Une conférence internationale sur le thème «Corruption et malversation : que faire ?» sera organisée du 22 au 24 septembre à Hammamet (hôtel Mehari) par la commission nationale d'investigation sur la corruption et la malversation avec le concours d'organisations internationales comme l'Organisation de coopération et du développement économiques (Ocde), le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), le Groupe de la Banque africaine de développement (Bad), la Délégation de l'Union européenne... C'est ce qu'a déclaré hier M. Abdelfattah Amor, président de la commission lors d'un point de presse tenu avec les membres de cette structure. La conférence en question est articulée autour de certains thèmes à savoir «Dire la vérité», «Rendre justice», «Etablir des mécanismes de lutte et de prévention», «Modifier la législation», «Impliquer la société civile» et «Recouvrement des avoirs mal acquis». A la fin de la conférence, une synthèse des travaux et des recommandations sera lue. Pour l'organisation de cette conférence, la commission n'a voulu s'adresser ni aux sociétés privées ni aux autorités publiques pour obtenir des fonds, et ce, dans un souci d'indépendance. Seules les organisations internationales prennent en charge tous les frais d'organisation. Difficultés d'éradiquer la pauvreté Des experts provenant de plusieurs pays étrangers comme la Pologne, de France, des organisations internationales et, bien sûr, de Tunisie vont présenter des communications. La commission compte ainsi profiter de cet échange d'expériences réussies. Cela va permettre aussi de confronter les expériences de pays arabes et occidentaux afin de mieux préparer les textes et l'environnement économique, juridique, administratif et social dans le sens d'une meilleure lutte contre la corruption. La corruption, comme l'a indiqué l'orateur, a des effets négatifs sur la croissance économique et le développement dans la mesure où elle constitue un obstacle important à l'investissement national mais aussi étranger. D'où la difficulté d'éradiquer la pauvreté et le chômage. La corruption ne permet pas, non plus, d'asseoir un vrai régime démocratique, ni d'assurer l'équité entre les citoyens. Il est nécessaire donc de comprendre de façon approfondie les mécanismes et outils utilisés par certains responsables tunisiens pour s'enrichir massivement. Les organisateurs de la conférence comptent aussi engager une réflexion au sujet des moyens préventifs et des instruments de contrôle et de correction à mettre en place. Pour M. Amor, «la Tunisie a besoin d'une nouvelle législation, de nouvelles règles et de nouveaux systèmes pour prévenir les mauvaises pratiques et les comportements délictueux». Il s'agit aussi de définir des mécanismes d'échange d'informations entre les divers secteurs et autorités publiques et privées. Une stratégie d'information et de communication sur la corruption sera donc déterminée en plus des mesures de lutte contre ce phénomène. L'objectif consiste, par ailleurs, à renforcer la transparence au sein du gouvernement et de l'administration publique et entre ceux-ci et les citoyens tunisiens sur la base d'un cadre législatif et institutionnel clair. Un mécanisme de prévention et de lutte contre la corruption et la malversation sera défini en s'inspirant des expériences réussies de par le monde. «La Tunisie doit mettre en oeuvre un cadre législatif et institutionnel pour renforcer la prévention de la corruption et sa répression», propose M. Amor. C'est ainsi qu'on peut espérer consolider la confiance entre l'administration et les administrés. L'implication des citoyens et de la société civile dans la lutte contre les pratiques illégales est capitale. Il est donc nécessaire de consulter les citoyens et d'organiser des campagnes de communication et d'information, et ce, dans le sens de l'élaboration et le suivi des politiques de lutte contre la corruption. On compte aussi identifier les bonnes pratiques pour mieux impliquer la société civile dans la collecte des données destinées aux organes de lutte contre la corruption, de fournir des informations crédibles et fiables, d'associer les citoyens et le secteur privé à l'élaboration des politiques y afférentes. Par ailleurs, M. Abelfattah Amor a indiqué qu'environ 10.000 dossiers sont parvenus à la commission dont plus de 4.000 ont été étudiés. Certaines administrations ont été contactées en vue de régulariser certaines situations alors que 223 dossiers ont été transmis à la justice. «Ce sont des dossiers complexes et dangereux», relève l'orateur. Et de rappeler que la commission vérifie l'information parvenue de façon minutieuse, sachant que plusieurs dossiers émanant de certains citoyens ne font pas partie des prérogatives de ladite commission et les intéressés en sont informés. Une proposition a été formulée aux autorités en vue de créer une commission permanente pour la lutte contre la corruption et la malversation. «Actuellement nous travaillons bénévolement pour l'intérêt de la Tunisie», souligne l'orateur. En fait, la commission est dotée surtout de ressources humaines compétentes pour traiter les dossiers qui lui parviennent. La commission préfère que les affaires passent par les tribunaux pour qu'ils disent leur dernier mot avant d'être publiés dans la presse. M. Ridha Gouiaa, membre de la commission, a indiqué, de son côté, que «la Tunisie a réalisé sous l'ancien régime une croissance économique de 5,2%. S'il n'y avait pas de corruption et de malversation, ce taux aurait pu être porté à 6 ou 7,5%». Les investissements directs étrangers, selon ses dires, ne peuvent pas se développer dans un climat malsain. D'ailleurs, plusieurs grandes entreprises ont préféré plier bagage en constatant la mauvaise gouvernance. Même les touristes ne sont pas prêts à réserver dans des hôtels soi-disant 5 étoiles alors qu'ils ne sont en réalité que de catégorie de 2 étoiles. On ne pouvait pas reclasser ces unités par ce qu'elles appartenaient aux proches du président déchu.