Kaïs Saïed, jeunes médecins, condamnations…Les 5 infos de la journée    Oui, des Israéliens fuient par l'Egypte, mais pas de "réfugiés" installés dans le Sinaï    30 ans de la FIPA : la Tunisie capte plus de 45 milliards d'euros d'IDE    Séisme de magnitude 5,1 frappe le nord de l'Iran    Fausse gifle, vraie manipulation : ce que cache la campagne contre Hend Sabry    El Amra : les autorités démantèlent un nouveau camp de migrants subsahariens    Les musées militaires tunisiens ouvrent leurs portes gratuitement ce dimanche    Agression sioniste: l'Iran continue d'exercer son droit à la légitime défense    Où voir Espérance de Tunis – Los Angeles FC ce soir ?    Aziz Dougaz en route vers les quarts de finale au tournoi M25 de Monastir    Israël, l'Occident et l'hypocrisie nucléaire : le sale boulot à deux vitesses    Face au chaos du monde : quel rôle pour les intellectuels ?    Festival arabe de la radio et de la télévision 2025 du 23 au 25 juin, entre Tunis et Hammamet    Révision des dispositions relatives au crime de détournement de fonds : examen des propositions d'amendement de l'article 96    Ons Jabeur battue au tournoi de Berlin en single, demeure l'espoir d'une finale en double    Carrefour Tunisie lance le paiement mobile dans l'ensemble de ses magasins    Sfax : la plateforme « Najda TN » sauve 5 patients d'une crise cardiaque    Céréales : une campagne prometteuse malgré les aléas climatiques    Fraude fiscale : un taux estimé à 50%, selon Mohamed Salah Ayari    Microsoft le dit : nos journées de 12h nous rendent moins efficaces    WTA Berlin Quart de finale : Ons Jabeur s'incline face à Markéta Vondroušová    Caravane Soumoud de retour à Tunis : accueil triomphal et appels à soutenir la résistance palestinienne    La justice contre Sonia Dahmani : autopsie d'un acharnement    Après le succès de sa grève, l'Organisation Tunisienne des Jeunes Médecins brandit la menace d'escalade    Météo en Tunisie : légère hausse des températures    15 ans de prison pour le nahdhaoui Sahbi Atig    CUPRA célèbre le lancement du Terramar en Tunisie : un SUV au caractère bien trempé, désormais disponible en deux versions    AMEN BANK, solidité et performance financières, réussit la certification MSI 20000    Mehdi Ben Gharbia condamné à 8 ans de prison pour corruption financière    Un drone "Heron" de l'entité sioniste abattu par les défenses aériennes iraniennes    Kairouan : une ambulance attaquée en pleine nuit avec un mortier    Mourir à vingt ans aux frontières de l'Europe : quand la solidarité est criminalisée    Médina de Tunis : des commerces sanctionnés pour non-respect des règles d'hygiène    Grève annulée à la CTN : un accord in extremis entre le ministère et le syndicat    Grève générale dans le secteur agricole tunisien prévue le 25 juin : la fédération lance un avertissement    Kaïs Saïed : un ancien ministre se permet de donner des leçons alors que c'est un escroc !    Joséphine Frantzen : rapprocher la Tunisie et les Pays-Bas, un engagement de chaque instant    Kaïs Saïed, Ons Jabeur, Ennahdha et Hizb Ettahrir…Les 5 infos de la journée    US Monastir : Faouzi Benzarti confirmé pour la saison prochaine    Berlin Ons Jabeur en quarts de finale face à Markéta Vondroušová    Skylight Garage Studio : le concours qui met en valeur les talents émergents de l'industrie audiovisuelle    Festival Au Pays des Enfants à Tunis : une 2e édition exceptionnelle du 26 au 29 juin 2025 (programme)    Découvrez l'heure et les chaînes de diffusion du quart de finale en double d'Ons Jabeur    Le Palais de Justice de Tunis: Aux origines d'un monument et d'une institution    Skylight Garage Studio : Le concours qui met en valeur les talents émergents de l'industrie audiovisuelle    Salon international de la céramique contemporaine du 20 juin au 15 juillet 2025 à la médina de Tunis    Tunisie : Fin officielle de la sous-traitance dans le secteur public et dissolution d'Itissalia Services    La Tunisie mobilise les soutiens en faveur de son candidat l'ambassadeur Sabri Bachtobji, à la tête de l'Organisation Internationale pour l'Interdiction des Armes Chimiques (OIAC)    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Halte à la déferlante réactionnaire et rétrograde
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 31 - 05 - 2011


Par Fayçal ABROUG*
Un rappeur qui mérite amplement son surnom a tenu, lors d'un meeting, des propos pouvant obtenir facilement droit de cité dans un discours fasciste et néonazi, devant un parterre surexcité — du moins en partie au regard des images diffusées, à titre d'information, par quelques chaînes de télévision — et prêt à en découdre par les armes avec un cinéaste tunisien désigné nommément sous les cris hystériques d'Allahou Akbar, et prêt probablement à lapider les mécréants de tous bords : cinéastes, hommes et femmes de théâtre, acteurs et actrices, écrivains, poètes, chanteurs, peintres, et la liste est loin d'être exhaustive. Je parle délibérément de propos et non de chanson et encore moins de musique. De fait, il lance un appel au meurtre, à la liquidation à la kalachnikov du cinéaste dont il ne partage pas les opinions, si on peut parler en l'occurrence d'opinion.
