En sa qualité d'ancienne gloire du football tunisien et de parrain d'un bastion du sport-roi qu'est le Club Olympique des Transports, Ali Kâabi connaît mieux que quiconque les maux qui rongent la stabilité sportive dans notre pays. Entretien avec une icône qui positive tout en voulant faire bouger les choses: « Je vais focaliser sur l'infrastructure sportive source de quasiment tous les heurts et malheurs, sans oublier que des installations adaptées sont sources de développement intégral tout simplement. Vous savez, il y a quelque temps, volet mis à niveau et entretien, le projet de création de l'Office pour l'entretien des infrastructures sportives nous avait apporté beaucoup d'espoir. L'espoir de résoudre tant de problèmes liés à la maintenance, à la sécurité, au bonheur de voir des jeunes s'adonner à leur sport favori et ne pas dévier vers les dangers de l'oisiveté et autres méfaits qui gravitent autour de notre société. Or, cette proposition n'a pas pu voir le jour en raison d'une réticence au changement de la part de certains ronds de cuir du secteur sportif. Franchement, ça fait froid dans le dos quand on se rappelle que la gestion des infrastructures sportives n'a pas changé depuis les années 60 ! Il y a eu, certes, un effort et une volonté manifeste volet planification et budgétisation des projets. Mais la réalisation est tout autre. Maintenant, la nouvelle équipe en charge du ministère des Sports doit absolument se pencher là-dessus sans délais. Il faut une implication de type transversale qui réunit la tutelle des Sports, le ministère de l'Equipement…, le tout sous la coupe des pouvoirs publics qui devront s'atteler à débloquer les fonds nécessaires en vue de réaliser les projets. Autre tare du « système » comme on dit, tout ce qui a trait à l'exploitation et à l'entretien. Il est frustrant et aberrant de noter qu'une fois certains ouvrages réalisés et réceptionnés dans les normes, surgit le plus grand problème relatif à l'exploitation et l'absence d'entretien. Il faut dans ce cas d'espèce comprendre une bonne fois pour toutes que même si parfois c'est du ressort de la municipalité, cette dernière peut ne pas disposer du savoir-faire ni d'un budget y afférent. C'est aussi une question de qualification ! Regardez les stades de l'élite actuellement. Radès est le seul qui répond aux normes. El Menzah se meurt, Zouiten reste une énigme, Sousse et Monastir ont besoin d'un lifting et le stade de Sfax est trop exigu. Circulez, il n'y a rien à voir pour le reste ! Voilà, le tableau ainsi brossé bride toute initiative en vue de corriger le tir en ayant recours à un simple rafistolage afin de colmater les brèches. Et c'est dire combien la bonne volonté des responsables du microcosme sportif se heurte souvent à des problèmes d'ordre structurel qui s'accumulent. Equipements, moyens, budgétisation, planification, politique sportive et volonté manifeste de faire du sport un levier sociétal. Tout est question de synergie et de convictions. Cela dit, tout engagement en faveur de la promotion du sport pour tous doit tout d'abord focaliser sur les jeunes, ce formidable vivier. Or, le constat est affligeant. L'état des infrastructures qui leur sont destinées est déplorable. Il est impossible, sauf concours favorable, d'avoir de jeunes champions avec des moyens aussi limités, voire inexistants. En clair, l'état de délabrement avancé des parcelles de terrain qui leur sont proposées pour s'entraîner doit interpeller la tutelle sans délais. Quand on veut, on peut. Et il faut agir en ce sens ». « Le chemin de croix! » « De nos jours, nos installations sportives ne répondent globalement à aucune norme internationale. Jadis, le CSS a joué la finale de la C1 à ...Radès ! S'il avait évolué dans son fief, il aurait battu Al Ahly du Caire! J'en suis convaincu. Franchement, en football, je ne comprends pas comment on est passé de l'amateurisme au professionnalisme, en passant par le non-amateurisme ! Il y a forcément des évolutions contradictoires. Ou bien on prône l'interventionnisme, ou bien on favorise un désengagement des pouvoirs publics avec un suivi de la législation y afférente. Bref, il faut définir le bon ajustement pour avancer sans rétro-pédaler parfois. En général, il faut comprendre sans détour que la promotion des infrastructures est l'axe majeur sur lequel notre potentiel sera développé. La formation passe par la promotion et la multiplication des équipements sportifs autant que par le choix des éducateurs. Un sport au diapason doit se doter d'infrastructures adéquates, point barre ! Vous savez, malheureusement, en Tunisie, la pérennité de notre modèle professionnel ne repose que sur la primauté du résultat sportif avant tout ! C'est faire fausse route car le champion de demain doit avant tout être formé à la base. Donc, volet agenda, un cahier des charges basé sur des critères objectifs doit être établi. Il faut encourager la participation du secteur privé aussi, car juger seulement les collectivités locales sur leur capacité à ériger des installations sportives sont tout simplement improductifs à terme. Le législateur doit aussi et impérativement emboîter le pas à cette dynamique que j'espère naissante. Car il ne faut pas omettre de signaler que les clubs ne sont pas propriétaires des installations à leur disposition ».