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La révolution est-elle pathogène ?
Entretien avec : Dr Héchmi Dhaoui, psychiatre - psychanalyste
Publié dans La Presse de Tunisie le 02 - 02 - 2012

Une année après la révolution tunisienne, un bilan psycho-socio-politique s'impose.
Hechmi Dhaoui psychiatre - psychanalyste et membre de l'Association internationale de psychologie analytique, auteur de plusieurs livres dont Musulmans contre l'islam?, l'Amour en Islam, la mémoire et le cerveau et Pour une psychanalyse maghrebine, la personnalité, nous éclaire sur plusieurs problèmatiques qui gravitent autour d'un moment historique : «la révolution». La peur, l'ordre, la violence, le sentiment d'appartenance, ce qui nous unit et ce qui nous sépare... Entretien par la technique du divan.
Une année après la révolution, quelle analyse pouvez vous faire de l'évolution du comportement du Tunisien ?
Le premier constat qui s'impose à nous tout de suite est la déception et la déprime du tunisien. Cela s'explique, en grande partie du moins, par la déception que nous avons ressentie dans nos projections postrévolutionnaires. La perte de confiance en les hommes politiques en découvrant d'un coup ce dont étaient capables Ben Ali et son épouse (trafic de devises, trafic d'armes, trafic de déchets nucléaires, trafic d'organes, agents étrangers, corruption nationale et internationale et malversations). Et une fois passée l'euphorie de la révolution, nous avons constaté que le pouvoir d'achat s'affaiblissait à vue d'œil et que le chômage grimpait. Et si on y ajoute toutes les promesses non tenues des partis politiques lors de la campagne électorale et la reprise des mêmes réflexes de clientélisme et de partage du pouvoir entre la Troïka, ce sentiment de déprime devient encore plus justifié.
Le soulèvement contre Ben Ali a donné naissance à un sentiment de révolte permanente contre toute forme d'ordre, comment l'expliquez-vous d'un point de vue psychologique ?
Cela s'explique par le fait que la révolution civilisée et moderne qui a appelé à la dignité, au droit au travail, à la liberté et à la justice sociale entre les régions est prise en otage à cause des querelles politiciennes pour des postes de responsabilité et surtout les avantages qui vont avec. Parallèlement, rien n'a changé dans les conditions de vie. D'un autre côté, en constatant un certain laxisme avec les salafistes aux facultés de Sousse et de la Manouba qu'à Sejnane où ils veulent nous imposer leur régression psychologique. Voyant que les promesses n'aboutissent pas, les citoyens régressent vers la révolte.
La révolte n'est donc pour moi qu'un recul pour mieux sauter. Seuls les politiques en seront responsables.
Le sentiment de peur n'est plus manifeste, quelle analyse en faites-vous ?
On a peur quand on a quelque chose à perdre. Tous les Tunisiens ont certainement constaté que seuls 69 martyrs ont trouvé la mort avant le 14 janvier 2011, alors que le triple a affronté les balles après la fuite du dictateur.
Après la révolution, les injustices persistent, les procès traînent et le quotidien du citoyen est au statu quo. A la vue des différentes injustices et à tous les niveaux, comment voulez-vous que ceux qui n'ont rien à perdre puissent avoir peur ?
Le 14 janvier 2011, on a vu tout le peuple tunisien uni face à un seul ennemi, une année après les clivages sont de plus en plus ressentis au-delà des explications politiques, comment expliquez-vous les choses ?
C'était une solidarité spontanée des jeunes pour en finir avec la dictature. Il n'y avait ni leader ni programme politique. Les jeunes qui ont libéré d'abord le pays de la dictature tout en libérant les prisonniers politiques ont, sans le vouloir, libéré les geôliers et la police, les partis politiques, les juges et la justice, les médias (qui ne sont pas encore capables de jouir de leur indépendance).
Au cours de cette année, on n'a constaté que des déchirements entre les politiques et les différents pouvoirs sans s'occuper réellement des jeunes qui les ont libérés et des régions ont maintenu la pression.
Heureusement que les clivages du premier anniversaire de la révolution ont disparu le jour où la cause est redevenue unique pour défendre une des revendications des jeunes qui ont fait cette révolution, à savoir la liberté.
Après avoir vécu le sentiment d'appartenance à la nation, le sens de la citoyenneté, etc., comment expliquez-vous l'apparition d'une nouvelle forme d'appartenance plus tribale et communautaire ?
C'est toujours la déception qui est génératrice d'une certaine régression causée par la frustration en rapport avec les espoirs loin d'être réalisés au cours de cette année. C'est cette régression que je développerais en parlant des salafistes, qui ramène l'individu qui aspirait à une certaine modernité à un besoin fondamental chez lui qui est celui de l'appartenance. Ce qui lui impose de quitter son individualisme pour se fondre dans sa communauté.
Comment expliquez-vous la montée de cette forme de résistance religieuse violente ?
Il y a deux raisons : d'abord cette même régression que subissent ces jeunes déçus de leur situation socio-économique, la régression leur permet de se retrouver sur la voie de la recherche d'une certaine époque historiquement très lointaine à laquelle ils aspirent de manière nostalgique. Puis, ils profitent de l'indulgence du gouvernement nahdhaoui (s'ils ne sont pas encouragés comme par le discours de Chourou qui n'est pas n'importe qui dans leur hiérarchie). Je me demande même s'ils ne constituent pas leur bras armé pour tester la capacité de résistance des Tunisiens qui tiennent à la modernité comme choix de modèle social. C'est l'impunité aux facultés de Sousse et de la Manouba qui les a encouragés, à mon avis, à s'attaquer physiquement à des intellectuels dans une concentration d'agents de police.
Si nous faisons une immersion dans la tête d'un salafiste, quel tableau clinique nous pouvons en sortir ?
Parlons d'abord du cadre dans lequel évoluent ces jeunes. C'est le wahabisme qui a fabriqué des talibans en Asie, des talibés en Afrique et des salafistes dans les pays arabes. Dans sa régression, un salafiste fonctionne en quittant la pulsion de vie pour ne fonctionner que sur la pulsion de mort. C'est pourquoi il en a contre la femme qui donne la vie. Dans sa régression, le salafiste rêve d'une théocratie égalitaire reposant sur la soumission et l'obéissance à Dieu. Le moindre écart par rapport à ce rêve devient un sacrilège qui mérite la mort.
C'est ce qu'a fabriqué le wahabisme hanbalite en développant une réponse archaïque faite d'un sentiment de toute-puissance pour permettre au salafiste de soi-disant s'adapter et de progresser dans le monde contemporain. Ce mouvement de régression contre le cours de l'histoire dépasse même la période islamique désirée et à laquelle il aspire de manière nostalgique pour se retrouver à la période préislamique et nomadique où régnaient les tribus bédouines d'Arabie et contre lesquelles le Prophète s'est révolté pour installer son pouvoir civil à Médine.
Le pouvoir semble être une drogue, en tant que psychiatre, comment voyez-vous le rapport que les trois présidents (Ben Jaâfar, Marzouki et Jebali) ont au pouvoir ? Et si nous faisons une petite analyse comportementale de ces trois personnages et leur manière de communiquer avec le peuple, que pouvons-nous en retenir ?
Je n'ai pas l'habitude de parler en public psychologiquement. Mais je vous dirais tout d'abord ce que je pense des hommes politiques en général. Ils sont pour la plupart immatures psychologiquement, ils sont donc capricieux comme des enfants et sont même capables de marcher sur le corps de leur mère pour le garder.


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