L'administration tunisienne est, en grande partie, à la croisée des chemins. En peine de transparence et de neutralité, elle risque d'approfondir les plaies du pays pour finalement le plonger dans le chaos total. C'est l'attitude de l'Union tunisienne du service public et de la neutralité de l'administration (Utspna). Une attitude formulée par son président, Abdelkader Elabaoui, dans le cadre d'une conférence de presse tenue, hier, à Tunis. En effet, il a indiqué que plus de 3 mille nominations, dont 1.197 nominations directes, enregistrées depuis la révolution du 14 janvier ont été faites sur la base de l'allégeance politique. Ce qui a généré l'accès à des postes-clés de plusieurs «nouveaux venus» en flagrant manque de compétence. D'où le trébuchement et l'improvisation marquant les décisions prises et la médiocrité des prestations fournies aux citoyens. L'intervenant a, ensuite, fait remarquer que l'institution qu'il préside en a, à maintes reprises, averti le gouvernement. Mais ce dernier après avoir promis d'engager une structure compétente pour réviser ces nominations, n'a rien fait de concret, depuis, si bien que ses promesses sont restées lettre morte. L'Union et ses partenaires relevant des forces syndicales, du tissu associatif et d'autres composantes de la société civile sont plus que jamais attachés, a-t-il ajouté, à la formation d'une commission regroupant des experts administratifs, des activistes associatifs et des représentants de la société civile, pour assurer la révision de ces nominations dans des délais bien déterminés et en fonction des critères requis. Le représentant de l'Union générale des travailleurs tunisiens, Moez Lemkadem, a abondé dans le même sens. Il a fait observer que plusieurs nouveaux nommés à des postes de responsabilité au sein de l'administration tunisienne ont échoué à accéder à l'Assemblée nationale constituante, après avoir perdu la bataille électorale. «Leur nomination à de hauts postes administratifs se veut comme une compensation et obéit uniquement à des considérations partisanes et à des calculs politiques», a-t-il souligné. Le secrétaire général de l'Utspna, Ahmed Souab, a déclaré que les récentes nominations de plusieurs gouverneurs ont également obéi au même principe, à savoir l'allégeance politique. De ce fait, il a précisé que contrairement à ce que laisse entendre le parti majoritaire à l'ANC, le poste de gouverneur est un poste technique et la personne qui l'occupe doit disposer des compétences qu'il faut pour parvenir à s'acquitter d'une mission délicate et compliquée. Dans la même optique, il a indiqué que la même démarche pour ce qui est des récentes nominations concerne également le ministère de l'Intérieur, la magistrature et l'Agence technique du transport terreste, entre autres. Prenant la parole, le président du syndicat du ministère des Affaires étrangères, Hamed Ben Brahim, a noté que l'injustice règne au sein du ministère où il exerce. De ce fait, il a précisé que le régime adopté par la Tunisie s'agissant de l'exercice diplomatique consiste à confier les missions diplomatiques aux professionnels avec une certaine alimentation de l'extérieur du corps, au besoin. Or, ce n'est plus le cas depuis la révolution, puisque la plupart des nouveaux représentants ne relèvent pas du personnel du ministère des Affaires étrangères. Moez Bouraoui, président de l'Association tunisienne pour l'indépendance et la démocratie des élections (Atide), a avancé que l'indépendance de la prochaine Instance supérieure indépendante pour les élections ne semble pas à l'abri d'un fléau qui ne cesse de se propager : la partialité. Pour justifier son hypothèse, il s'est référé à la loi n° 23 du 20 décembre 2012 qui stipule que le président de l'Isie bénéficie de la même rémunération que celle d'un ministre, sans préciser le rang où le statut qu'il doit avoir. Il a, en outre, dénoncé l'interdiction aux journalistes et aux activistes associatifs intéressés par les débats portant sur la composition et les textes de loi régissant l'exercice de la nouvelle Isie, aux réunions de la commission concernée au sein de l'ANC.