• Mise en place d'une commission nationale indépendante pour l'organisation des prochaines élections • 80 % du budget réservés aux régions intérieures sinistrées et 20 % aux régions côtières • La Constituante élue aura la légitimité nécessaire lui permettant d'élire le Chef de l'Etat, de former le nouveau gouvernement et de consacrer la démocratie, relève M. Caïd Essebsi La première conférence des gouverneurs, après la révolution du 14 janvier, s'est ouverte hier à El Aouina. M. Beji Caïd Essebsi, Premier ministre dans le gouvernement provisoire, a prononcé une allocution dans laquelle il a évoqué la portée des récentes décisions relatives aux prochaines élections de la Constituante adoptées récemment par la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique. Il s'agit aussi des mesures prévues pour dynamiser le développement régional et le secteur de l'emploi. L'institution du principe de parité dans les listes électorales de l'Assemblée nationale constituante est une décision "progressiste et audacieuse", a estimé M. Caïd Essebsi, relevant toutefois que toutes les régions ne seront pas aptes à respecter cette condition, d'où le risque d'annulation de plusieurs listes. Il a proposé l'adoption du principe de la parité au taux de 30% au moins. En ce qui concerne l'exclusion des anciens responsables du Rassemblement Constitutionnel Démocratique des prochaines échéances électorales, M. Caïd Essebsi a souligné que cette décision, bien qu'elle soit importante, risque toutefois de provoquer un déséquilibre du paysage politique et qu'elle ne serait d'aucun apport pour les partis nouvellement créés. Cette décision, a-t-il estimé, servira plutôt les intérêts d'un parti ou d'une catégorie déterminée. Il a appelé à approfondir la réflexion autour de cette question, de poursuivre la discussion et d'être à l'écoute de toutes les parties. Cette question fera l'objet d'une décision vendredi prochain. Certains partis politiques, a-t-il dit, sont plus "actifs et mieux préparés que les autres" pour s'engager dans la vie politique et les prochaines échéances électorales. Il s'agit d'un aspect qui devrait être pris en considération afin d'assurer les meilleures conditions de l'opération électorale loin de toutes formes d'abus, a-t-il soutenu. Une commission nationale indépendante pour l'organisation des prochaines élections sera mise en place prochainement en vue de superviser les élections en collaboration avec l'ONU, l'Union européenne et des experts, a-t-il précisé. L'impulsion du développement régional a été aussi au centre d'intérêt de M. Caïd Essebsi. Le gouvernement provisoire, a-t-il indiqué, veillera durant le mois de mai prochain à éradiquer le déséquilibre régional en matière de développement. 80% du budget seront réservés aux régions intérieures sinistrées et 20% aux régions côtières, a-t-il précisé. Un programme d'emploi exceptionnel sera aussi mis en place en coordination avec les entreprises économiques pour créer 60 mille postes d'emploi. Ce programme exceptionnel vise à assurer le recrutement de 20 mille personnes dans la Fonction publique, 20 mille dans le secteur privé et 20 mille seront recrutés pour renforcer les rangs de la sécurité nationale et de l'armée. Le nombre des demandeurs d'emploi atteindra 700 mille au cours de 2011. Mission difficile et délicate Sur un autre plan, M. Béji Caïd Essebsi s'est dit fier de la révolution pacifique du peuple tunisien. C'est un événement d'envergure qui a retenu l'attention du monde entier. Il s'agit d'une révolution qui a inspiré de nombreux peuples arabes bien qu'elle fût spontanée, sans background idéologique, sans appui de l'étranger et sans leadership, affirmant que le succès de la transition démocratique nécessite l'abnégation, le sacrifice et un sens patriotique aigu. La mission du gouvernement provisoire consiste à gérer les affaires courantes du pays et à préparer le terrain pour le prochain gouvernement, a-t-il estimé, afin de pouvoir réaliser les objectifs de la révolution et consacrer la démocratie. Il s'agit d'une mission "difficile et délicate", a-t-il soutenu, en raison de la dégradation de la situation dans le pays et de la dérive sécuritaire médiatique. Le rétablissement de la sécurité est une condition fondamentale pour la réalisation des réformes politiques, économiques et sociales, a ajouté M. Caïd Essebsi. Il s'agit de sortir de "l'impasse" que connaît le pays et de rétablir le processus économique par l'attraction des investissements étrangers et l'impulsion du secteur touristique. Le succès des élections de la Constituante, le 24 juillet 2011, "est un pari difficile qu'il est possible de gagner grâce à une volonté sincère", a déclaré M. Caïd Essebsi, ajoutant que la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique a examiné plusieurs projets de décrets-lois dont celui de l'établissement des règles de l'opération électorale de la Constituante. Les prochaines élections auront un impact décisif sur l'évolution du pays, dit-il, du fait que la Constituante élue aura la légitimité nécessaire lui permettant d'élire le chef de l'Etat, de former le nouveau gouvernement et de consacrer la démocratie. Il a, dans ce sens, émis l'espoir de voir ces élections se dérouler dans la transparence, la liberté et en rupture complète avec les agissements de l'ancien régime mettant fin à un régime autocratique et permettant d'évoluer vers un régime réellement démocratique. Plusieurs gouverneurs ont évoqué, lors de la séance d'ouverture, des questions en rapport avec la vie politique. Le gouverneur de Tataouine a souligner l'impératif de tenir compte du principe de la parité pour ce qui est des têtes de liste. Il a ajouté que la décision d'exclure les anciens responsables du Rassemblement constitutionnel démocrate (RCD-dissous) "pénalise certains éléments propres et compétents dont le pays a besoin". Les gouverneurs de Kasserine, Gafsa et Médenine ont, de leur côté, dénoncé certains courants qui cherchent à entraver l'activité du gouvernement provisoire et à faire échouer l'opération électorale et la transition démocratique en Tunisie. Ces parties, ont-ils précisé, cherchent à semer le désordre en organisant des sit-in et en troublant l'ordre public. Ils ont proposé de soumettre à référendum les décisions relatives à l'exclusion des responsables du RCD et à la parité. Le gouverneur de Tunis a appelé à préparer minutieusement les prochaines élections. Le gouverneur du Kef a attiré l'attention sur l'intensification des activités de certains partis politiques en l'absence de la sécurité, appelant à mettre fin à ces pratiques et à garantir le déroulement des élections en toute sécurité. Les travaux de la conférence des gouverneurs se sont poursuivis à huis clos. Au programme, des interventions de plusieurs membres du gouvernement provisoire concernant des questions sectorielles, nationales et régionales. Il s'agit aussi des programmes en cours en vue de dynamiser le processus de développement et l'emploi dans les différentes régions du pays.