Ali Hafsi Jeddi appelle de tous ses vœux à une passation de pouvoir. Il se considère d'ores et déjà démissionnaire, ce qui ouvre une nouvelle phase de turbulences à la barre de la FTF, laquelle se retrouve, un an plus tard, dans les starting-blocks Le football tunisien aurait bien aimé faire l'économie d'une nouvelle période d'instabilité au plus haut niveau de ses instances. Il ne fait plus de doute qu'il traverse actuellement l'une des périodes les plus délicates de son histoire : après trois mois d'arrêt forcé, ses compétitions majeures vont reprendre avec des acteurs aux caisses qui crient famine. Fragilisés au niveau financier, les clubs tentent un sauvetage incertain. Le naufrage guette les moins nantis d'entre eux, comme en témoignent les mouvements de grève des joueurs. Le président de la Fédération tunisienne de football a assurément choisi le plus mauvais moment pour annoncer son départ : «Ma décision n'a rien à voir avec des considérations sportives. Elle est, en fait, motivée par des raisons tout à fait personnelles. Ma démission est irrévocable et ne sacrifie aucunement à une quelconque manœuvre dilatoire qui vise à forcer une popularité entamée, par exemple. Le bureau exécutif possède la légitimité des urnes et je ne permets à personne de nous pousser vers la porte de sortie», martèle le patron de la FTF. Parmi ses pairs, M. Hafsi a pu se rendre compte du crédit dont il bénéficie toujours. En effet, en apprenant la nouvelle, les membres de l'exécutif fédéral ont rejeté, au cours de leur réunion marathonienne de mercredi dernier, la démission de leur président. Celle-ci ayant été officiellement transmise à M. Ridha Kraïem, secrétaire administratif de la FTF, il reste au ministère de tutelle de l'avaliser ou non. Les équilibres financiers comme cheval de bataille D'aucuns admettent que la politique des chaises vides risque d'accentuer un peu plus les difficultés de l'heure. La FTF fait, elle aussi, face à une crise financière aiguë à laquelle l'élimination de l'équipe de Tunisie au dernier tour de la Coupe du monde 2010 n'est bien évidemment pas étrangère. Car on peut aisément imaginer ce que le formidable butin de guerre (plus de dix millions de dinars) assuré par une participation à la Coupe du monde aurait pu changer. Le cruel manque à gagner du foot national le précipite aujourd'hui droit vers la chute, d'autant que plusieurs sources de financement des clubs, dont les droits TV, ont subitement arrêté d'apporter leur précieux secours. Or, dès son investiture, M. Ali Hafsi a fait de ce volet financier sa propre affaire, multipliant les initiatives auprès de la fédération internationale (Fifa), des équipementiers et des sponsors de l'équipe nationale pour améliorer les recettes. Il y eut même jusqu'aux matches amicaux livrés par les Aigles de Carthage pour servir de levier afin d'attirer les fonds (dont justement le dernier Oman-Tunisie à Mascate qui a produit une levée de boucliers quant à sa pertinence, son utilité et son intérêt technique). Le président de la FTF a cherché à se doter d'un outil de travail performant. Il abandonne ses espoirs de grandeur sur le rebord des assiettes vides. Ses nombreuses absences à la FTF depuis le début de l'année, le retard qu'il avait mis à rejoindre les Aigles de Carthage lors de leur aventure triomphale au dernier championnat d'Afrique des nations (Chan) réservé aux joueurs locaux, puisqu'il n'avait donné signe de vie qu'à partir des quarts de finale, une fois l'équipe ayant quitté Port Soudan, son quartier général du premier tour, pour la capitale Khartoum : tous ces indices ne laissaient plus l'ombre d'un doute sur le retrait progressif du patron de la FTF. Le retour à la réalité a été brutal pour celui qui mesure que plusieurs fronts sont ouverts aujourd'hui : finances, sécurité dans les stades, arbitrage, avenir très incertain de l'équipe de Tunisie aux éliminatoires de la coupe d'Afrique des nations 2012. La pérennité fédérale et le travail sur la durée en prennent un sévère coup. Après le bureau de M. Kamel Ben Amor, celui de M.Ali Hafsi, élu en mai 2010 pour quatre ans, fait un tour puis s'en va. Chez nos voisins, la stabilité permet d'engager les réformes et de consolider un pouvoir fédéral. C'est le cas du président de la Fédération algérienne, M.Mohamed Raouraoua, et de celle égyptienne, M.Samir Zaher. Tout en admettant que nul n'est indispensable, y compris l'ancien président de la Ligue nationale de football professionnel (LNFP), il faut souhaiter que les prochaines élections, si le retrait de M.Hafsi est consommé, donneront naissance à un nouvel exécutif fédéral à la mesure des espoirs et des attentes de la révolution.