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Propagande, intrigues et religion
14 Janvier 2011 - 14 Janvier 2013 : Révolution — Contre-révolutio
Publié dans La Presse de Tunisie le 14 - 01 - 2013

L'année 2012 marque l'entrée en jeu fracassante d'un acteur musclé et accessoirement armé sur la frontière de la scène politique. Il ne cache pas son ralliement au parti Ennahdha... Histoire d'une milice qui manie violence, religion et manipulation sous le couvert de la loi des associations : les LPR, telles que les révèle notre enquête.
En réalité, l'histoire des Ligues de protection de la Révolution précède leur apparition sur le ring politique.
La nuit du 14 au 15 janvier sont nés les comités de protection des quartiers. Dossards blancs, bâtons à bout de bras et grands feux de bois, les Tunisiens, toutes appartenances confondues, prenaient en charge la sécurité du pays, parcelle par parcelle, contre un mystérieux ennemi... Quand deux semaines après, le danger fut écarté, la raison sécuritaire céda la place à la raison politique. Ainsi prenaient forme les Comités de protection de la révolution...
Noyauter les CPR
De formation civile, les CPR prennent, de par leur enjeu, un tournant et une couleur politiques. Ils virent à gauche et les partisans du POCT d'alors, décidés à «poursuivre la révolution», s'y taillent une place de choix. Tendance rapidement inversée au profit du mouvement Ennahdha qui voit dans ces comités un espace politique à conquérir.
Chronologiquement, le virage coïncide avec trois évènements majeurs : le retour de Londres, le 30 janvier 2011, de Rached Ghannouchi, leader du mouvement. La création, le 18 février, de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution et de la transition démocratique désavouée par les islamistes pour sa composition et sa tendance « laïques ». La libération et l'amnistie entre le 19 janvier et le 19 février des prisonniers appartenant au mouvement.
Sur une directive secrète promptement répercutée dans l'ensemble du pays, les militants et sympathisants du mouvement Ennahdha ont infiltré massivement et de manière synchronisée les comités et réussi, sans peine, à les noyauter... Etaient-ils simplement forts de leur nombre ou soutenus par un tiers méthodique et chevronné ?
L'activiste Sadok Ben Mhenni, fondateur du comité de protection de la révolution de la banlieue d'Ezzahra, confirme l'hypothèse d'une main forte et pas des moindres.
Le pacte des loups
«J'ai aussitôt découvert parmi eux la présence d'un ancien membre de la police politique qui s'est fait passer pour un blogueur, un informateur et un ex-président de cellule RCD... Ils ont vite fait d'en reproduire les méthodes louches et les sales stratégies... Je me suis retiré de justesse en même temps que tous les membres fondateurs... »
D'apparence invraisemblable, l'alliance dans un même quartier entre des militants nahdhaouis persécutés et leurs bourreaux présumés ressemble à une intrigue policière. Moetez Akacha nous aide à la déchiffrer. «Enfant du mouvement», comme il le revendique, il est depuis février 2011, président du CPR de Bab Souika.
«Il nous fallait un siège. Nous avons pris possession du comité de coordination de l'ancien RCD. Nous avons ouvert les archives et découvert les noms de tous les informateurs et tous les voisins qui appartenaient à la police politique de Ben Ali. C'était un choc. Nous avons alors pensé : ou nous nous entretuons ou nous brûlons les archives et protégeons ensemble notre quartier... Nous avons préféré pardonner...»
Pour l'activiste Sadok Ben Mhenni qui a vécu les mêmes faits dans son comité, la fusion ressemblait plus à un pacte malin qu'à de pieuses réconciliations.
Hammam El Kasbah
Ali Zarîi, syndicaliste de Sidi Bouzid, ajoute une autre péripétie. Il remonte le fil du sit-in d'El Kasbah 2 auquel il a activement participé et qu'il nomme ironiquement «Hammam El Kasbah». «C'était une sorte de purgatoire pour mercenaires, indice et corrompus du régime de Ben Ali qui ont scellé une union avec les islamistes et travaillé à marginaliser le rôle de l'Ugtt et à ternir son image». Version que ne dément pas Moetez : «On était tous ensemble à El Kasbah 2 ; le salafiste, le prêcheur, l'ancien prisonnier, le blogueur, le rcdiste, le flic, l'informateur... On avait un même rêve : transformer le travail de la mosquée en travail révolutionnaire! »
«Après El Kasbah, nous avons créé une coordination des CPR entre les 14 portes de la médina... Et c'est à partir de là que nous avons réfléchi à en élargir le cordon jusqu'à la ceinture de Tunis... »
Une nébuleuse
A partir de mars 2011, les CPR ont essaimé. Sur le terrain, beaucoup d'entre eux ont occupé les anciens locaux des comités de coordination et des cellules de l'ex-RCD, quadrillant le territoire de la même façon. Du côté de l'unité des partis et des associations relevant du secrétariat général du gouvernement, seuls seize sont déclarés. Mais le problème légal a vite été contourné avec la création et la publication sur le Journal officiel du 14 juin 2012 de la Ligue nationale de protection de la révolution. Celle-ci vient en un tour de main servir de couverture légale et d'association mère à tous les CPR antérieurs qui porteront désormais le nom de ligues régionales. «Il y en a au moins dans les chefs-lieux des gouvernorats et les grandes villes», apprend-on vaguement des services du secrétariat général du gouvernement. Ironie de l'histoire, Sidi Bouzid fait exception... «Les ligues de protection de la révolution, ce sont des imposteurs qui n'ont pas de place ici», affirment les Bouzidiens.
