Youssef Chahed est allé sans tambour ni trompette imprimer à la coopération tuniso-saoudienne une mutation historique. Et ce sont les chiffres qui parlent d'eux-mêmes : pas moins de deux mille quatre cent millions de dinars seront injectés dans les rouages de l'économie tunisienne dans l'objectif d'impulser l'équilibre budgétaire, de renforcer le flux des investissements saoudiens et de concrétiser la nouvelle approche sur laquelle se fonde désormais la coopération bilatérale Beaucoup d'observateurs, d'analystes et même de responsables de partis politiques de l'opposition et aussi dans le pouvoir se sont posé la question suivante: à quoi servira la visite effectuée par Youssef Chahed, le Chef du gouvernement, au Royaume d'Arabie Saoudite, à l'invitation du prince héritier Mohamed Ibn Salmane ? Et parmi ceux qui se sont posé cette question, personne n'a osé avancer que cette visite pourrait contribuer à la concrétisation des mesures d'appui de l'Arabie Saoudite au développement de la Tunisie. On parlait à l'époque d'un appui saoudien sous la forme d'un dépôt financier à la Banque Centrale de l'ordre de 2 mille millions de dinars. Sauf que rien n'a été annoncé officiellement au bout de la visite du prince Mohamed Ibn Salmane dans notre pays. Les relations de coopération tuniso-saoudienne connaissent une mutation historique sans précédent dans l'histoire des échanges entre les deux pays. Pour la première fois, dans l'histoire des rapports bilatéraux, l'appui saoudien à l'économie tunisienne se chiffrera à quelque 2.400 millions de dinars, détaillés comme suit : une enveloppe de 350 millions de dinars pour financer des investissements saoudiens dans le domaine agricole et de l'eau potable, une deuxième enveloppe sous forme d'une ligne de financement du commerce extérieur de l'ordre de 600 millions de dinars et enfin un appui financier de l'ordre de 1.500 millions de dinars sous forme de dépôt à la Banque Centrale et de prêt. Pour résumer, le bilan de la visite de Youssef Chahed en Arabie Saoudite fait apparaître un bond aussi bien qualitatif que quantitatif aux échanges bilatéraux salué, à sa juste valeur, par le chef du gouvernement comme «un pas positif pour les relations tuniso-saoudiennes». Youssef Chahed se félicite, en effet, dans une déclaration à la presse, du «soutien saoudien important pour la Tunisie et de la volonté de développer davantage les relations historiques» qui lient les deux pays et les deux peuples, depuis des lustres. Le chef du gouvernement n'oublie pas d'adresser un message significatif aux hommes d'affaires et aux opérateurs tunisiens les invitant à s'impliquer davantage dans la promotion de la Tunisie comme une destination d'investissement offrant aux investisseurs saoudiens des opportunités et des avantages conséquents pour s'installer en Tunisie et lancer des projets de coopération et de partenariat avec leurs homologues tunisiens. Ses propos sont clairs et précis : «J'ai rencontré les responsables des chambres d'affaires saoudiennes pour leur exposer les atouts qu'offre la Tunisie en matière d'investissement». Et c'est bien aux opérateurs tunisiens d'assumer leurs responsabilités en terminant le travail et en s'ouvrant sur leurs homologues saoudiens pour les inciter à tirer profit des avantages et des opportunités que leur propose la Tunisie. Quand on découvre qu'une ligne de commerce extérieur de 600 millions de dinars est ouverte aux exportateurs tunisiens, on ne peut que prévoir un nouvel élan pour les échanges commerciaux avec l'Arabie Saoudite, un marché jusqu'ici fermé ou presque aux produits tunisiens alors que la balance commerciale accuse un déficit de plus en plus grave avec d'autres pays qui sont parvenus à s'implanter sur le marché national et supplanter les produits nationaux avec leur production bas de gamme. Idem pour la bouffée d'air frais que connaîtra la Banque centrale de Tunisie à la faveur des 1.500 millions de dinars qui y seront injectés et qui contribueront à réguler les chiffres que Marouane Abbassi produit régulièrement aux Tunisiens dont le dernier concerne les devises dont dispose la Banque à peine suffisantes pour assurer uniquement 68 jours d'importations. Il s'agit maintenant d'assurer le suivi qu'il faut à cette importante mutation connue par les relations tuniso-saoudiennes, le but étant que les résultats ayant sanctionné la visite de Youssef Chahed à Riyad ne restent pas de simples vœux.