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Certitudes et suspicions ?
Le monde arabe à travers ses penseurs et ses intellectuels
Publié dans La Presse de Tunisie le 17 - 02 - 2011

Le monde arabe est-il en train de se réveiller réellement en ce début du XXIe siècle ? Nombreux sont ceux qui le pensent. Leur preuve ? La révolution tunisienne de 14 janvier 2011 qui a chassé Ben Ali après 23 ans de pouvoir absolu, et la révolution égyptienne du 25 janvier de la même année qui a aboli le régime de Hosni Moubarek au pouvoir depuis 31 ans, est leur argument massue. Mais certains, surtout parmi les intellectuels occidentaux, restent sceptiques et méfiants. C'est qu'ils évoquent la possibilité de l'apparition d'un nouveau Khoumeiny en Tunisie ou en Egypte qui installera «La Chariaâ» pure et dure, et balayera ainsi les aspirations des masses populaires à la liberté et à la démocratie. Mais ce qu'on oublie et que l'on omet dans les débats actuels sur les événements qui secouent actuellement la totalité du monde arabe, ce sont les travaux considérables des penseurs et des intellectuels égyptiens, marocains, tunisiens, libanais et autres qui pourraient être à l'origine de ce nouveau réveil arabe.
Le monde arabe, pourtant si proche de l'Europe (Tanger est à 10 km seulement des côtes espagnoles et les côtes tunisiennes de Kélibia sont à 60 km de la Sicile), reste pour ainsi dire lointain et énigmatique pour un grand nombre d'Européens. Envers lui, on éprouve de l'hostilité, du mépris et de la méfiance. D'où l'accumulation d'une accumulation de préjugés et de malentendus qui se manifestent de temps en temps dans les médias écrits ou parlés. L'image de l'Arabe, d'après eux, change selon les circonstances. Elle est donc affreuse et repoussante. Quand se déclenche une crise de pétrole comme c'était le cas en 1974, l'Arabe est un «cheikh» avec un gros ventre, une djellaba ample, la moustache touffue, assoiffé de femmes blondes. Lorsqu'une agression se produit, comme celle du 11 septembre 2001, n'importe quel Arabe devient un terroriste en puissance. Au cours de la dernière décennie, toute l'Europe, ainsi que l'Amérique étaient et restent jusqu'à aujourd'hui, victimes d'une vague de peur et de panique, due à l'extension des opérations terroristes commises par les groupes fondamentalistes islamistes. C'est pour cette raison que nombreux sont les Occidentaux qui pensent désormais que l'invasion de leurs pays civilisés par l'Islam est imminente. Mais le monde arabe, à travers ses prestigieux et éminents intellectuels, est presque en contradiction avec ces images et ces préjugés «affreux et repoussants». Cela est prouvé par leurs travaux et leurs réflexions sur les grands événements, ainsi que sur les rapports entre l'Occident et l'Orient, la laïcité et l'Etat et la religion, l'Islam et la politique, les Arabes et la modernité, l'émancipation de la femme et les droits de l'homme, etc.
Tradition et éclectisme
Ces penseurs et ces intellectuels sont les meilleurs que les sociétés arabes aient produits au cours du XXe siècle.
Limitons-nous aux plus célèbres parmi eux des 50 dernières années, dont on peut citer le Marocain Abdallah Laroui qui avait été le premier à avoir analysé méthodiquement et minutieusement les rapports conflictuels entre les intellectuels arabes et le pouvoir, et ce, dans son excellent ouvrage : La crise des intellectuels arabes paru à Paris au début des années 1970. Dans sa brillante conclusion, Laroui écrit : «Les intellectuels arabes pensent selon deux logiques : la majorité d'entre eux selon la logique traditionalisante (salafiste), le reste selon une logique éclectique; les deux tendances aboutissent en fait à la dimension historique. Mais si l'intellectuel efface l'histoire de sa pensée, l'efface-t-il de la réalité? Bien sûr que non. L'histoire, en tant que structure passée-présente, informe sur la condition actuelle des Arabes, tout autant que celle des adversaires. La pensée a-historique n'aboutit qu'à un seul résultat : ne pas voir le réel, et si nous traduisons cela en termes politiques, nous disons qu'elle renforce à tous les niveaux la dépendance. Cela va sans dire pour la pensée éclectique qui s'ouvre entièrement à toutes les influences extérieures; mais la pensée traditionaliste n'est pas moins dépendante, en dépit de ses prétentions. En effet, comment peut-elle s'opposer aux technologies modernes, aux systèmes économiques et sociaux, aux écoles intellectuelles contemporaines, alors qu'elle ne les comprend pas et n'a aucune possibilité d'inventer des systèmes concurrents? La dépendance, apparente ou cachée, ne signifie pas seulement perte de liberté et exploitation, elle ne porte pas atteinte seulement à la dignité et aux intérêts matériels de la nation, elle veut dire aussi et surtout persistance et approfondissement du retard historique».
