Depuis 2013, on ne compte plus le nombre de workshops qui ont été consacrés à la mise en place du Conseil de la presse, et dont le dernier en date a eu lieu, hier matin, à Tunis. Jusqu'alors, on ne voit rien venir. Sauf qu'un comité constitutif, à peine lancé en avril dernier, semble en train de mettre ce projet sur les rails. « Mais non sans difficultés d'ordre logistique et financier qui ont beaucoup impacté son parcours », avoue notre collègue Manoubi Marrouki, ancien rédacteur en chef à La Presse et membre dudit comité, auquel est confiée la réflexion à des pistes de sortie, afin que ce Conseil puisse voir le jour dans les plus brefs délais. « Les efforts de nos partenaires, à savoir le Snjt, article 19, la Fédération des directeurs de journaux, la Haica, avec le concours de l'association d'appui au Conseil de la presse ont bien abouti », relève-t-il, soulignant que ce comité constitutif élit, provisoirement, domicile au siège du Snjt. Sans local, il a failli s'arrêter à mi-chemin. Il a eu intérêt à consacrer une approche participative, engageant sur la même ligne droite journalistes et professionnels du secteur, le but étant d'imaginer ensemble une charte déontologique pour le Conseil et un statut l'organisant. Cela dit, il préconise « deux fondamentaux d'exercice journalistique », citant l'exemple de la TAP, de la Télévision nationale et d'autres médias, notamment privés. Que cela se généralise progressivement ! Surtout, déclare M. Marrouki, qu'il y a, aussi, des prémices de soutien financier de la part de l'Union européenne. Sur ce plan, notre collègue M. Said Ben Kraiem, directeur du Capjc (Centre africain du perfectionnement des journalistes et des communicateurs) nous a édifiés sur les détails du programme d'appui aux médias tunisiens, avec une enveloppe d'environ 30 millions de dinars. « C'est un programme européen, établi sur trois ans, destiné à promouvoir le rendement des médias tunisiens», affirme-t-il. Appui médiatique à trois chapitres Et d'ajouter qu'il comporte trois principaux chapitres. Le premier consiste à fournir du matériel en guise d'aide spécifique pour répondre aux besoins des médias publics, à raison de 300 mille dinars pour chacun. «D'ici janvier prochain, tout sera disponible », assure-t-il. Le second concerne le volet formation qui profitera à tous les journalistes tunisiens, tous secteurs confondus. Tandis que le troisième chapitre porte sur des études stratégiques visant à améliorer la qualité de la presse en Tunisie. De même, les structures professionnelles ayant trait au secteur vont, également, en bénéficier. S'ajoutent à ce mécanisme financier d'autres d'ordre législatif et organisationnel. « Le nouveau projet de loi 115 sur la presse écrite est en cours de finalisation », tient à souligner M. Marrouki. Mais, résume-t-il, ce Conseil aura un rôle plutôt dissuasif que coercitif. D'autant plus qu'il devrait agir, en toute indépendance, répond Hafedh Ghribi, du quotidien « Assabah », présent au nom de la Fédération des directeurs de journaux. M. Hichem Snoussi, de la Haica, a insisté sur le gage de la gouvernance. Mais que vaut une telle démarche, sans une volonté politique claire et constructive ? « Il y a une certaine tendance à mettre le secteur au pas, faisant fi du décret 116 organisant la Haica », déplore-t-il, sans être pessimiste. Et là, M. Marrouki a repris la parole pour faire valoir l'apport de la Haica, avec laquelle le comité travaille en étroite collaboration. Quelle mission? Membre du bureau du Snjt, Mme Soukaina Abessamed s'est focalisée sur l'importance de l'autorégulation, un facteur d'éthique, de professionnalisme et de responsabilité. A vrai dire, le Conseil de la presse n'aura pas une vocation répressive, il devrait jouer sur la sensibilisation. La médiation, en quelque sorte. Dans un paysage médiatique quasiment en désordre, où règnent des calculs de boutiquier, ce Conseil de la presse aura-t-il l'effet réformateur ? Certains médias, soupçonnés d'avoir des liaisons avec des partis politiques, vont-ils comprendre le message et se plier aux normes d'éthique professionnelle ? La mission du conseil s'annonce, semble-t-il, difficile. Membre du comité constitutif du Conseil, Mme Habiba Mejri est revenue sur ses principales prérogatives, en l'occurrence le monitoring, la formation et la médiation entre médias et public. En termes d'autorégulation et de charte déontologique, certains médias (TAP, TV nationale, Mosaïque FM) et structures professionnelles (Snjt, Haica...) ont été cités en exemple. Du reste, que valent ces manuels, soi-disant de bonnes pratiques, s'ils demeurent encore figés et lettre morte ? De même, que signifie un Conseil de presse s'il n'y a pas un terrain d'exercice favorable ?