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La lutte contre la marginalité ou comment renouer le lien social


Par Mustapha Nasraoui*
Si l'intégration se définit par la participation, la marginalisation se caractérise par la mise à l'écart. Victime de désaffiliation et en butte à la désocialisation, la personne marginalisée souffre doublement. Sur le plan social, elle est marquée par l'isolement et l'effacement des repères sociaux induits par des pertes cumulatives, sous forme de privation multiple : emploi, source de revenu, statut, protection...Sur le plan psychologique, elle vit une identité négative faite de faible estime de soi, de manque de dignité, de sentiments d'injustice, de frustration et de rancœurs.
Dans ce contexte, il y a lieu de distinguer entre citoyenneté active associée au développement, à l'innovation, au bien-être et citoyenneté passive qui subit, dans l'impuissance et le désarroi, les effets du changement. Les marginaux sont souvent relégués à des espaces clos ou semi-clos qu'on appelle ghetto, asile, prison, centre de rétention, bidonville ....se trouvant à la lisière des centres urbains et des communautés rurales. La marginalité est la résultante de processus de marginalisation comme la dévalorisation, l'intolérance, la peur de l'autre, les préjugés, la rigidité du jugement.
Sans être une société éclatée, la société tunisienne a connu différents clivages entre hommes et femmes, urbains et ruraux, ceux qui sont au centre et ceux qui viennent des «horizons», ceux qui sont considérés de haute ou de basse extraction, ceux qui méritent les honneurs et les privilèges et ceux qui ne les méritent pas, ceux qui commandent et ceux qui obéissent, avec des traitements discriminatoires allant de l'exclusion à l'octroi de rôles subalternes aux dominés pour mieux servir les dominants.
Lever le voile sur le mal est déjà un pas important vers le traitement. Pierre Bourdieu écrit à juste titre : «Les rapports sociaux seraient beaucoup moins malheureux, si les gens maîtrisaient au moins les mécanismes qui les déterminent à contribuer à leur propre misère ». Si important qu'il soit, le diagnostic reste insuffisant lorsqu'il n'est pas suivi de soins.
Responsable des récidives et des régressions, la stigmatisation doit être combattue en premier lieu. Combien de personnes ont récidivé dans la criminalité, la maladie mentale et la toxicomanie, à cause d'attitudes sociales néfastes, les prenant pour des tarés irrécupérables. Il y a toujours dans notre société des jugements sans appel et des condamnations définitives, le proverbe tunisien le dit sans ambages : «El-ar atouel min laâmar» : (Le scandale est plus long que les vies ).
De nos jours, même des troubles psychologiques traitables comme la dépression nerveuse sont cachés. Souffrant en silence, le malade évite de contacter un psychiatre de peur d'être étiqueté comme fou, avec toutes les conséquences qui en découlent.
Combattre l'étiquetage ne peut pas se faire sans une attitude confiante et optimiste dans l'aptitude de l'homme à s'améliorer. Si fragile soit – il, l'être humain a toujours un point fort sur lequel on peut bâtir un édifice solide. La meilleure attitude consiste à mettre l'accent sur ce qui existe et non pas sur ce qui manque. Malheureusement, on constate que ceux qui ont tendance à voir la moitié vide de la bouteille sont plus nombreux qui sont qui en voient la moitié pleine.
Parallèlement, la normalisation rigide de tous les aspects de la vie ne peut que favoriser l'émergence des foyers de marginaux. La normalisation, comme vocable, ne rend pas compte de l'extrême diversité des situations, c'est pourquoi il est important de ne pas tracer à l'avance tous les chemins et de laisser une marge de manœuvre et de liberté aux individus. Il y a des styles d'adaptation, des stratégies d'intégration, les psychopédagogues parlent de processus d'apprentissage différenciés.
La normalisation rigide n'est pas nécessairement étatique, elle peut être sociale. Ainsi et à titre d'exemple, notre société actuelle, comme d'autre sociétés, a tendance à considérer la réussite économique comme le seul modèle valable et néglige d'autres modèles non moins gratifiants comme les réussites sociale, familiale, professionnelle, scientifique, etc.
Mais le combat contre la marginalisation ne consiste pas seulement à dénoncer les stéréotypes et à agir contre leurs manifestations mais nécessite également le renforcement de la participation par des mesures nouvelles comme la discrimination positive. Donner le plus à ceux qui ont le moins se justifie amplement .On ne peut pas demander à une personne qui ne peut remuer ni pied ni jambe de participer à une course. Il n'est pas possible aux individus et aux collectivités démunis d'intégrer la vie économique et sociale alors qu'ils sont dépourvus de la base même de cette intégration (ressources insuffisantes, analphabétisme, incapacité, isolement), cela pour dire que les investissements, les programmes de développement doivent s'adresser d'une façon prioritaire aux plus démunis. Ici encore, on aurait tort de croire à l'efficacité de l'approche macrosociologique dans le développement, en perdant de vue les besoins spécifiques des petites communautés, des groupuscules et des zones particulières, ce qui nous ramène à insister sur l'habilitation (empowerment).
L'habilitation consiste à développer les capacités professionnelles et relationnelles des individus pour maîtriser les difficultés et les obstacles se dressant contre leur émancipation. Dans ce contexte, il importe d'insister sur le fait que la marginalité n'est pas une fatalité et chaque fois qu'on franchit un obstacle, la confiance en soi se développe, ce que le psychologue canadien Albert Bandura appelle l'auto-efficacité.
Bien entendu, toute action d'intégration est toujours à double sens : rapprocher l'individu de la société et rapprocher la société de l'individu, une réciprocité faite de compromis, de concessions et d'accommodations. À titre d'exemple, il ne suffit pas de créer une source de revenu à un ancien détenu pour assurer son intégration sociale. Il risque toujours la récidive s'il continue à être stigmatisé comme délinquant, objet de méfiance et cible de sobriquets.
Dans toutes ces actions, la solidarité reste la trame de nos relations. Si cette pratique a connu une grave perversion sous l'ancien régime, rien n'empêche maintenant de croire à sa noble valeur. Non seulement elle est ancrée dans nos traditions mais elle est la plus appropriée à la lutte contre la montée actuelle de l'individualisme où chacun essaie de tirer la couverture à soi. Les calculs égoïstes sont en passe d'être une triste réalité que nous vivons tous les jours.
Facteur fondamental de cohésion sociale, la solidarité renforce les liens interpersonnels à tous les niveaux (individus, collectivités, régions), sans oublier son impact sur le développement durable et les relations entre les générations. Toute génération à une dette sociale à l'égard des générations précédentes et la solidarité intergénérationnelle se manifeste de différentes manières parmi lesquelles la contribution des personnes âgées à l'encadrement des générations nouvelles .De même, ces dernières sont appelées à profiter du trésor précieux du savoir, du savoir-faire et du savoir-être des seniors. Si elles laissent disparaître cette fortune singulière sans en tirer profit, elle s'évanouit pour toujours. «Quand un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui brûle», dit le proverbe africain.
Bien entendu , ce qui vient d'être dit ne peut s'accomplir sans l'intensification des échanges des biens, des services et des savoirs entre tous les Tunisiens dans le sens d'une meilleure circulation des richesses matérielles et immatérielles. Tous ceux qui se retranchent derrière une appartenance close (parti, corporation, région...) doivent, aussi bien dans leur intérêt propre que dans l'intérêt général, réviser leur position. C'est grâce à ce décloisonnement qu'on arrivera à minimiser les antagonismes et à développer des relations sociales saines et épanouissantes.


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