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Révolution démocratique et avenir de la science et de la recherche scientifique en Tunisie (1ère partie)
Opinions


Par Ali FERCHICHI
Evoquer la recherche scientifique, c'est vouloir saisir ses enjeux stratégiques et faire ressortir non seulement son apport dans le processus du développement, mais surtout cerner les conditions de son épanouissement.
Les connaissances scientifiques sont de plus en plus nécessaires aux décideurs publics et privés, et, en particulier, la science doit jouer un rôle important dans la formulation des politiques et des règlements et décisions. La recherche scientifique et ses applications peuvent avoir des retombées importantes pour la croissance économique et le développement humain durable. Le progrès de la Tunisie, pays à ressources limitées, deviendra plus que jamais tributaire de la production, de la diffusion et de l'utilisation du savoir. La communauté scientifique et les décideurs devraient mettre à profit ce débat pour renforcer la confiance et le soutien publics apportés à la science. Il y a donc une nécessité d'un vigoureux engagement des gouvernements, de la société civile et du secteur productif en faveur de la science, et d'un engagement tout aussi vigoureux des scientifiques en faveur du bien-être de la société.
En affirmant ainsi l'intérêt économique et politique du progrès scientifique et la nécessité pour les gouvernants de ne pas mésestimer la valeur de leurs savants, j'essaye de soulever ici la question de la révolution démocratique en rapport avec l'avenir de la science, du savoir et de la recherche scientifique en Tunisie.
Quatre questions seront posées et analysées. Elles concernent successivement la relation entre la démocratie et la science, la liberté et l'autonomie de la science, les orientations de la recherche en Tunisie et l'édification d'une école tunisienne de pensée scientifique.
Quelles relations existent alors entre science et démocratie? La démocratie repose sur la raison universelle, sur le consentement éclairé à une décision majoritaire et sur un respect de l'autre. En science, pas de séduction, de fascination, d'intimidation et de falsification, toutes souvent à l'œuvre dans la démocratie.
Selon Bruno Escoubès, physicien français, la science et la démocratie sont les deux activités les plus liées à la singularité de l'homme par rapport à l'animal, à sa place dans l'évolution. Il s'agit en fait de la recherche de la connaissance et de la quête des meilleures conditions de la vie en société.
Si la science et la démocratie sont nées d'un même substrat philosophique, elles diffèrent fondamentalement, car la validation en démocratie est la loi du nombre, tandis que la validation en science est affaire de reproductibilité d'un exercice de logique et d'une expérience. La science peut aider à conforter la démocratie, alors que les méthodes de chacune sont bien distinctes : ce n'est pas la majorité qui a raison dans une discussion scientifique, mais celui qui propose le modèle le plus explicatif et le plus prédictif, même s'il est seul contre tous.
Il arrive bien souvent que des régimes totalitaires et non démocratiques s'abritent derrière des rapports de scientifiques choisis par eux pour justifier, au nom de la science, des politiques décidées sans consultation démocratique. L'exemple le plus frappant est celui de Lyssenko : biologiste et agronome soviétique, né en 1898 en Ukraine, qui porte la responsabilité de trente années de totale régression de la génétique, de la biologie et de l'agriculture en URSS.
Simple technicien agricole, sans réelle formation scientifique mais fils de paysans, il incarne parfaitement cette «intelligentsia prolétaire» dont les dirigeants communistes ont besoin pour contrer l'intelligentsia bourgeoise. Dès 1934, il développe des théories qui contredisent la génétique mendélienne et démontrent la transmissibilité des caractères acquis, accusant la théorie chromosomique de l'hérédité d'être métaphysique et réactionnaire. Lyssenko, soutenu par le président de l'Académie des sciences, impose ainsi son pouvoir. Les véritables généticiens sont déportés comme ennemis du peuple et Lyssenko, qui prône la «biologie prolétarienne», accède à tous les honneurs. Plus aucun biologiste n'ose s'opposer à ses théories, et il faut attendre 1965 pour que ses travaux, nourris d'expériences truquées, soient démontés : c'est Sakharov qui dénonce sa responsabilité dans cette abominable et douloureuse période de la science soviétique. Il est alors démis.
La liberté et l'autonomie de la science sont- elles menacées en Tunisie? L'autonomie de la science peut être définie comme la capacité de la communauté scientifique à produire ses propres règles de fonctionnement et à déterminer elle-même ses priorités de recherche, et la façon dont ses recherches doivent être menées puis évaluées, et cela indépendamment des considérations économiques, politiques ou idéologiques. Cette autonomie, défendue par les scientifiques est au cœur de nombreux débats publics et universitaires tunisiens.
