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«Il y aura d'autres répliques dans les zones de Menzel Habib et Mazzouna» Entretien avec Khereddine Attafi, ingénieur et sous-directeur de la géophysique à l'Institut National de la Météorologie
Les micro-séismes d'ampleur modérée situés entre 2 et 3,5 degrés sur l'échelle de Richter qui ont été signalés à Mazouna et Menzel Habib font-il craindre dans les prochains mois la survenue d'un tsunami ou d'un tremblement de terre de façon inattendue, à l'instar de celui survenu le siècle dernier dans la région de Tunis avec une magnitude de 5,9° Richter ? Les secousses observées dans les régions de Menzel Habib et Mezzouna, Jebel Bou Hedma, Chaal et Sebkhet Ennoual viennent chronologiquement à la suite d'un événement principal qui a eu lieu le 21 mai 2018 avec une magnitude de 5.1 sur l'échelle de Richter. On parle alors de répliques qui peuvent s'étendre de quelques heures à quelques mois et sur une superficie de moins de 10 km2. L'explication physique et géologique du phénomène est la suivante : des contraintes sont exercées en profondeur sur les roches. Ces contraintes proviennent de la tectonique des plaques qui constitue un des principaux moteurs de la dynamique du globe. Ces contraintes résultent d'une énergie potentielle emmagasinée à l'intérieur de la terre et lorsque les matériaux ou roches ne peuvent plus supporter ces contraintes il y a rupture et puis dissipation d'une énergie mécanique sous forme d'ondes sismiques. Une partie de l'énergie potentielle est également transformée par la même occasion sous forme de chaleur. Les séismes observés sur le territoire national proviennent de l'activité des failles. Ce sont des séismes qui se manifestent à l'intérieur des plaques tectoniques. Etant donné les dimensions de ces failles qui sont des failles modestes de dimensions assez faible, comparées aux failles de grandes dimensions comme la faille de la mer Morte en Jordanie ou la faille de San Andreas en Californie aux USA, les séismes générés sont des séismes de magnitudes modérées entre 4 et 5.5 sur l'échelle de Richter du moins pour les séismes remarquables et exprimés alors que la grande partie des secousses séismiques de la Tunisie varient entre 1 et 3.7 sur cette même échelle. Ces secousses sismiques ont lieu de façon brusque et instantanée. Leur prévision, à savoir le fait de se prononcer sur la date et le lieu ou l'ampleur du phénomène, n'est pas encore maîtrisée malgré les efforts menés pour réaliser une prévision efficace du phénomène. Toutefois, les approches penchent vers la prévention et l'atténuation des effets des tremblements de terre. C'est la stratégie commune en vigueur approuvée par les ingénieurs et scientifiques et adoptés par les pays dans leurs politiques économiques et stratégiques. En ce qui concerne la zone affectée par le dernier tremblement de terre de Menzel Habib et Mezzouna, la zone sera le siège de nombreuses répliques sur une période qui peut dépasser plusieurs mois, et ce, jusqu'à la libération totale et la dissipation de l'énergie emmagasinée en profondeur. Ce cas de séisme de magnitude 5 sur l'échelle de Richter peut occasionner l'apparition de fissures dans les constructions et même des lézardes. Les gens qui ont vécu le tremblement de terre peuvent avoir l'impression que la terre bouge sous leurs pieds. Des claquements et craquements à l'intérieur des bâtiments et des grondements souterrains peuvent être entendus. Des animaux et volailles peuvent paniquer et montrent des comportements anormaux et même des anomalies dans le paysage peuvent être observées. Sur ces faits, la Tunisie a opté pour la mise en place d'un réseau pour la surveillance sismique comptant aujourd'hui 17 stations de mesure et de détection qui sont complètement numérisées et équipées par des accélérographes pour la mesure des mouvements forts du sol. Pour la précision, ces stations offrent déjà les outils nécessaires qui permettent une très bonne précision. Pour les Tsunamis, ils ne peuvent être générés qu'en mer et au niveau des limites des plaques et non sur terre. Pour des estimations plus précises, les scientifiques utilisent aujourd'hui l'échelle de magnitude du moment qui indique la quantité d'énergie libérée pendant une secousse. C'est l'échelle de Mercalli qui mesure en quelques secondes la secousse ressentie. Dites-nous un peu plus sur la praticabilité de cette mesure scientifique et si l'I.N.M. enregistre et emploie des données avec cette échelle pour évaluer les risques sismiques et leur incidence ? L'échelle Richter des magnitudes