ALGER (AP) — Des heurts ont opposé hier les forces de l'ordre à des manifestants regroupés à Alger devant le siège du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, opposition), qui avait appelé à défiler pour réclamer la levée de l'état de siège en vigueur depuis 2002 en Algérie. Le RCD a dénombré une quarantaine de blessés hospitalisés, tandis que la police faisait état de huit blessés dans ses rangs, dont deux dans un état grave. Les autorités n'avaient pas autorisé le défilé prévu par le RCD, l'état de siège interdisant toute manifestation à Alger. Très tôt hier matin, un important dispositif policier a été déployé sur les quelque trois kilomètres du parcours qui devait relier la place du 1er-Mai au siège de l'Assemblée nationale. Les rues adjacentes ont été fermées. Environ un millier de manifestants se sont toutefois regroupés devant le siège du RCD, très vite encerclés par des brigades d'intervention spéciales. Plusieurs personnes ont été blessées dans les heurts avec la police qui ont suivi. Le responsable de la communication du RCD, Mohssin Bélabés, a affirmé à l'Associated Press qu'une centaine de personnes avaient été blessées, dont une quarantaine avaient été hospitalisées. Parmi les blessés figure le chef du groupe parlementaire Othmane Mazouz. Ce dernier a reçu un coup de matraque au visage, a rapporté le Dr Saïd Sadi, président du RCD. Plusieurs dizaines de personnes ont également été arrêtées, selon Mohssin Bélabés, qui a ajouté que le site Internet du RCD était bloqué. Selon un communiqué du ministère de l'Intérieur, 19 personnes ont été blessées: 11 manifestants et passants, ainsi que huit policiers - parmi lesquels deux blessés graves. Les forces de l'ordre font également état de neuf interpellations. "On nous a certes empêchés de marcher, mais politiquement, on a réussi à casser le mur de la peur", s'est félicité Mohamed Khendek, sénateur du RCD. "Maintenant, il s'agira de gérer la dynamique politique créée par notre manifestation et lui donner un prolongement dans les jours qui viennent". Environ un millier de personnes ont réussi à éviter les forces de l'ordre déployées en masse dans Alger pour se rassembler devant le siège du RCD. Face aux policiers, ils scandaient des slogans tels "Algérie, libre et démocratique", "Bouteflika, dégage" ou encore "Pouvoir assassin". Le Dr Saïd Sadi était, lui, contraint de suivre la manifestation du balcon du siège de son parti, en compagnie de ses collaborateurs. "Je suis prisonnier dans le siège du parti, je ne peux pas sortir pour prendre part à la manifestation", a déclaré le Dr Sadi dans un mégaphone depuis un balcon du RCD. "On ne peut pas mener de combats quand on est assiégé, enfermé, comme vous le constatez". Sur la rambarde d'un balcon, le drapeau algérien flottait à côté du drapeau tunisien. Les manifestants qui devaient venir des banlieues Est et Ouest d'Alger pour participer à la manifestation ont été bloqués pendant deux heures sur l'autoroute par des barrages de police successifs. A travers cette manifestation, le RCD entendait capitaliser sur les derniers mouvements de protestation en Algérie, dans la foulée du mouvement de contestation en Tunisie, pour exiger la levée de l'état d'urgence, qui empêche l'opposition de s'exprimer dans la rue, et demander l'ouverture des médias publics monopolisés par le pouvoir.