Par Hédi Ben Abbes On peut lire à longueur d'écran et de journaux un torrent de réactions en faveur ou contre le CPR, de multiples analyses, qui vont de la sociologie politique à la scatologie en passant par le sentimentalisme béat, le tout selon un modèle conclusif partant du principe que celui qui écrit (ou parle) détient nécessairement la vérité et qu'au-delà de sa lecture il n'y a point de débat. On peut dire sans trop se tromper que le CPR ne laisse personne indifférent. Que ce soit pour le dénigrer ou le monter au pinacle, le CPR suscite aussi bien l'admiration que l'incompréhension, l'enchantement que la méfiance et parfois le tout en même temps. Ces réactions intempestives témoignent du rapport passionnel que nous avons tous avec ce parti sur lequel nous avons accroché tous nos espoirs pour qu'il soit la caution démocratique et révolutionnaire du pays. Quand on parle de passion, cela implique une part d'irrationnel, un rapport épidermique qui exclut parfois le réalisme politique, l'épreuve du pouvoir et surtout le sens de la responsabilité. Une fois débarrassé de la passion et après l'examen minutieux de la vie politique en Tunisie et principalement de l'appareil exécutif de l'Etat, tout laisse à penser que le CPR a bel et bien atteint ses premiers objectifs! Comment ? Sur le plan politique et institutionnel, la Troïka, au sein de laquelle le CPR joue un rôle important, a réussi à assurer une cohésion politique et sociale unique au monde si l'on se réfère à l'histoire des révolutions qui ont précédé celle de la Tunisie. Une coalition hétéroclite implique nécessairement que les lignes de démarcation ne soient pas fixes et que des efforts aient été consentis par l'une ou l'autre des trois composantes de la Troïka. Et c'est une première pour une phase de transition ! L'interaction entre les trois partis a donné lieu à cette nouvelle forme de « syncrétisme politique » qui correspond à l'âme du Tunisien avec ce savant dosage de religiosité, de modernisme, de valeurs arabo-musulmanes et de valeurs universelles, d'ancrage identitaire et d'ouverture sur le monde, le tout matérialisé à la fois dans la politique menée par le gouvernement comme dans les premières ébauches d'écriture de la nouvelle Constitution. A y regarder de plus près, on constate que ce sont les valeurs que le CPR a toujours défendues, celles qui représentent l'ossature du programme du CPR tel qu'il a été approuvé par le congrès du parti (Kairouan, juin 2011). Pour ce qui est de la contribution des membres du CPR au sein du gouvernement, force est de constater que chacun de nos ministres et secrétaires d'Etat a œuvré à matérialiser les valeurs susmentionnées dans son action. Je prends à titre d'exemple l'action de Mohamed Abou d'un côté et celle de Hichem Ben Jamaâ de l'autre, l'un est ministre chargé de la Réforme administrative et l'autre est secrétaire d'Etat chargé de la Jeunesse et des Sports. Pour le premier, il n'a cessé de bousculer le système en introduisant d'abord une dynamique de réforme respectueuse des institutions et de leur équilibre mais aussi un souffle nouveau visant à avoir plus de transparence dans la gestion des affaires publiques (transparence dans les critères appliqués aux concours publics, mise en ordre des procédures administratives visant à faciliter l'accès à l'information et à éliminer les origines de la corruption, possible instauration de la semaine des cinq jours après consultation publique, une première dans l'histoire de la Tunisie, etc.). Ce ne sont que quelques exemples dans un chapelet de réformes bien amorcées. Pour ce qui concerne Hichem Ben Jamaâ, voilà une force tranquille, qui travaille dans l'ombre usant de ses compétences juridiques pour assainir un ministère gangréné par la corruption et le gaspillage des deniers publics. Il est à l'origine et à l'exécution de l'une des plus grandes réformes du ministère de la Jeunesse et des Sports depuis sa création. Hichem Ben Jamaâ a commencé par l'identification des sources de la corruption, ses mécanismes et ses responsables, et ce, de manière méthodique, équitable et juste, ce qui a abouti à l'élaboration de dossiers solides, aujourd'hui dans les mains de la justice. Voilà un exemple typique des soldats du CPR qui, sans faire trop de bruit, exécutent le programme du CPR pour la lutte contre la corruption et l'identification de ses responsables. Quant à l'action du président de la République, on peut dire en toute objectivité qu'il s'agit là d'une véritable révolution dans l'exercice de cette fonction. Pour y voir plus clair, il faudrait commencer par éliminer l'écran de fumée dressé par ceux qui accordent de l'importance aux apparences au détriment de la consistance, par ceux qui privilégient la forme au détriment du fond sous le fallacieux argument du «heibit eddawla» qui n'est autre que la consécration des privilèges et la soumission de la population au diktat d'une minorité. Une fois l'écran de fumée dissipé, on peut commencer l'examen de l'action