est une échelle qui quantifie l'énergie dissipée par le séisme au niveau de l'hypocentre ou du foyer sismique. Elle est estimée sur la base du traitement du signal sismique enregistré. L'échelle de Mercalli quantifie les dégâts et la perception en surface depuis la zone épicentrale ou épicentre et en s'éloignant dans toutes les directions. Elle quantifie le degré de sévérité de la secousse sismique en surface. Les deux échelles sont fondées sur des approches différentes pour estimer les effets d'un même phénomène. Mais des relations existent entre ces deux échelles. Elles s'expriment sous forme de loi mathématique. Dans les années précédentes, avant la mise à niveau du système sismologique, l'INM comme beaucoup d'autres agences s'occupant des séismes a utilisé une magnitude locale basée sur la durée du signal enregistré. Toutes ces magnitudes ont servi pour l'estimation de l'aléa sismique en Tunisie afin, par la suite, de procéder à l'évaluation du risque sismique sur le territoire national. Dans les régions à forte séismicité, des systèmes d'alerte existent pour protéger les habitants et les installations en avertissant de l'imminence d'un tremblement de terre. Que fait l'I.N.M. en Tunisie à ce niveau et de quels moyens dispose-t-on dans les zones à risque comme les régions côtières ou le Sud tunisien ? Les habitants sont-ils informés, préparés ou sensibilisés aux premiers gestes à avoir et secours portés en cas d'urgence pour la survie ? Effectivement, dans ces régions à forte sismicité, des systèmes d'alerte dédiés à la population pour l'évacuation des bâtis ou se conformer aux indications et recommandations pour se protéger contre les séismes, en particulier l'éboulement ou la chute d'objets dans les constructions ont été mis en place tels que sirènes ou sons comparables. Ces mesures sont de nos jours restreintes à certains pays et certains types et usages de constructions dans ces pays. Il est à signaler que l'on désigne par régions à forte sismicité les régions connues pour des séismes dont la magnitude dépasse 6 sur l'échelle de Richter. On parle d'événement majeur pouvant occasionner la collapse totale des bâtis et même l'apparition de phénomènes induits à l'instar du glissement de terrain. Par contre, pour les tsunamis, qui sont aussi provoqués par un séisme fort en mer, les systèmes d'alerte pour contrecarrer ce phénomène sont déjà en service dans beaucoup de pays. La Tunisie a participé récemment au projet Tsumaps dont l'objectif est l'alerte aux tsunamis autour de la Méditerranée, projet qui a impliqué presque tous les pays du pourtour méditerranéen. Quelle est l' attitude à adopter en cas de menace imminente? Il existe plusieurs actions importantes à entreprendre : savoir se protéger avant, pendant et après un tremblement de terre, dresser un plan d'urgence et avoir une trousse d'urgence. A l'intérieur, il est important de s'abriter sous un meuble lourd, comme une table, un bureau, un lit ou tout meuble solide et de se couvrir la tête et le torse afin de se protéger de tout objet qui pourrait vous tomber dessus. En bref, il faut s'éloigner de toute menace qui peut blesser ou exposer à un danger de mort. De petites habitudes telles que le fait de s'agripper à un objet sous lequel on s'est réfugié afin de rester couvert. Si vous êtes à l'extérieur, il est impératif de se diriger vers un endroit dégagé, à l'écart des immeubles. L'endroit le plus dangereux se situe à proximité des murs extérieurs. Si on est dans un endroit public achalandé, il est recommandé de se réfugier dans un endroit où on est en sécurité sans risque d'être piétiné. Par contre, si on est au volant, il faut essayer de s'arrêter à un endroit sûr où on ne bloque pas la route. Il faut aussi laisser la voie libre pour les véhicules de secours et d'urgence. Tout ceci s'apprend. Il faudrait instaurer une culture chez la population, chose qui se fait à travers les médias et aux écoles et lycées depuis le plus jeune âge. Ce sont des habitudes que l'on peut acquérir aussi par l'éducation et la participation d'organismes comme la protection civile. Quels sont les séismes qui vous ont le plus marqué en tant que sismologue ? Les séismes de Fukushima et de Honshu sont les plus importants dans l'histoire. Celui de Sumatra de 2004 est également un des séismes remarquables à retenir en mémoire. Les îles telles que les archipels de Papua New Guinée sont les îles les plus exposées aux tsunamis et aux séismes les plus destructeurs. Des séismes associés aux volcanismes sont aussi des phénomènes, qui sont rares, mais dangereux et meurtriers.