La Cnrps prévoit un déficit de 273 millions de dinars pour l'année 2013 Au cours d'un CMR tenu la semaine dernière, les responsables politiques ont appelé à engager un dialogue national afin de réfléchir aux solutions qui permettraient de sauver les caisses de sécurité sociale La Cnrps s'essouffle et a de plus en plus de mal à payer les pensions de ses affiliés. Chaque année, l'écart ne fait que se creuser entre les contributions des affiliés actifs et les pensions de retraite alimentées par ces cotisations. En 2011, les cotisations des actifs s'élevaient à 1.822 millions de dinars alors que les pensions de retraite ont atteint la même année 1.926 millions de dinars. Le déséquilibre cotisations/pensions de retraite s'est s'accentué au cours de l'année 2012. Les cotisations ont atteint 2.031 millions de dinars contre 2.195 millions de dinars pour les pensions de retraite, soit un déficit qui représente plus de 160 millions de dinars. La crainte des retraités affiliés à la Cnrps Cette année, la caisse prévoit un déficit de 273 millions de dinars. A cours de liquidités, elle a dû puiser dans le budget de la Trésorerie générale qui lui a accordé une avance sur les prochaines contributions mensuelles des ministères, afin qu'elle puisse assurer, à la fin du mois, le payement des pensions de ses affiliés. «Cette solution provisoire va permettre à la caisse de s'acquitter des pensions au cours des mois à venir mais cette situation ne pourra pas durer éternellement. Cette avance sera régularisée, en ponctionnant 20 millions de dinars sur les contributions mensuelles des ministères au cours de la période février-août 2013», explique Mohamed Kraïem, directeur à la Cnrps. L'inquiétude se fait sentir aujourd'hui chez les retraités affiliés à la Cnrps qui craignent de ne plus recevoir un jour leurs pensions de retraite, alors qu'ils ont cotisé pendant des années. «Cette crainte n'a pas lieu d'être, relève le responsable. Certes, la Cnrps traverse une crise et est en manque de liquidités. Mais ce n'est pas la première fois que cela nous arrive. Nous ne serons jamais en cessation de payement». L'amélioration de l'espérance de vie des affiliés de la caisse, le durcissement de la politique de recrutement dans la fonction publique, la privatisation, à la fin des années 80, de plusieurs secteurs publics qui a fait perdre à la Cnrps des milliers d'affiliés actifs et la sortie à la retraite anticipée de centaines d'affiliés comptent parmi les facteurs exogènes qui ont conduit lentement et inexorablement la caisse à la crise. Un déséquilibre financier difficile à rétablir Les facteurs d'ordre endogène n'ont fait qu'accentuer davantage le déséquilibre financier de la caisse, mettant à mal ses ressources financières. En effet, la loi 85-12 du 5 mars 1985 a permis d'instituer un régime public de retraite généreux qui offre de nombreux avantages pour les retraités. Alors que dans la plupart des pays européens, la pension de retraite est calculée sur la base de l'ensemble des salaires déclarés tout au long de la période d'activité, ce qui permet, ainsi, d'obtenir des pensions de retraite raisonnables, il en va autrement pour les pensions versées par la Cnrps dont le montant est défini sur la base du meilleur salaire perçu au cours des deux dernières années. Deux autres avantages ont permis de garantir des retraites confortables aux affiliés de la caisse : plus le nombre d'années d'ancienneté est élevé et plus l'affilié a de chances de toucher une retraite confortable qui peut atteindre jusqu'à 90% du salaire de référence. A titre de comparaison, dans un pays comme la France ou la Grande-Bretagne, ce taux ne dépasse pas 50%, quel que soit le nombre d'années passées au travail. Par ailleurs, la caisse a instauré le système de péréquation des pensions, un système unique au monde, qui garantit une augmentation des pensions à chaque fois que les agents en activité bénéficient d'une augmentation de salaire. Ce système, qui a été mis en place à la fin des années 80, continue à être appliqué aujourd'hui. Entretemps, l'indice démographique a baissé d'une année à l'autre pour passer de 10 actifs pour un retraité dans les années 80 à 4 actifs pour un retraité en 2000 et à 2,54 actifs pour un retraité en 2012, contribuant à alourdir le déséquilibre financier de la caisse. «Alors que le nombre d'affiliés a baissé ce qui a entraîné une diminution des ressources de la caisse, le nombre des retraités n'a cessé d'augmenter, explique Basma Kedhiri, responsable exerçant à la Cnrps. Nous comptons actuellement 730 mille affiliés dont les contributions servent à financer les pensions de retraite. Le montant global des pensions est supérieur à celui des contributions des affiliés actifs. Les cotisations ne couvrent plus les retraites». Le taux de cotisation revu à la hausse Excédentaire à sa création, la caisse est devenue déficitaire. Les premiers soubresauts de la crise se sont fait sentir en 1986. La Cnrps, qui n'arrive plus à faire face aux dépenses relatives notamment au payement des retraites, décide de prendre les premières mesures nécessaires afin de rétablir son équilibre financier. Le taux de cotisation est revu à la hausse et passe de 14, 2% à 17,2% en 2001, 19,7% en 2007 et à 20,7% en 2011. «Des mesures conjoncturelles sont adoptées, à chaque fois que la caisse traverse une crise, afin de résorber le déficit. Or, pour maintenir la viabilité du système, il faut réformer de fond en comble le système», note Mohamed Kraïem. Selon ce jeune responsable, il s'agirait notamment de retarder l'âge de départ à la retraite, de revoir à la baisse le rendement des annuités et de plafonner le montant brut de la pension. «Il faudrait également penser à créer un fonds consacré au régime de la retraite qui pourrait être alimenté, par d'autres sources de financement. On pourrait, à titre d'exemple, prélever une petite taxe sur les sms qui irait automatiquement aux caisses de sécurité sociale». La question de la solvabilité des caisses de sécurité sociale préoccupe, aujourd'hui, les responsables politiques qui ont appelé, au cours d'un conseil ministériel restreint tenu la semaine dernière, à engager un dialogue national afin de réfléchir aux solutions qui permettraient de sauver le secteur de la banqueroute.