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Un impératif de la révolution pour la dignité
L'insertion des droits sociaux fondamentaux dans la Constitution
Publié dans La Presse de Tunisie le 09 - 05 - 2012


Par Mongi TARCHOUNA *
A la question : «Quelle est la meilleure Constitution ?», Charles De Gaulle répondait : «Dites-moi d'abord pour quel peuple et à quelle époque». La future Constitution est destinée à un peuple épris de démocratie, de liberté et de justice sociale. Elle devrait être écrite au terme d'une véritable révolution sociale et politique qui crée un Etat nouveau : l'Etat démocratique, c'est-à-dire un Etat associant démocratie politique et démocratie sociale. Elle devrait être à la hauteur du tournant historique que vient d'amorcer cette révolution. Ce tournant est historique parce qu'il porte en lui une extraordinaire espérance et s'est amorcé au nom des valeurs des droits fondamentaux de l'Homme. Il est impératif que les valeurs véhiculées par cette révolution trouve une place de premier choix dans la future Constitution ; des valeurs comme celles de la dignité, la solidarité, la liberté, l'égalité et la justice. La Constitution est l'instrument de la codification de ces valeurs et principes fondamentaux, codification qui exprime la permanence d'une révolution pour les générations futures comme c'est le cas des premières déclarations révolutionnaires d'autres peuples (américaine et française). Parmi les grands enjeux qui seraient soumis au vote de l'Assemblée constituante, issue du vote populaire, figure en bonne place la justice sociale, revendication première du peuple, artisan de la révolution. Sous le modèle économique obsolète de l'ancien régime, les écarts de revenus entre les catégories les plus riches et les plus pauvres se sont accentués. L'extrême pauvreté d'une partie importante de la population est révélée au grand jour par la révolution. Ce modèle a, par ailleurs, creusé un fossé entre les régions et les générations. Les jeunes étant spoliés du premier droit social fondamental, le droit au travail, sont la première victime d'un tel modèle. Le modèle économique nouveau devrait être centré sur le rôle social primordial de l'Etat régulateur. Ce rôle est le pivot central du nouvel Etat démocratique, légitimé par le vote populaire, et dont les jalons devraient être en principe jetés par la future Constitution, indépendamment du régime politique adopté, présidentiel ou parlementaire et quel que soit le régime économique, libéral ou autre. L'obligation constitutionnelle générale de l'Etat de promouvoir et de protéger les droits sociaux fondamentaux de l'individu à côté de son obligation de respecter les droits et libertés politiques, est le pilier du nouvel Etat démocratique. L'ouverture théorique du modèle républicain à la démocratie constitutionnelle, proclamée par le préambule de la Constitution de 1959, est restée un vœu pieux, dénué de toute concrétisation, tant qu'il n'a pas entraîné un enracinement des droits fondamentaux dans la Constitution, aussi bien les droits politiques que les droits sociaux. L'insertion des droits sociaux fondamentaux (DSF) dans la future Constitution marquera une étape décisive de la révolution tunisienne pour la dignité sociale. Il n'est pas de société démocratique sans dimension sociale, laquelle doit aller de pair avec la démocratie politique. Il s'agit là de deux exigences constitutionnelles indissolublement liées.
Qu'est-ce qu'un droit social ?
Traditionnellement, on distingue les droits économiques, sociaux et culturels, abrégés sous l'expression moderne en «droit sociaux» (DS), et les droits civils et politiques. Les premiers, de création récente, forment ce qu'on appelle «la deuxième génération des droits de l'Homme»; ils n'ont commencé à être garantis sur le plan constitutionnel, dans les pays d'Europe, qu'après la Seconde Guerre mondiale, particulièrement à partir des années 70 du siècle dernier. Les seconds, qui constitueraient les véritables droits de l'Homme, ont trouvé, dans la plupart de ces pays, un fondement constitutionnel au XIXe siècle déjà.
Dans un sens strict, la notion de «droits sociaux» correspond aux droits à des prestations étatiques, aux «droits-créances» ou «droit à» comme le droit au travail et à la sécurité sociale, le droit à un revenu minimum pour les personnes sans ressources, le droit à la santé et à des prestations de soins gratuites et à l'aide sociale pour les plus démunis, le droit à un logement décent ou convenable pour les sans-abri ou les mal-logés… Mais cette notion a connu une évolution pour s'étendre aux droits dits de la 3e génération, tels le droit à un environnement sain et le droit à la culture, notamment le droit à l'éducation et le droit de chaque individu à l'épanouissement culturel et à la création culturelle, et comprendre, en même temps, les droits et les libertés sociales des travailleurs comme la liberté syndicale et le droit d'organisation, le droit des organisations syndicales des travailleurs et d'employeurs à la libre négociation collective des conditions de travail et des salaires, le droit de grève et le droit des salariés à l'information et à la consultation sur la gestion économique et sociale de l'entreprise. Dans un sens large, unaniment accepté, les DS englobent tous les droits de l'individu ayant trait à ses relations de vie en société. Le terme « social » peut donc avoir des acceptations différentes. Il désigne tantôt les droits non politiques (les droits économiques tels le droit au travail et les droits des travailleurs) tantôt le droit à des prestations, les droits créances (les droits sociaux, culturels et environnementaux).
