• Affrontements à l'arme lourde dans les rues de Sanaâ entre les forces gouvernementales et des combattants tribaux hostiles au président Saleh SANAA (Reuters) — Le vice-président yéménite, Abd-Rabbou Mansour Hadi, a publié hier un décret portant création d'un gouvernement d'union nationale dirigé par le chef de l'opposition, Mohammed Basindwa, rapporte l'agence officielle Saba. Ce développement résulte d'un plan de transition négocié par les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) pour faciliter le départ du président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 33 ans, et mettre fin à des mois de manifestations qui ont paralysé le pays en le plaçant au bord de la guerre civile. Alors que Basindwa se préparait à présenter le nouveau gouvernement, des affrontements à l'arme lourde ont opposé dans les rues de Sanaâ les forces gouvernementales à des combattants tribaux hostiles au président Saleh, ont rapporté des témoins. Ces combats, livrés à proximité de bâtiments officiels et du bastion des forces de Sadeq Al Ahmar, de la confédération tribale des Hached, représentent le dernier défi à la mise en œuvre du plan de transition et du gouvernement. Après dix mois de manifestations de masse contre Saleh, l'Arabie Saoudite redoute comme les Etats-Unis de voir le chaos s'aggraver et la branche régionale d'Al Qaïda s'enhardir au Yémen, malgré les opérations que l'armée américaine a déclenchées par drones interposés contre le mouvement islamiste. Des obus ont touché les façades de la radio publique et les bureaux du Premier ministre pendant les tirs d'artillerie opérés dans le quartier de Hasaba, où sont basés les hommes de Sadeq Ahmar. Un habitant de Sanaâ a dit que les combats avaient débuté à l'aube. «Ils utilisent des mitrailleuses et des lance-grenades», a ajouté Abdul Rahman par téléphone tandis que des tirs retentissaient à l'arrière-plan. «Nous sommes bloqués chez nous, pas moyen de sortir», a-t-il dit. D'autres habitants de la capitale ont dit que les rues de plusieurs quartiers étaient quasi désertes. Saleh a fini par signer le plan du CCG en novembre sous la pression de manifestants qui protestaient contre une pauvreté chronique, la corruption et le manque de perspectives économiques. Il a officiellement cédé ses pouvoirs au vice-président Hadi. Mais l'accord de transition reste menacé par les combats entre alliés et ennemis de Saleh à Taëz, à 200 km au sud de Sanaa, où 20 personnes au moins ont été tuées. Les Nations unies ont exhorté les forces gouvernementales à cesser de faire feu sur les manifestants. Basindwa, ancien ministre des Affaires étrangères choisi par les partis d'opposition pour le gouvernement d'union, a déclaré à Reuters que la composition du cabinet serait annoncée dans les prochaines heures. Un dirigeant d'opposition a dit que le parti islamiste Islah — partenaire de coalition de Saleh dans les années 1990 avant son ralliement aux manifestations contre ce dernier — recevrait le plus grand nombre de postes octroyés à l'opposition actuelle, notamment le ministère de l'Intérieur. D'autres partis d'opposition obtiendront des postes comme les ministères des Finances et du Commerce, selon une liste de portefeuilles ayant fait l'objet d'un accord et dont Reuters a eu connaissance. Le Congrès populaire général, parti de Saleh, n'a pas révélé ses propres choix pour le nouveau cabinet. Quelle que soit sa composition, le gouvernement devra relever une série de défis, notamment une poussée séparatiste dans le Sud qui s'était uni avec le Nord en 1990 avant de le combattre au cours d'une guerre civile. Le Sud est aussi le théâtre d'un conflit entre forces gouvernementales et rebelles islamistes qui a déplacé des dizaines de milliers d'habitants. Dans le Nord, de nouveaux combats ont éclaté hier entre des insurgés chiites et des islamistes salafistes sunnites, a déclaré un porte-parole salafiste.