Il était à peine âgé de trente ans quand il avait entamé sa carrière d'entraîneur de football en 2000. Il était aux commandes de l'équipe sudiste, de l'ASJerba. Et depuis, il s'est frayé un chemin très prometteur puisqu'à chaque fois qu'il est «missionné» à la tête d'un club en difficulté, il s'avère réellement l'homme de la situation. Les deux derniers clubs qu'il vient de sortir du pétrin sont la JSKairouanaise et le CAB. C'est de Jalel Kadri qu'il s'agit. Propos. Quelle alchimie employez-vous pour réussir là où plusieurs entraîneurs échouent avant vous à la tête de clubs qui se trouvent dans de beaux draps ? Je ne vais pas vous dire que le travail et le sérieux sont les secrets de la réussite dans tous les domaines. Ceci est une évidence qui ne nécessite pas d'être rappelée à chaque fois. Mais, en plus de cela, personnellement, je mets toujours l'accent sur le volet de la psychologie que je considère comme un élément clé pour redonner aux joueurs le goût et la motivation impératifs pour le surpassement de soi. Avec la JSK comme avec le CAB, j'ai eu affaire à des joueurs blasés et démotivés en raison de la mauvaise situation financière de leurs clubs et du retard déconcertant de versement de leurs salaires. Sans leur mentir, j'essaie de les convaincre de recouvrer leur enthousiasme et de faire quelque chose pour leurs couleurs tout en pensant à se mettre individuellement et collectivement en valeur pour une bonne progression de leur carrière. Souvent ça marche et c'est tant mieux ! «Des réformes profondes s'imposent» Est-ce qu'on comprend que le classement d'un club dans le tableau de la compétition traduit sa situation financière ? Tout à fait ! Prenez par exemple les deux derniers clubs dont je me suis occupé : la JSK et le CAB. Pour tous les spécialistes, ils sont de vrais viviers qui regorgent toujours de jeunes talents à revendre. Et paradoxalement, ils jouent tout le temps ou presque pour la survie et le maintien en raison de la modicité de leurs ressources. Pour mieux vous dépeindre leur situation, supposons que le CAB ou la JSK aient un président comme Hamdi Meddeb pour un bon bail. Est-ce qu'ils auront la moindre difficulté pour occuper le devant de la scène aussi bien sur le plan national que continental? Bien sûr que non. C'est pour cela que des réformes profondes sont plus que jamais auparavant nécessaires pour venir en aide aux clubs démunis et pour garantir leur pérennité. Même sur le plan international, les exemples de ce genre ne font pas défaut. Le PSG en est l'un des meilleurs pour prouver que l'argent est la chose la plus importante pour le développement d'un club. Est-ce pour cette raison que vous avez quitté la JSK? A vrai dire oui, même si l'expérience que j'ai vécue avec la JSK était formidable sur tous les plans. Sur le plan relationnel, je n'ai gardé que de bons souvenirs avec les responsables, les joueurs et les supporters de ce club auquel je voue un profond respect. Et sur le plan des résultats, je pense que j'ai amplement honoré mon contrat avec l'équipe fanion kairouanaise que j'ai sauvée du purgatoire. «Le CAB mérite un bien meilleur sort» Avec le CAB, comme par magie, vous êtes en train de réussir les mêmes performances Il y a beaucoup de similitudes entre la JSK et le CAB. Et pour les mêmes conditions, j'ai employé presque les mêmes méthodes et ça marche car j'ai trouvé un fervent désir de sortir le club du bourbier de la zone de danger au classement général. Je n'ai fait que mettre de l'ordre dans l'approche visant à booster les joueurs pour donner le meilleur d'eux-mêmes. Le courage et la bonne volonté de ces derniers méritent qu'on leur réserve un meilleur sort sur le plan matériel car il ne faut jamais perdre de vue qu'on a affaire à des joueurs professionnels et que le football constitue leur unique ressource. Comment expliquez-vous le fait que la JSK et le CAB soient les plus grands pourvoyeurs en valeureux joueurs pour les grands clubs sans pouvoir rivaliser avec ces derniers? Comme je viens de vous l'expliquer, ces clubs sont toujours condamnés à vendre leurs meilleurs joueurs pour continuer à «survivre». Ils auraient pu jouer pour tous les titres s'ils avaient les moyens financiers pour ce faire. Et étant donné que la JSK et le CAB sont les chefs-lieux de leurs gouvernorats, ils continueront d'attirer les meilleurs jeunes talents existants dans leurs régions. Et c'est peut-être ce phénomène providentiel qui leur est salutaire pour continuer leur bonhomme de chemin dans ces temps très durs. Heureusement que cette tradition peut se prolonger pendant de longues années encore. Seulement, ces deux clubs méritent un bien meilleur sort pour pouvoir faire partie des clubs huppés et cesser de jouer les outsiders ou pour éviter la relégation. Quels étaient vos objectifs en arrivant au CAB ? Quand j'ai pris en main le CAB, il était à la onzième position au classement général. Maintenant, il peut terminer en cinquième place. C'est donc un objectif atteint. De plus, nous avons nourri l'espoir d'atteindre la finale de la Coupe. Mais malheureusement, nous avons joué de malchance devant le CA qui a eu le dernier mot laborieusement grâce aux tirs au but. «Notre arbitrage, une vraie calamité» Et si on vous demandait enfin d'évaluer le championnat 2017-2018 ? D'abord, je voudrais commencer par un point positif, celui du nombre d'entraîneurs tunisiens enrôlés à la tête de nos clubs qui sont actuellement au pourcentage de 80% environ, par rapport aux entraîneurs étrangers. C'est une bonne chose car les entraîneurs tunisiens font leur preuve en Afrique et dans le monde arabe. Et pourquoi pas en Tunisie? Les prouesses réalisées par Khaled Ben Yahia, Chiheb Ellili, Kamel Kolsi, Ghazi Ghraïri pour ne citer que quelques-uns, en disent davantage. Seulement, le mauvais état de la majorité de nos terrains qui laissent à désirer reflète la mauvaise situation financière dont l'impact est fortement ressenti au niveau de la qualité du championnat. Mais le plus gros nuage gris couvrant le ciel de notre compétition reste incontestablement l'arbitrage que je considère comme une calamité et un désastre. C'est un arbitrage d'amateurs dans un championnat professionnel.