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Maher Ben Dhia, ex-ministre de la jeunesse et des sports : «Lenteur et complexité procédurales» Dossier : Professionnalisme, qu'est-ce qui doit changer ? — IIIe partie : Infrastructure sportive
L'ancien ministre de tutelle pointe du doigt un circuit légal compliqué et complexe,une centralisation décisionnelle pénalisante et un manque d'audace politique dans la gestion du dossier épineux de la logistique sportive «Tout d'abord, je dois rappeler que le volet grandement stratégique qu'est l'infrastructure sportive repose sur deux aspects fondamentaux : la création de nouveaux projets et sites sportifs et l'entretien des équipements logistiques. A cet égard, il faut noter que les problèmes majeurs résident au niveau des municipalités. En effet, le ministère projette et assure le financement adéquat mais ces institutions municipales tardent à mettre à exécution les projets et à lancer des appels d'offres sachant qu'il faut au moins trois ans pour aboutir à la réalisation de n'importe quel projet quelle que soit sa dimension, compte tenu justement de cette lenteur et complexité du circuit procédural qui régit ces opérations pourtant stratégiques et à haute valeur ajoutée pour les performances de nos sportifs. Dans ce registre, il faut une année pour que ce projet tienne la route au niveau du ministère pour évaluer sa pertinence et, par la suite, l'inclure dans le budget annuel et dans la loi de finances; tout ceci avant d'attaquer le volet des études nécessaires et des différents appels d'offres lors de la 2e année. A ce niveau, il faut relever l'existence de deux axes, à savoir «l'avant-projet sommaire (APS)» et «l'avant-projet détaillé (APD)». Or, il aurait été plus pertinent d'unifier ces deux étapes pour économiser du temps et de l'argent, deux valeurs vitales et grandement stratégiques. L'aboutissement final et l'exécution du projet ne peuvent être assurés par conséquent qu'au terme de la 3e année qui apporte parfois son lot d'aléas et de contraintes, puisque dans certains cas, le budget initialement alloué lors de la 1ère année risque d'être insuffisant d'où l'obligation de demander une rallonge financière pas facile à obtenir compte tenu des contraintes budgétaires globales de l'Etat. De fait, et tenant compte de ce constat peu reluisant, cette équation triennale s'avère lourdement pénalisante à plus d'un titre et qui n'a rien à voir avec les approches opérationnelles modernes où le facteur temps prend une proportion nettement minime mais efficace. L'autre contrainte complexe qui constitue un handicap de taille face à la réalisation des projets d'infrastructure est sans aucun doute celle ayant trait au volet foncier, où on peut détecter des problèmes monstres en rapport avec l'expropriation des sites choisis pour la mise en œuvre de ces projets de la part du ministère des domaines de l'Etat au profit des municipalités concernées par l'intermédiaire du ministère de la Jeunesse et des Sports qui n'est pas concerné en fait par l'appropriation de ces terrains, et ce sont plutôt les municipalités qui sont propriétaires de sites et de patrimoine foncier. Venons-en à l'autre secteur non moins problématique qu'est l'entretien des sites sportifs. A ce sujet, ce sont les municipalités qui sont « initialement »en charge de ce domaine, mais faute de moyens, elles ont systématiquement et en permanence recours au ministère de tutelle pour leur venir en aide financièrement, une approche qui n'est toujours pas concluante pour plusieurs raisons, puisque tout ce circuit procédural rebutant et complexe ci-dessus mentionné va se reproduire. D'ailleurs, et afin de pallier cette problématique au moment où j'étais à la tête du ministère, j'avais proposé la création d'un cabinet se chargeant exclusivement de ce volet important qu'est l'entretien des infrastructures sportives, mais M. le Président du gouvernement de l'époque, Habib Essid, avait réfuté une telle proposition en argumentant sa position par l'instauration imminente d'un pouvoir de gestion régionale qui se chargera d'un tel dossier et qui rompra avec la centralisation décisionnelle». «Un remède nommé PPP et changement du statut des clubs» «Pour faire face à cette situation confuse et rompre radicalement avec ce mode de gestion figé et fortement pénalisant, il est temps de réactiver ce projet de loi sur lequel j'avais beaucoup travaillé, à savoir le changement du statut des clubs en sociétés économiques et sportives encourageant l'implication du secteur privé dans la gestion des affaires courantes du sport à tous les points de vue et alléger par voie de conséquence le fardeau financier sur le budget public; et instaurant un partenariat public-privé (PPP)autour d'un axe gagnant-gagnant bénéfique pour tout le monde. A juste titre, j'ai eu l'occasion de rencontrer le Maire de Marseille à l'occasion du match-gala ESS-OM et il m'a longuement parlé de la pertinence de cette approche PPP qui a abouti à la création d'un Vélodrome new-look de toute beauté et surtout à l'impact économique positif aussi bien sur les finances de la municipalité de la ville phocéenne que sur la trésorerie de l'OM. A ce sujet, l'on doit saluer la réussite de l'expérience de la cité sportive nationale qui gère le stade de Radès et la cité nationale de la Jeunesse par un statut Epna (Entreprise Public à caractère non administratif). Un mode de management remarquablement efficace qui s'occupe d'une manière autonome et efficiente de l'entretien et de la commercialisation de ses sites, chose qui n'aurait pas lieu s'ils étaient confiés à la municipalité de Tunis ou de Radès. Sur un plan foncièrement politique, je pense que la nouvelle orientation constitutionnelle (article 7) s'articulant autour d'un pouvoir décisionnel municipal régional conférera plus d'efficience et éliminera une grande partie de cette lourdeur procédurale et juridique à ce sujet, puisque les subventions seront directement allouées aux municipalités qui auront la couverture constitutionnelle adéquate leur permettant de créer, gérer et entretenir ces infrastructures sportives. En bref, certes le tableau actuel est profondément marqué par une approche managériale et gestionnaire figée et compliquée, mais ce que je déplore le plus, c'est l'absence de volonté politique conséquente et le manque d'audace pour apporter les changements adéquats quand bien même ils seraient douloureux».