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Quand le ministre de l'Education surfe sur la vague du populisme
OPINIONS
Publié dans La Presse de Tunisie le 14 - 02 - 2011


Par Faïçal ABROUG*
Si parmi les membres du gouvernement constitué après la Révolution populaire du 14 janvier dans ses deux versions, d'abord d'unité nationale puis provisoire, il y a un ministre donné gagnant d'emblée c'est bien entendu M. Taïeb Baccouche‑: un crédit qu'il doit à sa renommée dans les milieux intellectuels et syndicaux, de brillant universitaire, de militant syndical (ancien secrétaire général de l'Ugtt durant la sombre époque des années 70 du mouvement syndical) et d'homme intègre. Mais tout le monde, sauf bien sûr ses inconditionnels partisans, a dû rapidement déchanter.
D'abord, et dans le cadre de ce bal des ministres d'un plateau de télévision à l'autre qui marque, me semble-t-il, le passage d'un excès à l'autre : d'une opacité totale à une transparence donnant lieu à toutes les improvisations et à toutes les maladresses, d'abord donc, ses fréquents passages à la télévision sur différentes chaînes à la fois en tant que porte-parole du gouvernement et en tant que ministre de l'Education ont banalisé (parfois agacé) ses interventions médiatiques perçues par certains comme un désir, voire une volonté, de visibilité.
Ensuite, et c'est là le clou de l'histoire, le fameux dossier consacré à l'éducation par la télévision nationale il y a quelques jours, et auquel ont pris part des élèves de différentes régions, de différents niveaux (école de base, école préparatoire, lycée), et bien entendu le ministre de l'Education et son staff.
Il est inutile de revenir sur les critères de choix des participants car il n'a échappé à personne, et en particulier aux parties concernées (enseignants, inspecteurs et leurs structures syndicales respectives), qu'il s'agit là de pratiques obsolètes qui ont malheureusement la peau dure et qui nous renvoient non seulement à l'époque de Ben Ali mais à une époque bien antérieure présentée souvent et a posteriori comme un paradis, sans doute à cause de son vernis moderniste, de son ouverture culturelle sur l'Occident et de quelques soupapes de sécurité : celle de Bourguiba, celle-là même qui a, toutes proportions gardées, a fait le lit du régime de Ben Ali.
En revanche, ce qui retient l'attention, ce sont les propos tenus par les élèves qui vont des élucubrations les plus fantaisistes et les plus contradictoires (celui qui veut amputer les programmes d'un certains nombre de chapitres, celle qui désire aller au bout du programme sans renoncer aux vacances ou encore celui qui souhaite que le taux de réussite au baccalauréat atteigne les cent pour cent parce qu'il s'agit de la génération de ceux qui ont fait la révolution!) jusqu'à l'évaluation, sans retenue ni pudeur, des pratiques pédagogiques — ni plus ni moins‑— des enseignants, sans parler des jugements de valeur à leur encontre. Peut-on s'attendre à autre chose qu'à des débordements de tout genre compte tenu des spécificités du contexte post-révolutionnaire pour ne pas faire de procès d'intention à personne même s'il y a lieu d'en douter‑? Car comme cela a été signalé supra, il s'agit de pratiques éculées (le ministre a-t-il été mal conseillé?) qui consistent à livrer au lynchage médiatique et à la vindicte populaire un bouc émissaire, en l'occurrence les enseignants toutes catégories confondues.
Il ne s'agit nullement d'un déni du droit légitime des élèves à la parole libre, à la critique et à la protestation, encore faut-il que cela se déroule dans un cadre bien déterminé puisque la présence du ministre confère à la rencontre un aspect officiel : une association, une représentation syndicale, au travers de rencontres avec le ministère de tutelle et non dans un show médiatique. D'ailleurs, la réponse ne s'est pas fait attendre : grèves des enseignants, rassemblements devant le ministère de l'Education de toutes les parties concernées‑: instituteurs, professeurs, inspecteurs, conseillers en orientation et même des élèves, en tout cas ceux qui sont conscients des véritables enjeux. Ici, une remarque me traverse l'esprit‑: chaque fois qu'un responsable politique prend la parole, il galvanise sans le vouloir la foule qui envahit ipso facto la rue et prend d'assaut les institutions de l'Etat. A ce titre, le Tanit d'or va incontestablement à l'ex-président Ben Ali qui a réussi à drainer une foule immense qui grossissait vertigineusement au fil de ses allocutions télévisées (stratégie dont Hosni Moubarak a été le plus grand bénéficiaire), le Tanit d'argent revient de droit à M. Taïeb Baccouche au regard des grèves, des manifestations et des rassemblements mentionnés plus haut.
