Des centaines de personnes continuent à déposer leur argent afin de le faire fructifier dans cette société de collecte de fonds Bien qu'une enquête soit actuellement en cours sur les activités « suspectes » qu'elle mène, la société Yosr Développement n'a pas fermé ses portes et continue à collecter des fonds. Il y a deux semaines, le communiqué de la Banque centrale, qui avait dénoncé les activités illégales de cette société, appelant à sa fermeture, a suscité la panique chez les clients qui se sont précipités à son siège pour retirer leur argent. Des milliers de personnes ont vendu leurs biens, contracté des prêts de leur travail et retiré leur argent de la banque pour le déposer chez la société afin de le faire fructifier. Il faut dire que les formules proposées par la société sont alléchantes. La collecte de fonds s'effectue par le biais d'achats de cartes de développement mutuel. Les bénéfices augmentent proportionnellement à la valeur de la carte acquise par l'adhérent. Celui qui achète une carte d'un montant de 50 dinars reçoit au bout de deux mois une prime de 110 dinars. L'acquisition d'une carte de 90 dinars permet de réaliser au bout de quatre mois 180 dinars de bénéfices. L'achat d'une carte de 100 dinars permet de rapporter après deux mois 280 dinars. Une carte de 2.800 dinars permet de rapporter au bout de quatre mois 7.500 dinars de bénéfices et un investissement de 21.500 dinars assure, au bout de six mois, un bénéfice de 65.000 dinars. La société propose également des cartes qui permettent au bout d'un certain temps de percevoir des bénéfices mensuels fixes variant entre 300 et 750 dinars par mois pour l'acquisition de cartes d'une valeur allant de 800 dinars jusqu'à 3.000 dinars. Un montage financier toujours suspect Comment la société peut-elle arriver à réaliser des bénéfices en aussi peu de temps et verser des dividendes confortables à ses clients ? C'est la question que se pose tout le monde aujourd'hui. Même si, comme l'affirme le responsable de la société, l'argent collecté est investi dans des projets d'assurance, de réassurance et de promotion immobilière nouvellement créés par l'entreprise, il est peu probable que ces activités dégagent des bénéfices aussi importants en si peu de temps. Aujourd'hui, les doutes planent sur le type de montage financier mis en place par la Sarl qui s'est, fort probablement, inspiré du système frauduleux créé par Charles Ponzi. Cet immigrant italien qui s'est installé aux Etats-Unis avait créé sa propre société, fonctionnant grâce à des dépôts d'argent. Il promettait, à qui voulait bien déposer son argent qu'il le ferait fructifier et qu'il percevrait un retour sur investissement élevé. En fait, les dividendes versés aux clients étaient alimentés par les rémunérations des nouveaux entrants. Tant que le nombre des nouveaux clients continuait à être supérieur à celui des anciens, le système fonctionnait à merveille. Mais la duperie ne durera pas très longtemps et le système a fini par s'écrouler. Malgré son échec et la catastrophe financière qu'il a entraînée sur son sillage, des personnes dépourvues de scrupules n'ont pas hésité à l'exporter dans d'autres contrées. Le scandale Madoff reste un des plus célèbres exemples d'escroquerie à large échelle. Pendant des années, il a «extorqué» des millions de dollars à des clients appâtés par le gain avant d'être démasqué. Le fondateur de Yosr Développement a-t-il été tenté lui aussi par l'expérience? Personne n'a pu le prouver jusqu'ici mais le spectre de Ponzi plane sur la société. La Banque centrale a encore une fois, cette semaine, mis en garde les personnes tentées par l'aventure de déposer leur argent dans cette société. Le procureur de la République, qui s'est saisi récemment de l'affaire, a chargé le pôle judiciaire de plancher sur ce dossier. Il est fort possible que le pôle prenne la décision de geler les comptes de la Sarl afin que les déposants puissent récupérer leur argent ou ce qu'il en reste avant que la société ne fasse faillite. Ce qui permettra de sauver les meubles. Bref, les prochains mois nous le diront.