TUNIS (TAP) - L'insécurité, l'émergence de nouveaux phénomènes (sit-in, revendications et anarchie) après la révolution et l'absence d'un message clair véhiculé par les partis, sont autant de facteurs ayant renforcé le sentiment de peur chez les tunisiens, pour leur présent et leur avenir. Cette appréhension s'accroît, même si une amélioration est perceptible dans la situation sécuritaire, avec l'approche de la date des élections du Conseil constitutionnel, prévues pour le 23 octobre 2011. La psychologue, Rabia Alibi, analyse, pour la TAP, ce sentiment de crainte constaté chez les tunisiens «la révolution, la chute brusque du régime et la succession rapide des évènements dans le pays, ont eu un effet de choc sur la société tunisienne, qui a perdu confiance en n'importe quelle organisation, quelle que soit sa nature ou son objectif», ce qui induit un refus de participer à la vie publique, tel que l'inscription aux élections, le vote. Cette peur a été accentuée, selon cette spécialiste, par une transformation brusque et radicale du discours médiatique "d'un extrême à l'autre", notamment dans les médias audiovisuels. " Les Tunisiens souffrent de syndromes post-traumatiques, ce qui les a amenés à se replier sur soi et à se réfugier auprès de la famille ou de la tribu, à la recherche d'une protection. Ils préfèrent, aussi, se conformer aux choix de la majorité." La psychologue a relevé que « le peuple ne s'est pas réjouit de sa révolution et n'a pas totalement exprimé ses émotions, ce qui a beaucoup influé sur son psychisme. Ceci, apparaît clairement chez les enfants, dont certains souffrent de cauchemars et de mauvais rêves, en raison des pressions qu'ils ont subies". " De nombreux tunisiens ont préféré se réfugier dans la foi, à la recherche de quiétude", ce qui explique, selon elle, la montée des mouvements religieux, alors que les gens sont convaincus que ces mouvements " disent ce qu'ils ne font pas ». Certains observateurs ont constaté que l'augmentation de la criminalité en Tunisie, l'aggravation des dangers qui menacent les frontières avec les pays voisins, l'image sombre présentée par les médias sur la situation sécuritaire, conjuguées à une situation économique délicate, suscitent la frayeur des citoyens, qui ne trouvent pas dans les élections, une solution pour sortir de cette situation. Exprimant un sentiment de peur, Mme Aida, femme au foyer et mère de trois enfants, a déclaré à la TAP qu'elle ne pense pas que les prochaines élections puissent clarifier la vision de l'avenir. J'aspire, seulement, aujourd'hui, a-t-elle dit, à " me sentir en sécurité". Après avoir subi un vol de son sac à main, dans la rue, cette dame ne peut plus sortir de chez elle. Elle a, aussi, peur pour ses enfants à l'école. Cette crainte est également partagée par Mme Thabet, médecin à la Marsa, qui s'inquiète "de ne pas pouvoir tenir ses engagements durant la prochaine période à cause de la situation économique et des incertitudes qui entourent le déroulement des évènements en Tunisie". Les partis politiques, a-t-elle dit, "n'ont pas présenté clairement leurs programmes et nous ne voyons qu'une lutte pour le pouvoir", relevant "Je suis préoccupée par les résultats des élections qui pourraient menacer les acquis des tunisiens, notamment, les droits de la femme, devant la montée des courants religieux et salafistes". Quant à M. Hédi, maçon, travaillant dans un chantier à Ennaser, il a exprimé son inquiétude à propos de la flambée des prix jour après jour, ce qui l'a rendu incapable de subvenir aux besoins de sa famille, alors que les offres d'emploi sont en baisse. Il a affirmé qu'il va voter pour le parti choisi par la majorité de ses voisins et par sa famille, indiquant que ce qui l'intéresse "c'est la réduction des prix, l'augmentation des salaires et la promotion des offres d'emploi".