La source de la fondamentalité des droits sociaux : la dignité
Ce n'est pas par hasard qu'on qualifie spontanément, et à juste titre, la révolution tunisienne d'une révolution de la dignité et pour la dignité. Ce concept fait surgir l'ultime question : quel est le fondement de la normativité de la dignité, c'est-à-dire de sa consécration explicite par les normes juridiques, notamment les normes constitutionnelles? De ce point de vue, il faut constater que les droits fondamentaux de l'Homme se situent entre des valeurs (liberté, justice, égalité, etc.) et des situations effectives et concrètes. Les valeurs appartiennent, comme telles, au domaine de l'éthique. La fonction du droit est de transposer ces valeurs dans le concret de l'existence sociale. Il en est bien ainsi de la dignité qui vise ce qui est la qualité humaine en chacun. Sur le plan de l'éthique, la dignité, en tant que valeur, a une validité générale et absolue. Mais lorsqu'elle est saisie par le droit, elle se trouve transposée dans le vécu social et subit un processus d'« historicisation » à un moment donné et dans une société donnée. La révolution tunisienne marque, sans aucun doute, ce processus et constitue le fondement de la normativité de la dignité de la personne qui est, elle-même, la source première de la fondamentalité de tous les droits sans distinction, les droits politiques et les droits sociaux. C'est ainsi, par exemple, au Portugal, la reconnaissance constitutionnelle des DSF est le produit de la révolution du 25 avril 1974 qui a aboli le régime dictatorial et qui a donné son origine à la Constitution de 1976. L'Assemblée constituante n'a pas omis de se référer à la révolution et à la volonté du peuple pour fonder l'insertion dans la constitution des droits fondamentaux et du principe fondamental de dignité. Le préambule de cette Constitution proclame : «La Révolution a restitué aux Portugais les droits fondamentaux et les libertés essentielles» et «l'Assemblée constituante proclame la décision du peuple portugais... de garantir les droits fondamentaux des citoyens ...». L'article 1er de la même Constitution dispose : «Le Portugal est une République souveraine fondée sur la dignité de la personne humaine». N'est-ce pas la pression des problèmes sociaux posés par les sans-revenus, les sans-emploi, les sans-abri, les sans accès effectif à la culture et à l'enseignement, les non-protégés dans leur santé et contre les risques sociaux, qui a imposé, en grande partie, l'intégration du principe de dignité dans les constitutions modernes, comme principe fédérateur de tous les DF et indivisibles de l'homme? Notamment des constitutions issues des révolutions qui ont aboli les dictatures (Espagne, Portugal, Italie, Grèce), N'est-ce pas le droit au travail qui a allumé l'étincelle de la révolution tunisienne ? Cette révolution a montré, sans équivoque, à travers le déchaînement des revendications sociales (travail et stabilité de l'emploi ; logement, santé, culture, extension du droit syndical à des catégories privées jusque-là de ce droit comme les agents de sécurité, la douane, les magistrats, pluralisme syndical, etc.) que non seulement les droits civils et politiques sont massivement bafoués, mais aussi les plus élémentaires des droits sociaux inhérents à la dignité de la personne humaine comme le droit au travail, au logement, à la santé et aux soins, à un revenu minimum… bref, le droit au minimum vital de subsistance ou tout simplement le droit à la vie; ce qui affecte en profondeur la vie de centaines de milliers de personnes.
On comprend alors pourquoi le concept de dignité gît à la base de tous les DF sans distinction et figure dans plusieurs constitutions modernes. Le but est d'insister davantage sur la situation terrible des exclus du système social en considérant que le fait de laisser ces derniers sans garanties matérielles minimales (emploi, santé, logement, etc.) revient à les traiter de façon aussi indigne que de torturer une personne en raison de ses opinions ou de ses positions politiques. Les deux Pactes des Nations unies de 1966, le Pacte relatif aux droits civils et politiques et le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, comportent un préambule identique se référant à la dignité en reconnaissant que «ces droits découlent de la dignité inhérente à la personne humaine».
Les résistances vaincues à la reconnaissance constitutionnelle des droits sociaux fondamentaux
L'inscription des DSF dans les constitutions a posé, dans la pluparts des ordres juridiques, la question de leur contingence et de leur effectivité. La constitution peut-elle imposer des droits sociaux intangibles dans quelque contexte économique et social que ce soit ? On s'est, dès lors, interrogé sur l'opportunité d'inscrire dans la constitution ces droits du moment qu'on sache qu'ils ne peuvent être effectifs dans un contexte de ressources limitées et de chômage. La proclamation de tels droits dans la constitution serait des déclarations « romantiques » car la constitution n'a pour fonction ni de « promettre » ni d' « exhorter », ont soutenu, jadis, certains constitutionnalistes opposés à l'insertion des DSF dans la constitution. Toutefois, l'histoire des systèmes constitutionnels, notamment européens, a largement démontré que cette position est excessive, fausse et démentie par la consécration de ces droits, relativement tardive, dans la majorités des constitutions, notamment les constitutions, modernes et récentes (Portugal, Grèce, Espagne, Belgique, pays de l'Est, etc.).
* (Universitaire)


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