Face au comportement spéculatif des industriels qui cherchent à faire pression sur les autorités afin de libéraliser le prix du lait et qui a conduit à la pénurie, puis au rationnement de cet aliment indispensable, le gouvernement n'a trouvé comme autre moyen pour amortir la crise que d'importer du lait demi-écrémé pour réguler le marché. Depuis samedi dernier, on peut voir du lait originaire de Belgique, partenaire commercial de la Tunisie, sur les étalages des grandes surfaces. Le paquet de lait demi-écrémé est vendu strictement au même prix que son homologue tunisien, à 1,120 D le litre. La crise de la filière laitière,qui frappe tous les maillons de la chaîne de la production, a pris une nouvelle dimension. Les industriels ne font plus recette avec la vente du lait demi-écrémé subventionné au profit des consommateurs. Ce qui a conduit au renforcement de la contrebande et du rationnement depuis quelques années. Selon certaines sources, le lait pourrait être importé de Belgique, de France, voire de Turquie, tous les trois des pays partenaires commerciaux de la Tunisie. On se souvient qu'en 2012, la Tunisie a dû importer du lait de Slovénie durant le mois de Ramadan pour faire face à la forte demande. Son prix autour de 1,700 D le litre était une fois et demie supérieur à celui du paquet de lait tunisien. Présent en grandes quantités sur les étalages des supermarchés, ce lait importé a même volé la vedette au lait tunisien à l'époque, permettant, ainsi, de contourner les difficultés rencontrées. Actuellement, les choses ne se présentent plus de la même manière. Le lait importé est-il une solution pour contrecarrer les désirs du lobby des industriels et des éleveurs ? Faut-il maintenir ou supprimer la subvention du lait demi-écrémé? Comment le prix du lait importé peut-il être inférieur à celui du lait local ? Est-ce que cette mesure n'est pas aventureuse, vu la dégringolade du dinar face à l'euro ? M. Ilyes Ben Ameur, président-directeur général de l'Office du Commerce de la Tunisie (OCT), nous parle des solutions qui sont préconisées pour trouver une issue à la crise. Crise de la filière laitière «Un appel d'offres international qui répond aux normes tunisiennes et au cahier des charges a été lancé pour choisir l'offre la moins chère et la plus rentable : celle de la Belgique. Ce n'est pas une importation de luxe. Elle est nécessaire pour parer au plus urgent». Deux cents millions de litres de lait demi-écrémé seront importés, ce qui constituera un stock régulateur de deux à trois mois qui permettra de rééquilibrer le marché. «Au niveau local, la production journalière est de 1.900.000 litres contre une consommation de 1.500.000 litres. Malgré tout, un déficit est observé sur les circuits de distribution». Il estime que faire des projections est une initiative louable, mais que pour l'heure, l'importation est le premier remède. C'est désormais chose faite pour éviter l'effet boule de neige. Les industriels font de la spéculation et de la surenchère pour faire augmenter le prix du lait demi-écrémé car leur produit ne serait pas rentable. Le président de l'Utap, Abdelmajid Ezzar, a dénoncé cette mesure gouvernementale palliative. Il estime qu'elle n'attaque pas le mal à la racine, notamment avec la sensible baisse du cheptel bovin (15%) et les difficultés que traversent les éleveurs.