Débat d'actualité sur l'équité sociale. Et s'il y a eu révolution, c'est justement parce que, entre autres, cette équité a été compromise. Réfléchissons. Depuis l'Indépendance, une certaine conception de l'équité sociale a été mise en place. Elle se base principalement sur une fiscalité variable selon le niveau des revenus. Les salaires sont classés par palier, et plus la rémunération augmente, plus la proportion d'impôt est élevée. Celui qui n'a pas de salaire ne paye rien. Et celui qui n'a pas de quoi vivre reçoit des aides (conditionnées par la loyauté politique). Et d'une certaine manière, tous les salariés appartiennent pratiquement à la même catégorie : la classe moyenne. Pour les hommes d'affaires, les entrepreneurs et les professions libérales, il y a également plusieurs régimes... Or, c'est à ce niveau que la défaillance a déréglé le système. Et ce n'est pas un secret. Si les revenus des employés sont coincés dans une fiche de paye, le payement d'impôt de la deuxième catégorie se base sur des déclarations. Et là, la marge de fraude et de corruption est importante, d'où les fausses déclarations, la fuite fiscale, les redressements, etc. La motivation commune n'est pas compliquée : «C'est mon argent, je ne le donne pas au gouvernement, ‘hakem '». Cette tendance a été nourrie petit à petit par les incitations fiscales accordées notamment aux investisseurs. Les exonérations accordées aux employeurs que ce soit en ce qui concerne l'impôt ou en ce qui concerne les charges sociales ont amplifié les disparités entre la catégorie des hommes d'affaires et celle des employés. Et ceci dans la « légalité ». Et si légalité il y a, égalité il n'y a plus, à partir du moment où la balance a basculé du côté du capital et que le salarié n'arrive plus à accéder aux rudiments d'une vie digne. L'injustice devient telle, que le pauvre paye pour le riche. Sous d'autres cieux les repères sont autres. Il faut dire au passage que les concepts sont en train de changer au niveau planétaire. Les gouverneurs se soucient du bien-être de leurs concitoyens. Et l'équité se mesure par des indicateurs de confiance et de facilités d'accès à ce qui est nécessaire, comme à ce qui relève du confort. Le logement décent, la nourriture saine, la santé, l'éducation, le divertissement sont ainsi des droits à tous les citoyens quels qu'ils soient. C'était accessible pratiquement à tous les Tunisiens à un certain moment sous la dictature. Mais malheureusement, dans la majorité des cas, c'était à crédit.