En Tunisie, la question de l'autonomie de la science est souvent menacée par les structures de financement qui tendraient à ôter aux chercheurs une part de leur pouvoir décisionnel en matière d'orientation scientifique. La mise en place de fonds attribués sous la forme d'appels d'offres thématisés produit plusieurs effets pervers, dont le plus grave est la perte d'autonomie, pour la communauté scientifique, dans la définition de ses projets de recherche. Si le financement est vital pour impulser des recherches, il devient désastreux dès lors qu'il est prédominant dans un contexte de faiblesse démocratique, car il participe à l'anarchie, entrave l'exploration de domaines originaux pour ne renforcer que des axes devenus thèmes routiniers, favorisant ainsi le conformisme scientifique.
Il est également mentionné ici l'existence d'une autre forme de menace d'autonomie, liées en particulier à la professionnalisation et à la mondialisation de la science ; le système universitaire tunisien s'oriente de plus en plus dans la direction du système occidental.
Cependant, certains scientifiques et universitaires tunisiens s'opposent à l'idée d'une science qui doit rester absolument autonome, sans finalité autre qu'elle-même , et ils appellent par ailleurs les chercheurs à s'ouvrir aux intérêts sociétaux. Cette perte d'autonomie qu'ils encouragent ne se confond pas avec une quelconque dictature de la société sur la science, mais avec une prise en compte volontaire des demandes sociales et économiques par les chercheurs.
Une orientation certaine est que la recherche et le savoir sont le lieu d'une démarche scientifique menée indépendamment des pressions économiques ou sociales, aussi bien qu'elle vise à répondre à des problèmes économiques ou sociaux, quand bien même elle est menée dans un contexte entrepreneurial. Toute soumission, qu'elle soit ou non volontaire, est à rejeter.
Quelles orientations pour une recherche scientifique efficiente en Tunisie? Il est désormais admis que notre système de recherche doit être une priorité nationale car, par ses effets sur la formation et sur l'innovation, il présente un impact positif sur l'ensemble de la société.
Certes, la recherche scientifique en Tunisie est réglementée et organisée conformément aux dispositions d'un arsenal juridique assez important, dont notamment la loi d'orientation n°96-6 du 31 janvier 1996, relative à la recherche scientifique et au développement technologique ; la loi n°2001-50 du 3 mai 2001, relative aux entreprises et pôles technologiques ; la loi n°2000-84 du 24 août 2000 relative aux brevets d'invention ; le décret n°2001-2750 du 26 novembre 2001, fixant les critères et modalités de partage des produits d'exploitation des brevets d'invention ou de découverte revenant à l'établissement ou à l'entreprise publics et à l'agent public chercheur auteur d'une invention ou d'une découverte.
Durant les dernières décennies, différents organes chargés de la gestion et de la coordination du secteur de la recherche scientifique ont été mis en place, dont Le Conseil supérieur de la recherche scientifique et de la technologie ; le Conseil consultatif national de la recherche scientifique et de la technologie ; le Comité national de l'evaluation des activités de la recherche scientifique et le Comité technique de la recherche scientifique et de la technologie.
En dépit de ces réformes et dans la diversité de nos appartenances disciplinaires et de nos convictions politiques, et en totale indépendance vis-à-vis du pouvoir ou des partis, nous pensons que cinq principes fondamentaux devront inspirer toutes réformes légitimes, mais aussi pratiquement motivés de la recherche en Tunisie. Ces principes concernent l'élitisme scientifique, la compétitivité, l'évaluation, le climat de confiance et de liberté et l'esprit critique.
- L'émergence de l'élite scientifique. Les décisions de nature proprement scientifiques doivent être prises par des chercheurs reconnus pour leur compétence, et non par le pouvoir politique ou syndical.
La meilleure recherche internationale est organisée selon ce principe explicitement élitiste, tant au niveau des publications que des financements ou des promotions. La règle démocratique est cardinale dans le choix politique; mais dans le choix scientifique, l'élitisme doit être pleinement assumé, car il est la condition pour que la recherche puisse remplir sa mission d'avancement du savoir.
-La compétitivité. La recherche doit être compétitive sur le double plan de la production des idées et de la rémunération des talents. Pour être compétitive, celle-ci doit avoir toute la flexibilité requise pour donner aux meilleurs chercheurs les meilleures conditions, tant dans le financement de leur recherche que dans leurs conditions salariales. Renoncer à être compétitif sur le plan des rémunérations, c'est aussi renoncer à l'être, à terme, sur le plan des idées.
- L'évaluation transparente. Les individus comme les équipes doivent subir une évaluation régulière, transparente et indépendante. C'est la condition pour que l'innovation soit toujours encouragée et que les chercheurs restent productifs. Dans tous les cas les chercheurs doivent avoir la garantie que les fruits de leur travail seront justement récompensés.
-Le climat de confiance et de liberté. La science a besoin d'un climat de confiance. Des observateurs du développement de la science insistent sur la nécessité de trouver une alliance entre le pouvoir politique et la communauté scientifique afin de baliser le terrain de la valorisation et l'exploitation des résultats et aboutir à une véritable inscription sociale de la science comme priorité. Un système politique fermé et autoritaire ne pourra pas faciliter la recherche, même s'il l'inscrit comme priorité.


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