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Pourquoi a-t-on si peur du référendum constitutionnel ?
Publié dans La Presse de Tunisie le 07 - 10 - 2011

«Toute loi que le peuple en personne n'a pas ratifiée est nulle; ce n'est point une loi.» (Jean-Jacques Rousseau)
Par Jamil SAYAH*
On est toujours fondé à déduire d'un évènement les conséquences qu'il comporte. Aujourd'hui, l'enjeu de l'élection de l'Assemblée constituante du 23 octobre se présente comme une invitation pour notre peuple à transcender une nouvelle frontière, à l'intérieur de ses propres structures, afin de donner corps à une pratique citoyenne nouvellement conquise. En effet, cette deuxième "Révolution" offre l'occasion aux Tunisiens d'élire des hommes et des femmes qui auront la charge politique de traduire juridiquement, sous forme d'une Constitution, leur projet de société. A la racine de ce nouvel ordre démocratique, se rencontrent deux hypothèses ; en elles deux regards opposés sur le fondement de légitimité de la production normative dans une société démocratique. Le premier d'entre eux concerne la source de la volonté générale. De ce point de vue, la volonté générale apparaît comme celle du "corps du peuple". Elle doit partir de tous et, à travers elle, c'est tout le peuple qui statue sur lui-même : le référendum. Mais, la volonté générale peut également être définie à l'aide d'un second critère qui admet que la voix du peuple pourrait être portée par des représentants démocratiquement désignés : la démocratie représentative. Ce débat politique devait nous inciter à repenser le rapport entre nos gouvernants et la démocratie. Car les institutions ne sont parfois que le masque derrière lequel s'exprime une tyrannie.
L'argument "vous élisez des conseillers vous participez à l'installation de la démocratie" a certes pour lui l'intérêt et la force de la simplicité, mais il est porteur d'une ambiguïté certaine. Dans sa logique, le principe de souveraineté impliquerait que les décisions prises par l'Assemblée constituante soient l'expression de la volonté générale de la nation et la Constitution la traduction de la volonté des citoyens ou, tout au moins, des citoyens "actifs" investis des droits politiques qui leur permettraient de participer à l'exercice de la souveraineté nationale. Dans cette perspective, le peuple apparaît comme l'association volontaire d'individus qui choisissent une forme de gouvernement susceptible de mettre en œuvre leur volonté commune et détiennent, en tant que citoyens, une parcelle de la souveraineté leur assurant, à travers la désignation de leurs représentants, le droit de prendre part à l'élaboration de la Constitution. Une telle conception permet en effet de relativiser la tension entre principe d'unanimité et principe de majorité.
Cependant, on peut se demander si les partis politiques qui la soutiennent mesurent la portée des contradictions dont elle est porteuse. Ils feignent de voir que les élections du 23 octobre ne sont point des élections législatives, mais une procédure aboutissant à désigner un pouvoir constituant. Alors les votants choisissent-ils un projet de société ou bien des représentants qui voudront leur place ? L'interprétation du juriste est ici moins importante que le sentiment commun. Il est certain au regard de nos concitoyens que voter est un droit. Il est en revanche non moins certain qu'ils ont conscience qu'en choisissant un homme ils auront à choisir une vision politique et un projet de société qui va les engager pour l'avenir et pour longtemps. De ce décalage, les partis sont cause ; et la conséquence, c'est que le régime de souveraineté représentative ne pourrait servir d'outil exclusif pour l'adoption d'une Constitution. Si la participation d'une masse (populaire) souvent ignorante de "la chose constitutionnelle" n'était pas sans inconvénients, ils seraient largement rachetés par la guérison graduelle de cette ignorance en la sollicitant à valider le projet que son élite aurait confectionné. C'est là le plus noble des arguments en faveur de la démocratie. Mais certaines formations politiques, en gens avisés, ne semblent pas croire en la vertu de cette vision. Cette position appelle à cet égard une sévère critique.