J'ajouterais, dans le même ordre d'idées, que le gouvernement provisoire a ouvert une boîte de Pandore en parlant de mesures voire de réformes politiques, économiques et sociales (ce qui est en contradiction avec son caractère provisoire) et en demandant aux gens de déposer leurs dossiers, toutes requêtes confondues, auprès des services concernés. Le résultat est sans équivoque. Des foules empressées, parfois hystériques, une marée humaine qui prend d'assaut les institutions de l'Etat (ministères, sièges des gouvernorats et des délégations) ainsi que les sièges de l'Ugtt pour faire parvenir, et c'est tout à fait légitime, leurs revendications et leurs doléances.
La dernière annonce en date demande aux étudiants de présenter un dossier pour obtenir 500 cents dinars en guise d'allocation ou d'aide.
Pour revenir à notre préoccupation première, à savoir le chantier qui règne au ministère de l'Education nationale, le premier constat est que le show médiatique qui joue sur l'émotionnel et le pathétique n'a fait qu'accentuer les divergences, d'autant que ceux qui sont aux commandes sont toujours les mêmes, pis encore, des retraités reprennent du service, j'ai nommé certains membres de la fameuse «cellule de crise», ceux-là mêmes qui ont survécu à tous les remaniements ministériels, qui pratiquaient le clientélisme, qu'il s'agisse de la conception et l'élaboration de programmes, qu'il s'agisse des examens scolaires et professionnels ou des diverses commissions en charge de dossiers relatifs à l'éducation, et à qui l'on doit depuis 1991 au moins, les réformes, les contre-réformes, les réaménagements et les réajustements; un processus qui a abouti en 2002 à la Nouvelle Réforme du système éducatif tunisien et à la Nouvelle loi d'orientation.
Mais à peine le chantier de la mise en œuvre est-il engagé que l'on renonce déjà à des choix pédagogiques présentés — avec une étonnante habileté à défendre la chose et son contraire ­— comme la panacée universelle à tous les problèmes dont souffre le système éducatif tunisien depuis des décennies. A titre d'exemple, l'approche par compétences dans l'enseignement secondaire, les apprentissages optionnels, l'enseignement à filières…
C'est pourquoi, lorsque j'entends tout le monde — celui qui sait et celui qui ne sait pas — incriminer avec une aisance déconcertante le caractère transmissif et magistral de notre enseignement, je réponds si seulement ! Car ce dont souffre notre enseignement c'est plutôt l'improvisation, l'hésitation et l'adhésion complaisante et politiquement correcte aux nouvelles théories de l'apprentissage et à toutes les innovations pédagogiques dont le bien-fondé didactique et pédagogique n'est point à démontrer mais qui sont mises à mal par une application entachée de précipitation, de parachutage et de généralisation immédiate par décret ministériel voire présidentiel. D'ailleurs, approche par compétences, constructivisme, socioconstructivisme sont souvent des enseignes lumineuses qui cachent une arrière-boutique de brocanteur et qui trahissent une politique de vitrine. A ce titre, et sans entrer dans les détails techniques, trois concepts pédagogiques ont fait florès dans les milieux des enseignants, des conseillers pédagogiques, des inspecteurs, des conseillers en orientation, et tout particulièrement dans les milieux officiels: l'élève est le centre de l'acte éducatif; apprendre à l'élève à apprendre; la pédagogie de la réussite (je ne sais plus quel didacticien a lancé cette boutade: à force d'apprendre à apprendre, on a fini par ne plus rien apprendre). Si les deux premiers sont souvent réduits à des slogans qui servent à meubler, par effet de mode, les discours officiels ou alliés, le troisième, lui, est très nocif pour une simple raison: il a servi d'alibi pour baisser le niveau d'exigence en matière d'évaluation (tests, devoirs de synthèse, examens nationaux, sans parler des 25% et des conditions de rachat) en vue de gonfler les notes, de fausser les résultats et atteindre in fine, le taux artificiel de 84% préalablement établi par le «programme électoral du président Ben Ali». Conséquence‑: la «démocratisation de la réussite» est devenue «médiocritisation» de l'enseignement.
Pour conclure — car il en est temps — je reviens à mon point de départ pour dire qu'il faut rompre avec toutes les pratiques qui portent préjudice à l'institution éducative, celles qui sapent les fondements mêmes de la relation unissant l'élève à l'enseignant, à savoir la confiance, le respect mutuel et le partenariat; celles également qui consistent à arrêter les choix pédagogiques et didactiques, à prendre des décisions et des mesures d'une manière unilatérale sans consultations préalables des différentes parties concernées (je n'en veux pour preuve que les récentes mesures, indépendamment de leur légitimité ou non, concernant le Capès).
Peut-on, cependant, rompre avec ces pratiques sans s'affranchir du carcan administratif mis en place depuis des décennies et sans rompre avec ceux qui en sont les artisans, les symboles et la référence ?
* Ancien inspecteur pédagogique et syndicaliste


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