présidentielle, en disant que tout n'est pas parfait et que la Présidence de la République n'échappe pas à la condition humaine, celle qui n'est pas exempte d'erreur. Mais regardons pour une fois la grosse moitié pleine du verre et prenons un simple exemple, celui de l'ouverture plus que symbolique, au propre comme au figuré, de l'ancienne forteresse de Carthage au grand public. Nous assistons à une autre conception de la relation du gouvernant et du gouverné car la démocratie passe d'abord par l'appropriation des lieux de pouvoir par le peuple. Le président a de ce fait créé un précédent non seulement dans le monde arabe mais bien au-delà. Une telle action a une portée révolutionnaire tant elle fait tomber toutes les cloisons en même temps et humanise la fonction présidentielle. En attendant dimanche et l'ouverture hebdomadaire des portes de Carthage aux écoliers, le samedi 19 mai, ces mêmes portes ont été ouvertes pour qu'un président organise un débat public en présence de la société civile sur le thème de la « laïcité ». Où a-t-on vu ce niveau d'exercice de la démocratie participative dans les nouvelles démocraties ? La portée d'une telle démarche ne pourra être pleinement saisie que dans quelques années quand la démocratie deviendra une culture et une pratique quotidienne et que l'on se rappellera alors la genèse de cette démocratie participative. Inutile d'énumérer toutes les actions sur la plan de la politique étrangère en servant de caution démocratique au monde entier et en ayant comme seul repère l'intérêt supérieur de la nation tunisienne. Quant à la politique intérieure, et toujours à titre d'exemple, le président s'est montré garant de la cohésion sociale et de la réconciliation nationale à travers l'action envers les youssefistes et les bourguibistes, à travers l'engagement à défendre toutes les composantes de la société tunisienne et toutes les confessions, à travers l'engagement à défendre le drapeau national et sa symbolique. Il reste proche du peuple dont il est issu et dont il n'a jamais oublié son engagement à lui apporter le bien-être qu'il mérite et à veiller à sa sécurité. Ce n'est pas le portrait d'un homme que je dresse, le temps du culte de la personnalité est révolu, mais quelques-unes des innombrables actions d'un président issu du CPR et qui a su devenir le président de tous les Tunisiens bien au-dessus des partis, subissant les feux des critiques parfois les plus injustes sans jamais y répondre. Rappelez-vous il y a un peu plus d'un an comment était l'exercice de la fonction présidentielle et vous verrez pourquoi on peut parler d'une véritable révolution. Rappelez-vous la terreur qui régnait à Carthage alors qu'aujourd'hui le personnel peut en toute tranquillité faire grève au sein même de ce palais. Que de chemin accompli en si peu de temps sans que certains ne se rendent compte de l'ampleur du changement ! Quant à nos parlementaires, on peut dire que malgré les dysfonctionnements et les erreurs, nos députés restent animés par la flamme réformiste du CPR. Ils sont aujourd'hui et après avoir mis de l'ordre dans leur rang, la cible de tous les contre-révolutionnaires (voir Essabah du 18 mai) et la réaction des RCDistes contre le projet de loi proposé par le CPR en vu de l'interdiction temporaire de la participation des dirigeants RCDistes à la vie politique. Le CPR a aussi déposé le 15 mai un projet de loi visant la réforme de la justice, d'autres projets de réformes suivront. Le CPR est un acteur principal dans la bonne gouvernance (OpenGov). Le CPR est la caution démocratique et civile dans la rédaction de la nouvelle Constitution. Le CPR brille par sa force de persuasion car le parti est là pour construire la nouvelle Tunisie à force de propositions et ne se contente pas du confort de la critique de salon. Il ne s'agit-là que de quelques exemples des actions du CPR depuis qu'il a accédé au pouvoir. Quelques questions rhétoriques s'imposent alors : quel parti peut se prévaloir aujourd'hui d'une telle volonté de réforme après à peine cinq mois d'exercice ? Qui a pris autant de volume sur la scène politique tunisienne malgré les faiblesses structurelles et les erreurs d'une partie de la classe dirigeante du parti ? Qui peut aujourd'hui en toute objectivité nier le fait que sans le CPR, le processus démocratique aurait été, le moins qu'on puisse dire, malmené pour ne pas dire compromis ? Comment peut-on envisager qu'un parti d'action comme le CPR puisse rester spectateur de la vie politique de notre pays à un moment où l'avenir de la Tunisie se conjugue au présent ? Comment peut-on lui reprocher d'avoir retroussé les manches et de s'être engagé dans la bataille démocratique pour faire face à tous les ennemis qui tentent de torpiller le processus ? L'esprit CPR c'est de ne jamais reculer face aux difficultés, d'être bâtisseurs et non spectateurs, de prendre des risques sans faire de calculs politiciens car l'intérêt du parti ne pèse pas lourd face à l'intérêt de la nation.