a été rejeté. Nous avons choisi d'aller vers la justice transitionnelle et pas vers les procès collectifs. Certes, nous accordons notre confiance à ce gouvernement mais ce n'est en aucun cas un chèque en blanc. Notre confiance est liée au degré de respect de chaque ministre de la constitution, de la révolution et du Document de Carthage. Ce gouvernement fait face à plusieurs défis politiques dont la tenue des élections municipales. Les blocs parlementaires doivent prendre leur responsabilité afin d'accélérer le remplacement des démissionnaires de l'Isie. Tout retard dans les élections municipales engendrera un retard des élections présidentielle et législatives. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le président de l'Isie par intérim. Ensuite, il faudra aussi relever un autre défi, celui de voter le budget de l'Etat.