• Le parti des islamistes , Liberté et Justice, affirme qu'il recueillera autour de 43% des sièges alloués à la proportionnelle, à partir de listes présentées par les partis. Il se dit également en tête au scrutin nominal LE CAIRE (Reuters) — Les autorités égyptiennes devaient dévoiler hier les résultats de la première phase des élections législatives, qui devraient confirmer le bon score réalisé par le parti des Frères musulmans. Un tel résultat au scrutin organisé en début de semaine conforterait le succès des islamistes en Afrique du Nord après la Tunisie et, tout récemment, le Maroc. Les chiffres devaient être annoncés à 20h00 locales (19h00 GMT), a annoncé la télévision d'Etat, mais un retard a déjà été constaté à l'heure où nous mettions sous presse Les résultats du vote, qui s'est déroulé lundi et mardi, étaient à l'origine attendus mercredi, puis jeudi, l'annonce ayant été à chaque fois reportée pour permettre le décompte de tous les bulletins. Les Frères musulmans, dont la création remonte à 1928, estiment hier sur le site de leur parti politique, Liberté et Justice, qu'ils recueilleront autour de 43% des sièges alloués à la proportionnelle, à partir de listes présentées par les partis. Ils se disent également en tête au scrutin nominal. Les Egyptiens ont voté librement pour la première fois après trente années de présidence Moubarak. L'ancien raïs a été renversé le 11 février par un soulèvement populaire. Le scrutin s'est déroulé dans le calme et a connu une forte participation. L'annonce des résultats a été retardée car certaines circonscriptions n'avaient pas achevé à temps le dépouillement des bulletins. Si de nombreuses irrégularités ont été relevées, elles ne sont pas susceptibles de mettre en cause la légitimité des résultats, a déclaré la Commission indépendante pour le contrôle des élections. La répartition des sièges à la Chambre basse du Parlement ne sera connue qu'à l'issue du marathon électoral le 10 janvier. La première phase, lundi et mardi, a concerné 17 des 50 millions d'électeurs inscrits dans neuf gouvernorats, dont Le Caire, les villes d'Alexandrie, Port Saïd et Damiette dans le nord du pays, ainsi qu'Assiout et Louxor dans le sud. Au total, 498 sièges sont en lice, dont les deux tiers sont alloués à la proportionnelle sur la base de listes présentées par les partis, le dernier tiers revenant à des candidatures individuelles. «Personne ne doit s'inquiéter» Le parti Al Nour, l'une des formations salafistes qui défendent une vision rigoriste de l'Islam, devrait obtenir jusqu'à 30% des sièges, selon les évaluations diffusées sur le site de Liberté et justice. Jeudi, Al Nour disait s'attendre à obtenir jusqu'à 20% des sièges. Les salafistes souhaitent interdire les femmes et les membres de minorités religieuses, comme les coptes, des hautes fonctions administratives, et prônent un retour à une vision stricte de l'Islam, qui prohibe l'alcool, l'art et la littérature «non islamiste» ainsi que la fréquentation des plages. Le Bloc égyptien, une coalition de partis libéraux, a dit aussi être en mesure de recueillir un cinquième des sièges. Le Mouvement des jeunes du 6-avril, l'un des grands artisans de la révolution, notamment grâce à son activité sur internet, a déclaré sur sa page Facebook que «personne ne doit s'inquiéter de la victoire d'une liste ou d'un courant politique». «C'est la démocratie et notre grande nation ne permettra plus à quiconque de l'exploiter à nouveau», a-t-il dit. Si Liberté et Justice et Nour obtiennent les résultats qu'ils espèrent, ils pourront former une solide majorité au parlement, mais les Frères musulmans semblent rejeter la perspective d'une telle alliance. Essam El Erian, un haut responsable de Liberté et Justice, a déclaré avant le vote que les salafistes seraient «un fardeau pour toute coalition». Un communiqué du parti des Frères musulmans diffusé hier matin se montre plus prudent. «Les discussions concernant la formation d'un gouvernement sont prématurées et la constitution d'alliances au Parlement est liée à l'achèvement des trois phases électorales», dit-il. Liberté et Justice pourrait plutôt chercher à nouer des alliances avec d'autres partenaires comme le parti libéral Wafd ou le parti islamiste modéré Wasat, mis en place par d'anciens membres des Frères musulmans en 1996, mais autorisé seulement après la chute de Hosni Moubarak. «Ils se sont fait voler leur révolution» La confrérie islamiste se défend de vouloir imposer de strictes règles islamiques. Elle assure que son principal objectif est de lutter contre la corruption et de relancer l'économie, non pas d'interdire l'alcool ou d'imposer le voile aux femmes. Les protestataires de la place Tahrir ont organisé à l'issue des prières du vendredi un rassemblement sur la place emblématique de la révolution afin d'honorer la mémoire des 42 personnes mortes lors des manifestations préélectorales. Ils demandent à nouveau le départ du Conseil suprême des forces armées (CSFA), les militaires au pouvoir depuis le renversement de Moubarak. Le CSFA a dit qu'il conserverait le pouvoir de démettre ou choisir le gouvernement mais le chef de file de Liberté et Justice a estimé mardi que le parti majoritaire au Parlement devrait former le cabinet. Pour Mohamed Taha, un comptable de 46 ans qui soutient le Bloc égyptien, les élections législatives ont montré que les jeunes révolutionnaires n'avaient pas de programme viable. «Ils se sont fait voler leur révolution et continuent de se demander qui leur a volé», a-t-il dit. Taux de participation estimé à 62% Le taux de participation lors de la première phase des élections législatives dans un tiers de l'Egypte a atteint 62%, a annoncé hier soir, lors d'une conférence de presse, Abdel Moez Ibrahim, le président de la Haute commission électorale. Ce chiffre, qu'il a qualifié de «plus haut taux de l'histoire de l'Egypte», a été enregistré lundi et mardi lors du début du premier scrutin législatif depuis la chute de Hosni Moubarak en février. L'élection doit s'étaler jusqu'en janvier pour la Chambre des députés, puis jusqu'en mars pour la Choura (Sénat)