Tout le monde est convaincu que notre pays est encore en convalescence. Il sort d'une dictature policière d'une cruauté sans précédent qui a laminé pour s'imposer l'espace politique en le réduisant en un lieu d'une pensée unique. Point de pluralisme ni de concurrence. A la sortie, aucune formation politique ne pourrait aujourd'hui se détacher des autres pour mettre les fondations d'un projet de société capable de bénéficier de l'adhésion de tous les citoyens. Les élections à venir ne sont pas alors regardées comme devant apporter à l'Assemblée des talents nouveaux mais comme devant renforcer le groupe politique auquel on appartient. Il en résulte un avilissement pour l'électeur. On voit en lui le poids qu'il peut jeter dans l'un ou l'autre plateau de la balance. Il faut lui arracher par n'importe quel moyen la voix dont il dispose. La grande préoccupation des partis est de capter les électeurs que chacun pense avoir séduits, et aller le jour du vote les chercher, de peur qu'ils ne négligent d'apporter l'appoint. Ce phénomène renforce la logique "d'appareil" et entérine le déplacement du débat politique vers les médias (la propagande). En ce sens, ce qui semble se dessiner c'est moins le spectacle d'un peuple exerçant fièrement ses droits de citoyen que celui de factions politiques racolant par tous les moyens les suffrages qui pouvaient donner le Pouvoir. Ainsi, le prétendu souverain (le peuple) n'est plus ce qui doit couronner un édifice politique à venir, mais le pivot d'un édifice arbitrairement simplifié. Tandis que tous les partis engagés dans la compétition électorale ne cessent de proclamer la souveraineté du peuple, ils le resserrent exclusivement aux choix de délégués qui auront l'exercice plénier. Les Tunisiens ne seront citoyens qu'un jour et spectateurs six mois. Car le prétendu "Pouvoir constituant du Peuple" n'est relié au peuple que par le cordon ombilical très lâche des élections de la Constituante. Il n'est effectivement qu'un "Pouvoir sur le peuple". Mais d'autant plus grand qu'il s'autorise précisément de légitimer ce cordon.
Or, on sait que la légitimité du droit et la légitimation des processus de son édiction sont une chose, la légitimité d'un ordre de domination et la légitimation de l'exercice du pouvoir politique en sont une autre. Les normes constitutionnelles qui se construisent aux moyens d'une légitimation fictive souffriront toujours d'un déficit de légitimité réelle. Mais cela n'implique pas pour autant une abrogation du pouvoir constituant. S'il s'exerce, il peut chercher à construire après coup d'autres fondements de légitimation. Et le recours au peuple constitue l'un des procédés les plus utiles en la matière. Car en démocratie, le peuple est le sujet du pouvoir constituant. Toute Constitution démocratique présuppose que ce peuple soit capable d'action. Cela implique alors que si le pouvoir veut donner un semblant de légitimité démocratique à une réforme quelconque, il fera appel à des procédures de nature à permettre au peuple d'intervenir soit au stade de l'adoption, soit au stade de la préparation de la réforme. La procédure principale de ce type de démocratie (démocratie semi-directe) est le référendum, c'est-à-dire la consultation des électeurs sur une mesure constitutionnelle ou sur une mesure législative. Un résultat positif étant nécessaire pour que la mesure soit parfaite, il peut se situer avant (référendum de consultation) ou après (référendum de ratification) l'édiction de la mesure. Dans cette perspective, le recours à cette ingénierie normative constituera pour notre pays le seul moyen efficace pour préserver l'avenir et protéger la "Loi fondamentale", notre "Loi fondamentale" de toute contestation a posteriori. Car est légitime un régime que les gouvernés dans leur immense majorité tiennent pour tel. Moins une Constitution est mise en cause, plus elle est légitime. Il faut donc reconstituer l'enracinement dans la chose publique, en particulier en donnant à la participation citoyenne la priorité. Dès lors, notre Constitution doit obligatoirement être approuvée par référendum. C'est une question d'éthique.


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