Par Abdou Mezri (*) Aujourd'hui, la Tunisie est bouleversée politiquement et socialement par l'assassinat de Chokri Belaïd, un militant engagé par amour du pays, mort pour son idéal politique pour lequel il s'est investi sa vie durant. Son âme est partie, mais son image politique reste dans les esprits. Au nom de quel droit, de quelle morale et de quelle idéologie on élimine physiquement un compatriote, de surcroît citoyen père de famille, qui ne porte en lui que sa plume et sa parole, ses seules armes pour transmettre ses cris et ses messages. Farhat Hached, le légendaire militant syndicaliste luttant pour l'indépendance, a subi un sort similaire, assassiné par la Main Rouge du colonialisme français. Mais Chokri Belaïd, à la différence de Hached, aurait été tué par les siens, des Tunisiens comme lui avec lesquels il partage les dures épreuves du quotidien. Un tel acte constitue incontestablement un appel fort de mise en garde contre les dérives, source de division et de discorde en attendant le déclin. L'assassinat d'un homme quelle qu'en soit l'aspiration politique, artistique, religieuse ou autre constitue un drame humain immoral. Un tel acte dramatique de mort physique ouvre-t-il le débat sur l'existence même des partis politiques dans un pays émergent pour éviter le choas et l'anarchie? Au regard des derniers événements, et même depuis le début de la révolution, je ne cesse de m'interroger : sommes-nous réellement dignes du multipartisme et de la démocratie ? Sommes-nous prêts pour la construction du pays au vu du constat alarmant de la situation politique et sociale de la Tunisie aujourd'hui. Il faut se mettre à l'évidence que les troubles qui se succèdent dans notre pays sont suivis et jugés à la loupe par les pays du monde entier, souvent déçus par les agitations sans fin, qui sèment le doute quant à la stabilité politique pour la coopération et la concorde. Vous, peuple tunisien, en tant que patriotes, je vous dis haut et fort : le monde vous regarde et la révolution vous surveille. Soyez intelligents et exemplaires, ne gâchez par votre devenir, les martyrs vous entendent et ne vous pardonneront pas. L'espoir et les solutions de sortie de crise existent et les malintentionnés fauteurs de troubles aussi. Ayez pitié de ce pays ancestral qui a toujours refusé le fatalisme, la soumission et la défaite. Mettez-vous au travail avec dévouement, amour et conscience. Soyez patients et débarrassez-vous des idées malvenues et du négationnisme aux conséquences imprévisibles. Seules vos valeurs vous sauvent. Ne comptez que sur vous-mêmes sans assistanat ni compromis douteux. Gardez la tête haute et bougez positivement dans la discipline, le dévouement et le respect mutuels. C'est ça la démocratie, la liberté et la dignité attendues des peuples opprimés et démunis. Passez au concret en premier, c'est-à-dire la priorité à la politique du savoir et de l'action économique avant l'idéologie politique. La politique est un jeu diplomatique et de conflits d'intérêts incompatibles avec l'Islam à valeurs humaines. En un mot, soyez de vrais patriotes responsables et ouvrez-vous à l'aube du futur et du réalisme. La société humaine est déjà mal en point et la planète martyrisée par les abus de l'homme. Ne rajoutons pas du mal au mal pour éviter l'emballement et la faillite. Tel est mon premier message qui sera suivi sans doute par d'autres sur d'autres sujets et circonstances. Qu'Allah bénisse la Tunisie et la Terre entière qui en ont expressément besoin. *Artiste, scientifique