Le Conseil de la presse, cette instance d'autorégulation, lancée il y a six ans, n'a pas encore pris forme. Pour certains, un tel retard ne semble plus surprenant, car pareil projet demande beaucoup de temps pour bien tenir la route. Aujourd'hui, les tractations médiatiques, qui n'ont pas cessé de chercher une assise juridique claire et cohérente, arrivent au bout du chemin C'était mercredi dernier, depuis l'amphithéâtre de l'Ipsi, au Campus universitaire de La Manouba, la première consultation sur le statut du Conseil de la presse, ainsi que le projet du Code de déontologie journalistique. «Ce n'est qu'un début », a affirmé M. Manoubi Marouki, un des membres du comité constitutif qui a, dès le départ, pris soin de faire naître, à l'instar de la Haica, une instance régulatrice de la presse écrite et électronique. La décision a produit, alors, un effet salvateur qui n'a pas trop duré. En plus d'un manque de financement déclaré, l'impression fut qu'il y avait un certain vice de forme ou de procédure contrecarrant l'acte de création. «Ce qui importait le plus était, à l'époque, d'unifier les visions et les positions sur la question de régulation, afin de mieux déterminer l'identité du conseil et le rôle à jouer», indique M. Neji Bghouri, président du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt). Son autorité et sur les journalistes et sur les professionnels du secteur ? Son pouvoir consiste, selon lui, à réformer le secteur et le prévenir de tous risques du dérapage moral et professionnel. D'ailleurs, il y a une similitude avec l'expérience danoise, compare-t-il. Pour ce faire, ajoute-t-il, une association d'appui au Conseil de la presse a vu le jour en 2017. Reste, somme toute, que ce conseil aurait un pouvoir plutôt moral que répressif, affirme-t-il. Dans son mot d'ouverture, la doyenne de l'Ipsi, Mme Hamida El Bour, s'est focalisée sur l'apport arbitral d'une telle structure professionnelle. «Face aux multiples cas d'aberrations, on a plus que jamais besoin d'un conseil régulateur et d'un code de déontologie propre à la profession», estime-t-elle, tout en faisant valoir l'impact sur la liberté d'expression et le droit du public à une information fiable et de qualité. Car, la confiance du public ne se décrète pas, renchérit, en conclusion, M. Bghouri. Parallèlement au droit des médias, fait savoir M. Abdelkrim Hizoui, universitaire et membre dudit comité constitutif, l'Ipsi a de même introduit dans son programme de formation l'éthique journalistique, comme matière à part entière. Il a qualifié le projet du conseil d'ambitieux, lequel devrait prendre son temps. «L'expérience tunisienne s'annonce avant-gardiste, à bien des égards», juge-t-il. En réaction au projet de la charte déontologique, M. Hizaoui insiste que les règles d'éthique jaillissent de l'exercice journalistique. Il lui a fait une lecture critique : «Autant de principes que contient ce projet de code, conçu en 23 articles, méritent plus de détails et de précision. Il aurait dû, dans ce premier jet, se référer à d'autres conventions internationales relatives à l'éthique journalistique telles que la Déclaration de Munich». Il résume, en définitive : «On peut mieux faire». Une mise au point s'avère, donc, nécessaire, selon son collègue Fraj Zammit, lui aussi universitaire à l'Ipsi.