Ce rappeur dont le rap est, semble-t-il, monnayé politiquement par certains, n'est malheureusement pas un cas isolé; d'autres aussi, selon ceux qui connaissent ce milieu, sont adeptes de l'idéologie de la mort, quoique d'une manière timorée.
En attestent les propos tenus par un autre rappeur, propulsé au rang de héros national, voire international, sur un plateau de télévision, dimanche 22 mai, sur une chaîne qui s'est intronisée vox populi et qui nous rappelle inlassablement, avec une modestie au-dessus de tout soupçon, à travers un slogan publicitaire annonçant la rediffusion d'anciennes émissions, ne pas avoir attendu le 14 janvier ! Propos destinés à justifier ceux de son confrère et que je traduis textuellement : «Je ne crois pas que Psycho M veut vraiment tuer Nouri Bouzid. C'est du sens figuré», et il ajoute qu'il n'est pas d'accord avec le cinéaste parce qu'«il dévie les jeunes vers la mentalité occidentale et que ce qu'il fait ne respecte pas l'Islam».
Selon un proverbe arabe, la justification est pire que la faute car dire qu'il faut prendre au sens figuré les propos de son ami, c'est conférer à ces propos une valeur symbolique et dire donc, consciemment ou inconsciemment, que la mise à mort du cinéaste est une mise à mort symbolique, autrement dit c'est une mise à mort de tout ce qu'il incarne, à tort ou à raison, comme choix culturels et esthétiques, en un mot comme projet de société.
Quant à l'argumentaire autour du respect du contexte arabo-musulman que des inquisiteurs, toutes écoles confondues, brandissent à tout bout de champ pour censurer toute création artistique, qu'il s'agisse de littérature, de théâtre, de cinéma ou d'arts plastiques, pour peu qu'elle ne corresponde pas à leur vision du monde, un monde obsolète, il mérite qu'on s'y arrête ne serait-ce que pour ne pas se cantonner dans le champ étroit du rap et dévoyer ainsi la réflexion dans une polémique terre à terre et stérile. Un argumentaire fallacieux car il participe d'une vision figée et réductrice du référent culturel arabo-musulman parce que généralisante et anhistorique. Une vision idyllique qui transforme un passé révolu en un tout indivisible, une entité d'une homogénéité sans faille et d'une pureté immaculée sur le plan linguistique, culturel et religieux, occultant ainsi les différences, les divergences, voire les conflits entre les diverses doctrines religieuses, les écoles d'exégèse, les courants de pensée, sans parler des influences culturelles subies au contact des us et coutumes des contrées conquises. Faire valoir cet argumentaire, c'est réduire donc une civilisation arabo-musulmane plurielle à sa seule expression métaphysique et théologique, elle-même, faut-il le répéter, plurielle; c'est surtout nier la diversité et la richesse d'un patrimoine culturel qui a su traverser l'histoire de l'humanité dans une interaction créatrice avec les autres langues et les autres cultures; un patrimoine partie prenante de la civilisation universelle à laquelle des Arabes et des musulmans d'une autre trempe ont contribué sans complexe et sans les obstacles moraux factices dressés, de nos jours, par des esprits chagrins qui pleurent un passé révolu idéalisé en dehors de toute lecture historique objective qui permette d'appréhender le présent et d'envisager l'avenir.
El Hallaj, Ibn Rochd, Ibn Khaldoun, Ibn Hazem, El Maâri, Abou Nawas, pour ne citer pêle-mêle que ceux-là, des références entre autres notoires de notre patrimoine culturel, dont certains avaient été jugés hérétiques par les censeurs de leurs époques respectives, seraient-ils le produit d'un complot interplanétaire ourdi par l'Occident mécréant et débauché à l'encontre de l'Islam et des musulmans ?
Et puis, si, on devait énumérer tout ce qui, dans la civilisation moderne et postmoderne, s'accommode très mal de la culture arabo-musulmane vécue comme un carcan immuable, la liste risque d'être un peu longue, à commencer par le rap.
Où irions-nous si on laissait les vannes ouvertes à cette déferlante réactionnaire et rétrograde qui cherche à tirer parti de la précarité de la situation post-révolution pour inonder les plages paisibles d'une contrée à la civilisation millénaire ? Allons-nous avoir, à l'instar de certains pays «frères», une brigade des mœurs qui choisit pour nous les chansons à écouter, les feuilletons, les films et les pièces de théâtre à voir ou les livres à lire ? Des iconoclastes d'un autre âge ne se sont-ils pas spécialisés, outre la vindicte et le lynchage médiatique, dans les procès spectaculaires intentés, pour un oui pour un non, à des actrices, cherchant par des actions en justice à suspendre la diffusion d'un feuilleton télévisé (El Jamaâ; El Messih, Youssef Assedik) ou à empêcher la réédition d'un livre, Les Mille et une Nuits ?
Peut-on dire, en plagiant Jean Ferrat, qu'en Tunisie on peut dormir à l'abri ?
Pour revenir à mon propos de départ, à savoir cette forme singulière de rap, je tiendrais, en tant que citoyen, pour complice toute radio, toute chaîne de télévision qui diffuserait ce vomi de haine, cette culture de la négation de l'autre, fût-elle servie sous le label du sacré.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.