Les travaux de l'autre Marocain Abed Al Jabiri, décédé en 2010, avaient donné l'espoir d'une renaissance, d'une nouvelle philosophie arabe critique et nationaliste.
S'inspirant de la philosophie éclairée d'Ibn Rochd, et de la pensée positiviste d'Ibn Khaldoun, l'éminent historien et penseur tunisien Hichem Djaït s'était intéressé dans les différents ouvrages qu'il a publiés au cours des 50 dernières années, à définir la personnalité arabo-musulmane face à son destin, ainsi que face à l'Occident colonisateur. Nourri d'une grande culture philosophique littéraire et sociologique, Hichem Djaït s'est intéressé aussi à l'histoire de l'Islam politique, ainsi qu'à l'architecture de la cité musulmane. Ses écrits sur le Coran, ainsi que sur la Révélation demeurent une référence essentielle dans ces deux domaines.
Un nouvel être arabe
Le célèbre poète syro-libanais Adonis, en vrai Nietszche arabe, n'avait cessé depuis les années 60 jusqu'à nos jours, autant dans ses essais que dans sa poésie, d'appeler à la renaissance d'un «nouvel être arabe» qui surgira comme un Sphinx des décombres d'une culture et d'une civilisation «mortes» depuis longtemps.
La brillante sociologue tunisienne Hélé Béji avait analysé, dans un remarquable ouvrage intitulé Le désenchantement national, l'échec de l'indépendance dans les trois pays du Maghreb:la Tunisie, l'Algérie et le Maroc.
Le Syrien Georges Tarabichi, traducteur de Freud et de Hegel, s'était penché à étudier avec des outils critiques empruntés à de nouveaux courants critiques, les conflits surtout culturels entre l'Occident et l'Orient. L'Egyptien Farag Fouda assassiné par les groupes fondamentalistes radicalistes, avait consacré de virulents écrits, essais et articles confondus, à la critique des groupes partisans d'un «Etat islamique». Son compatriote Nacer Hamed Abu Zaid, mort en 2010, avait présenté de nouvelles analyses sur la Révélation et sur le texte coranique. Les groupes islamistes fondamentalistes l'avaient violemment attaqué, le traitant d'«hérétique».
Le Saoudien Abdallah Al-Kusaimi, un vrai nietszchéen lui aussi, a été obligé de vivre en exil, et ce, pendant de longues années pour avoir critiqué, dans ses fameux essais dans des revues arabes d'avant-garde, les sociétés tribales du Golfe, ainsi que le wahabisme en vigueur dans son pays. L'Algérien Mohamed Arkoun avait acquis une célébrité dans le monde arabe ainsi qu'en Europe pour avoir étudié, dans la majorité de ses écrits, l'impact du Coran sur la pensée arabe classique et contemporaine. Ses pertinentes réflexions sur l'état actuel de l'Islam étaient à l'origine de l'apparition d'une nouvelle génération de penseurs au Maghreb comme au Machreq…
Le Palestinien Hichem Charabi, mort en 2005 et qui avait enseigné pendant 40 ans la philosophie de l'histoire à «Georgetown University» à Washington, avait inventé un nouveau concept, «le néopatriarcat», pour analyser les nouveaux phénomènes sociaux et culturels dans le monde arabe.
Ce qu'il faut bien préciser c'est que la majorité de ces penseurs et intellectuels ont été formés dans les universités occidentales. Au cours des 50 dernières années, ils avaient effectué un travail de longue haleine visant à analyser et à décrypter les crises et les évènements majeurs qui ont bouleversé les sociétés arabo-musulmanes, tout en essayant d'expliquer les phénomènes sociaux, politiques, culturels et même psychiques dans ces sociétés. Les différents courants philosophiques occidentaux comme le marxisme, le positivisme, l'existentialisme, le freudisme, le structuralisme ainsi que d'autres étaient une référence essentielle pour eux.
Il faudrait ajouter aussi que tous ces penseurs et ces intellectuels étaient en opposition ouverte et permanente avec les régimes arabes républicains ou royalistes. C'était pour cette raison que bon nombre d'entre eux étaient contraints de vivre en exil. Ils étaient aussi en «guerre ouverte» avec les groupes fondamentalistes qui les traitaient d'«hérétiques» et s'opposaient à leur critique radicale de la religion et de son rôle dans la société. Leurs travaux, leurs réflexions, leurs écrits semblent essentiels et indispensables pour expliquer et comprendre ce nouveau «réveil arabe». Leur influence, directe ou indirecte, sur les jeunes générations qui ont déclenché l'étincelle de ce réveil est, à notre avis, sans aucune équivoque…


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