Partout ailleurs, la machine LPR avance avec les contours imprécis d'une nébuleuse. Elle s'organise à deux niveaux : les présidents et membres des bureaux d'un côté et, à une distance très respectable, la toile des membres opérant à l'arrière-plan. Les premiers, devenus pour certains des figures médiatiques, tiennent des conférences de presse et organisent des manifestations culturelles. Les seconds, secrètement reliés par GSM à un chef, mènent, sur demande, une activité intermittente et sans traçabilité. Il ne s'agit pas que de jeunes chômeurs, mais aussi de commerçants, de chauffeurs de taxi et de commis d'administration. «Je n'ai pas de relation avec mes miliciens... ». Le président de la ligue de Bab Souika se rétracte sur le mot miliciens : «J'ai 68 membres d'une moyenne d'âge de 25ans... »
Des finances opaques
Les miliciens sont rémunérés au gré des interventions.
Comment les ligues financent-elles leurs activités licites et illicites ?
«Nous puisons les ressources financières de la ligue nationale dans les adhésions et le financement public, en plus des dons accordés par les révolutionnaires et les citoyens...», répond vaguement Mohamed Mâalej, président de la ligue nationale. Celui de Bab Souika confie être aussi président de l'association Sahab Ettabaâ de la culture islamique. Une ONG prospère qui compte 1.400 étudiants, des prêcheurs et des partenaires dans le monde.
A la lisière du pouvoir, les LPR se dopent aussi de religion et ne semblent pas avoir de difficultés à trouver l'argent.
De là à fonctionner comme un appareil de renseignement ou des milices armées, selon les récentes hypothèses d'une investigation menée par le site Nawaat, et en attendant que la justice se prononce un jour, se pose au moins cette question : jusqu'où peuvent aller les gardiens de la révolution et que feront-ils de nos prochaines élections ?
Sur fond de conspiration
Du 9 avril, sur l'avenue Habib-Bourguiba, au 18 octobre, à Tataouine, en passant par le sit-in «Médias de la honte» devant le siège de la télé, les interventions des ligues ont souvent défrayé la chronique par leur brutalité et leur impunité, masquant un champ d'action plus large et plus sournois. Semaine de vigilance lors de la session du baccalauréat de juin 2011, mobilisation pour la campagne électorale et les élections du 23 octobre, tags et grafittis appelant à combattre la contre-révolution, collectes d'argent devant les mosquées, semaine de vigilance à l'occasion du 23 octobre contre ceux qui menacent la légitimité, campagnes régulières sur les pages FB des ligues à l'encontre des médias et des partis d'opposition ... Un point commun : il n'y a pas une seule activité de milices qui ne réponde à la menace diffuse d'un complot. «On nous a donné trente dinars, une combinaison et une matraque et on nous a demandé de défendre le pays contre ceux qui veulent semer la zizanie... Pendant les affrontements, une voix nous sommait de nous défendre fermement contre des assaillants que je ne voyais pas... La voix disait : attention! Ce sont les hommes de Hamma, ils arrivent... Ils vont vous attaquer si vous ne vous défendez pas... Au bout d'un moment, il n' ya pas eu d'assaillants et j'ai senti que tout était monté... », témoigne, lors de son interrogatoire, un jeune milicien enrôlé par la ligue de Bab Souika dans les affrontements du 9 avril.
Les sombres complots des hommes d'affaires et des anciens clans au pouvoir, le retour des rcdistes, l'hérésie de la gauche et des médias qui conspirent contre le gouvernement légitime... Voilà le leitmotiv qui enflamme les miliciens. Intrigues et fausses menaces, toutes les raisons sont là pour installer les dispositifs progressifs de défense : surveillance, délation, attaques, élargissement du réseau...


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